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Le Monde attaque l’Institut Libre de Journalisme (ILDJ), l’école qui œuvre au pluralisme

7 octobre 2024

Temps de lecture : 14 minutes
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Le Monde attaque l’Institut Libre de Journalisme (ILDJ), l’école qui œuvre au pluralisme

Temps de lecture : 14 minutes

L’inquiétude gronde au Monde, comme dans les arcanes du pouvoir politique : journalistes de grand chemin et politiques de feu le nouveau monde libéral libertaire macroniste découvrent avec stupeur que l’on peut penser autrement. Liberté de pensée, liberté d’opinion, liberté d’expression selon des angles autres que les leurs ? Ils n’y étaient pas habitués. Le Monde pas plus que les autres.

Allons Le Monde ! Un peu de rigueur !

C’est pourquoi le pré­ten­du « quo­ti­di­en de référence » a pub­lié le 26 sep­tem­bre 2024 une « Enquête sur l’Institut Libre de Jour­nal­isme (ILDJ, ndr), l’école créée par la droite iden­ti­taire pour con­quérir les médias ». Le mot « iden­ti­taire » ne sera jamais défi­ni. Ce serait pour­tant un min­i­mum. Non, l’angle est plus sim­pliste et est invo­qué dans le cha­peau de cette enquête pro­posée sous forme de vidéo (Le Monde ressem­ble de plus en plus au New York Times de par les types de con­tenus numériques qu’il pro­pose à ses abonnés) :

« Le Monde dévoile com­ment lInsti­tut libre de jour­nal­isme (ILDJ), une école parisi­enne proche des réseaux de Vin­cent Bol­loré et du mil­liar­daire catholique Pierre-Édouard Stérin, ali­mente les médias de la droite réac­tion­naire mais aus­si au-delà. »

Les iden­ti­taires seraient donc « les réseaux de Vin­cent Bol­loré » (Le JDD ? Le JDNews ? C8 ? Canal +, Cnews ? Éton­nant…), ceux du « catholique Pierre-Édouard Sterin » (Le pro­jet Péri­clès ? L’Institut de For­ma­tion Poli­tique ? Un pro­jet de 300 libraires de prox­im­ité ? Eton­nant, bis repeti­ta…) ? Ce qui est évo­qué par Le Monde, ne serait-ce pas plutôt du domaine d’une cer­taine droite con­ser­va­trice et chré­ti­enne ? Nous sommes loin des sci­ences poli­tiques et les enquê­teurs du Monde, Liselotte Mas, Asia Bal­luffi­er, Elsa Longueville et Mahé Richard-Schmidt, une équipe peu par­i­taire, man­quent de rigueur. Car en toute rigueur une vision poli­tique iden­ti­taire en Europe aujourd’hui n’est ni de droite ni de gauche mais plutôt cen­trée sur la défense de la civil­i­sa­tion européenne, laque­lle est loin d’être sim­ple­ment chré­ti­enne. Aucun des médias cités par l’enquête, ceux vers lesquels se diri­gent les futurs jour­nal­istes de l’ILDJ, n’est iden­ti­taire. Ils sont con­ser­va­teurs, chré­tiens, chré­tiens non con­ser­va­teurs (RCF), inclass­ables (Causeur), de PQR et même main­stream pour cer­tains. Les enquê­teurs ne poussent par ailleurs guère leur tra­vail, sans quoi ils auraient aisé­ment appris que d’autres lieux de for­ma­tion, ain­si l’ISSEP de Lyon, ont pu pro­pos­er des cours de rédac­tion d’articles de presse con­duisant de jeunes étu­di­ants à pub­li­er dans nom­bre de jour­naux et de mag­a­zines. Reste que l’inquiétude du Monde se com­prend : la for­ma­tion de l’ILDJ est qual­i­ta­tive. La preuve : ses étu­di­ants sont nom­breux à trou­ver un emploi dans le secteur jour­nal­is­tique ou dans celui de la com­mu­ni­ca­tion. Si elle n’était pas qual­i­ta­tive, Le Monde ne s’en préoc­cu­perait pas.

Une enquête pour faire peur ou pour se faire peur ?

