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Vivendi : les contours de la scission révélés

6 novembre 2024