La vidéo dure un peu moins de 11 min­utes. Sa pre­mière image mon­tre, à droite, Vin­cent Bol­loré, forte stature, con­quérant, et der­rière lui, la tête au-dessus de son épaule, Pierre-Édouard Sterin. Les mots qui font peur for­ment le titre : « Leur école pour con­quérir les médias ». Une accroche de type faits divers, le genre d’accroche que les médias de grand chemin reprochent habituelle­ment à ceux qui ne pensent pas comme eux et qui de ce fait ne seraient, selon eux, pas légitimes.

Ouver­ture, au son d’une musique dra­ma­tique, elle-même de type fait divers : « depuis plusieurs années (cha­cun appréciera la pré­ci­sion, ndlr), le paysage médi­a­tique s’est droitisé ». Droitisé ? De quoi s’agit-il ? Flo­rilège et grand mélange dans la foulée, des paroles de per­son­nes non iden­ti­fiées, sans aucun lien avec l’ILDJ sur des plateaux de télévi­sion, et sans con­texte. La droiti­sa­tion vis­i­ble­ment ce serait ceci : « Avorter c’est con­traire à la mis­sion de la femme » ; « Le plus grand dan­ger pour les femmes en France actuelle­ment ce sont les hommes noirs, africains, immi­grés et arabes ». C’est aus­si l’assimilation du Front Pop­u­laire au Hamas. D’emblée, l’outrance. Sans tran­si­tion : « Mais pour que ces rédac­tions fonc­tion­nent, encore faut-il de jeunes jour­nal­istes pour les rejoin­dre. Un manque iden­ti­fié par l’Institut Libre de Jour­nal­isme, l’ILDJ ». Ain­si, pour tenir les pro­pos cités ci-dessus il faut des jour­nal­istes. Sauf que ces pro­pos ont été en réal­ité proférés par deux chroniqueurs et une femme poli­tique, aucun n’étant jour­nal­iste et aucun n’étant passé par l’ILDJ. Peu importe, tant qu’il y a amalgame.

Présen­ta­tion par la jour­nal­iste enquêtrice :

« Le Monde a enquêté sur cette école de jour­nal­isme à l’agenda très poli­tique (ce n’est sans doute pas le cas des autres écoles, ndlr). Nous avons analysé les pro­fils mil­i­tants, par­fois par­mi les plus rad­i­caux de ses étu­di­ants, et retracé les liens de ses étu­di­ants avec plusieurs groupes poli­tiques et médi­a­tiques français ».

Poli­tiques ? Au pre­mier rang, le RN et Recon­quête. Et même LR. Médi­a­tiques ? Bol­loré, Europe 1, France Catholique, CNews, Cap­i­tal, Le JDD, C8, Canal +, Boule­vard Voltaire, Valeurs Actuelles, Neo, Causeur… Le tout en surim­pres­sion sur l’image. Aucun média iden­ti­taire, au sens rigoureux du terme donc.  Pré­ci­sion : « Il s’agit d’un réseau de con­quête médi­a­tique par la droite de la droite ». L’enquêtrice ne met rien en per­spec­tive, par exem­ple en inter­ro­geant la main-mise de la gauche sous toutes ses formes sur l’espace médi­a­tique depuis 50 ans minimum.

L’ILDJ, comment cela fonctionne ?

Pas très sérieuse­ment, évidem­ment, aux yeux du Monde. Com­ment pour­rait-il en être autrement ? Dix week-ends pen­dant un an, soit 150 heures de for­ma­tion. « C’est à peu près dix fois moins que dans la plu­part des écoles de jour­nal­isme recon­nues par la pro­fes­sion où la sco­lar­ité s’étale générale­ment sur toute la semaine pen­dant deux années ». Une com­para­i­son sim­pliste. En pre­mier lieu, une for­ma­tion peut être délibéré­ment inten­sive. Ensuite, les for­ma­tions sur deux ans, dans des écoles mar­quées à gauche, com­por­tent, témoignages à l’appui, beau­coup de temps morts, d’heures de travaux col­lec­tifs peu pro­duc­tifs et de paus­es clopes. Enfin, con­sid­ér­er que ces écoles sur deux ans seraient celles « recon­nues par la pro­fes­sion » par un syn­di­cat auto-pro­tégé revient à dire que les médias cités plus haut ne feraient pas par­tie de la pro­fes­sion jour­nal­is­tique. Voilà une étrange manière de voir les choses. Ain­si un média de droite con­ser­va­trice ne serait par nature pas jour­nal­is­tique. Le pire ? Il y a fort à pari­er que de telles visions des choses fassent par­tie de l’inconscient col­lec­tif des médias de grand chemin et des jeunes jour­nal­istes for­més dans les écoles pré­ten­du­ment non poli­tiques, con­crète­ment tenues par la gauche libérale libertaire.

Le prix ? 1250 euros annuels. Aucune expli­ca­tion de la part du Monde sur ce faible coût, pour­tant bien expliqué sur le site de l’école par sa volon­té d’être acces­si­ble au plus grand nombre.

Notons que l’enquêtrice masque une grande par­tie de la réal­ité car, et une sim­ple vis­ite sur le site de l’école per­met de le con­stater, sa propo­si­tion de for­ma­tion est bien plus riche et plus complexe :

  • La for­ma­tion en dix week-ends a pour objec­tif d’aider les étu­di­ants à pré­par­er les con­cours d’entrée des écoles de jour­nal­isme et pour cela « ini­tie aux tech­niques jour­nal­is­tiques » ; d’aider des étu­di­ants qui souhait­ent se for­mer au jour­nal­isme en par­al­lèle de leurs études ; d’aider de jeunes pro­fes­sion­nels qui veu­lent se recon­ver­tir dans le journalisme.
    La présen­ta­tion de l’enquête du Monde est donc volon­taire­ment biaisée, à la lim­ite du men­songer : l’ILDJ pro­pose des for­ma­tions adap­tées à des pro­fils divers, la com­par­er aux écoles du sys­tème en place de longue date tient de la mau­vaise foi.
  • La for­ma­tion « cul­ture générale » en cinq week-ends pour de jeunes gens déjà dans une école de journalisme.
  • À par­tir d’octobre 2024, un Mas­ter en alter­nance « Jour­nal­isme dig­i­tal web ». Qua­tre jours en rédac­tion et un jour à l’école. Une for­ma­tion en présen­tiel ou à dis­tance, com­pat­i­ble avec une alter­nance en presse régionale ou un con­trat de pro­fes­sion­nal­i­sa­tion en alternance.

Le Monde a trou­vé qua­tre anciens étu­di­ants qui ont accep­té de témoign­er anonymement. For­cé­ment. Il n’y a pas d’enquête malveil­lante sans bre­bis égarées et repen­ties. Donc, « Tous décrivent des cours tech­niques con­sti­tu­ant une bonne intro­duc­tion au méti­er mais trop lacu­naires pour inté­gr­er directe­ment le marché du tra­vail ». Quoi de plus nor­mal ? Ce n’est pas l’objectif immé­di­at de l’école. Le Monde n’a pas trou­vé d’étudiants pour un con­tra­dic­toire sur ce sujet ? D’expériences d’intégration directe dans le marché du tra­vail ? Il y en a pour­tant. Nous ne le saurons pas, la jour­nal­iste n’en par­le pas, ou ne les a pas cher­chés, ou a préféré ne pas en par­ler. Prob­a­ble­ment savait-elle par avance ce qu’elle voulait trou­ver : des étu­di­ants déçus qui recon­nais­sent pour­tant la qual­ité de la for­ma­tion. Sinon, à quoi bon cette enquête ? L’objectif est tout de même de dén­i­gr­er la qual­ité de la for­ma­tion de jour­nal­istes appelés à tra­vailler dans des médias con­sid­érés comme de droite et con­ser­va­teurs, médias gênants les anci­ennes habi­tudes du sérail. Pour­tant, la malveil­lance ne fonc­tionne guère : les témoins pré­cisent bien qu’ils sont venus chercher une ini­ti­a­tion. Du moins pas « tous » con­traire­ment à ce qui est indiqué puisque sur les qua­tre témoins revendiqués la parole n’est don­née qu’à deux. Sur 195 (Le Monde dit fau­tive­ment 160) étu­di­ants passés par l’ILDJ depuis 2018.

Il y a aus­si des con­férences, elles gênent beau­coup plus l’enquêtrice car elles seraient «  très poli­tiques » (con­traire­ment à celles des autres écoles de jour­nal­isme ? Ndlr). Pho­tos à l’appui, der­rière des pupitres, appa­rais­sent Char­lotte d’Ornellas, Eugénie Bastié, Gabrielle Cluzel, Elis­a­beth Lévy et Math­ieu Bock-Côté. Etrange­ment, l’importance de la présence fémi­nine n’est pas soulignée. Par con­tre, un décompte de 37 de ces con­férences de jour­nal­istes indi­querait que plus de 80 % « assume ouverte­ment un dis­cours de droite ou d’extrême-droite ». Qu’est-ce qui leur per­met d’affirmer la teneur des pro­pos tenus par ces jour­nal­istes ? La ligne édi­to­ri­ale de leur média ? Un min­i­mum de déon­tolo­gie, laque­lle s’apprend sans aucun doute dans des écoles for­mant sur deux ans, devrait sans doute con­duire à expli­quer ce que sig­ni­fie le terme « extrême-droite », en par­ti­c­uli­er quand on l’applique à un individu.

Les étudiants ?

Des pro­fils effrayants. For­cé­ment. Depuis 2018, l’ILDJ a for­mé 195 étu­di­ants. Le Monde en a retrou­vé 123. « Sur inter­net, leurs engage­ments poli­tiques et religieux ressor­tent assez net­te­ment ». Voilà qui sent bon sa police de la pen­sée, non ? Déjà, poli­tique… Mais, religieux ? Quel rap­port ? Que trou­ve l’enquête ?

  • Cinq étu­di­ants se sont présen­tés à des élec­tions : qua­tre pour le RN, une pour Reconquête.
  • « D’autres mili­tent pour les jeunes avec Zem­mour, les jeunes LR ou la Cocarde étu­di­ante ». Les jeunes LR ?? Extrême-droite ? Notons que l’un de leurs respon­s­ables est régulière­ment invité sur le plateau du Médi­atv, média de la gauche de la gauche ayant des sym­pa­thies LFI. Même sans cela, assim­i­l­er les jeunes LR à un courant poli­tique dit d’extrême-droite con­fine au comique.
  • Sept seraient des mil­i­tants anti-avorte­ment. Où ? Quand ? Comment ?
  • « La majorité expose ouverte­ment sa foi catholique ou s’affiche avec des asso­ci­a­tions catholiques ». Police de la pen­sée, donc. Quel rap­port ? Le Monde rap­porterait-il un affichage athée d’un mil­i­tant NPA LGBTQ+++ d’une école de jour­nal­isme de Lille ?

Donc : douze à peu près iden­ti­fiés… dont cinq dans des par­tis de ce qu’il est main­tenant con­venu d’appeler l’arc répub­li­cain puisqu’ayant des élus à l’Assemblée Nationale ou au par­lement européen. « D’autres » et « La majorité », sans plus de pré­ci­sion… Tout cela sent son ama­teurisme de basse police. Pour­tant : « Selon nos analy­ses, plusieurs d’être eux sont même liés à une extrême-droite plus rad­i­cale ». Nous y voilà. C’était l’objectif de tout ce bla-bla.

Un peu de bien­veil­lance et de largesse. Si nous suiv­ons la jeune jour­nal­iste du Monde, sur 195 étu­di­ants passés par l’ILDJ depuis 2018, soit six ans, seize seraient, selon elle, qual­i­fi­ables d’extrémistes de droite… La ques­tion des mem­bres du RN se pose tout de même… Alors, com­bi­en ? Douze ? Non. Largesse, écriv­ions-nous. Seize sur six ans, dont qua­tre sem­blent engagés dans des mou­vances habituelle­ment con­sid­érées comme de droite rad­i­cale. Il y aurait ain­si, en étant large, moins de 3 étu­di­ants par an con­cernés par cette enquête du Monde passés par l’ILDJ ? Encore moins : qua­tre sur 195 ? L’auditeur de la vidéo attend ce genre d’enquête sur les écoles de jour­nal­isme for­mant sur deux ans et la gauche de la gauche avec une cer­taine impa­tience. Tout le monde con­naît ces sim­u­la­tions de votes réal­isées dans les écoles de jour­nal­isme à l’occasion des prési­den­tielles où la gauche et l’extrême gauche réalisent des scores écras­ants. On attend tou­jours une enquête dans Le Monde. En espérant plus de sérieux.

Les débouchés ?

C’est tout le dan­ger n’est-ce pas ? Ces jeunes méchants futurs jour­nal­istes, mal for­més sem­ble-t-il, et extrémistes en masse, ont un des­tin : celui de rejoin­dre les empires médi­a­tiques du Mal en cours de for­ma­tion dans le paysage audio­vi­suel. Où les étu­di­ants de l’ILDJ sont-ils allés tra­vailler ? CNews, Le Figaro, Valeurs Actuelles, Boule­vard Voltaire, Causeur, RCF, La Manche Libre… Ce qui ne serait pas éton­nant car l’école aurait des parte­nar­i­ats économiques avec ces médias. Des parte­nar­i­ats ? Comme partout. Comme dans Le Monde. Une pra­tique commune.

Tous les mois étu­di­ants et anciens étu­di­ants reçoivent des mails internes de propo­si­tions d’emplois. 10 % des annonces pro­poseraient de rejoin­dre un média du groupe Bol­loré. Une école qui offre, ce n’est évidem­ment pas l’avis du Monde, des débouchés plutôt intéres­sants pour un jeune jour­nal­iste. Notons que l’enquêtrice se con­tred­it : l’école forme bel et bien des jour­nal­istes puisqu’ils sont amenés à tra­vailler dans des médias, cer­tains étant de très forte ampli­tude. Sauf à con­sid­ér­er que ces médias n’en seraient pas (Le Figaro ?). Ce qu’elle sous-entend.

Sinon, il y a d’autres débouchés comme des struc­tures appar­tenant à Pierre-Édouard Stérin, L’ILDJ s’est lancé grâce à « La Nuit du Bien Com­mun » dont l’entrepreneur est à l’origine. Le mil­liar­daire en assur­erait la pro­mo­tion. Son objec­tif, main­tenant con­nu de tous ? « Aider la droite de la droite à gag­n­er la bataille cul­turelle et médi­a­tique mais aus­si et surtout les élec­tions ». Cha­cun le sait depuis les révéla­tions de L’Humanité et de La Let­tre. Autrement dit, Le Monde est comme un enfant à l’école : obligé de partager son jou­et (la lib­erté de la presse), il pleure. L’enquêtrice rap­pelle qu’il s’agit du « pro­jet Péri­clès » qui serait mené par un ancien mem­bre et par le directeur de l’ILDJ. Après véri­fi­ca­tion, l’information est fausse mais Le Monde préfère se fier à l’Humanité. À ce moment de l’enquête, les « infor­ma­tions » devi­en­nent con­fus­es, mêlant ce qui con­cerne l’ILDJ, Péri­clès etc.

L’ILDJ obtient-elle des résultats ?

Sur les 123 étu­di­ants retrou­vés, 45 % tra­vailleraient dans le jour­nal­isme. Pas de mise en per­spec­tive par rap­port aux autres écoles, ce qui affin­erait pour­tant la réflex­ion au sujet des deux années de for­ma­tion ver­sus dix mois d’initiation. Ils sont dans « des rédac­tions classées à droite du spec­tre médi­a­tique » (par qui ?). Quant aux autres, ce sont des com­mu­ni­cants, des pro­fesseurs, des consultants.

Mais, car il y a un mais… « Beau­coup de ces jour­nal­istes sont ensuite passés par une autre école de jour­nal­isme, au prix par­fois d’un petit coup d’effaceur ». La moitié des anciens étu­di­ants de l’ILDJ ne men­tionne ain­si pas son pas­sage dans l’école.

C’est la con­clu­sion de l’enquête.

Elle se veut « choc », cette con­clu­sion. Elle est surtout très mal­hon­nête. Si l’ILDJ ouvre les portes de plus en plus de médias (sinon Le Monde ne s’intéresserait pas à cette école), les jour­nal­istes auteurs de cette enquête savent par­faite­ment les con­séquences qu’il y aurait à sig­naler être passé par l’ILDJ avant d’intégrer une autre école de jour­nal­isme (rejet par les autres étu­di­ants, mépris poli­tique des pro­fesseurs) ou à le sig­naler sur son CV, ce qui reviendrait à voir la porte de médias, majori­taire­ment libéraux lib­er­taires et ancrés à gauche, théorique­ment human­istes et ouverts, se fer­mer. Le Monde préfère ne pas inter­roger cet état de fait qui s’apparente pour­tant à de la cen­sure avérée.

À quoi sert une telle enquête ? À rien aurait-on envie d’écrire. Ce n’est pas si cer­tain. Qui sait si demain la lib­erté d’expression et de la presse ne sera pas de nou­veau réduite, à rebours de la petite embel­lie actuelle ? N’est-ce pas une façon de dire nous avons vos fich­es comme autre­fois, nous avons les moyens de vous sur­veiller. Et de vous punir ?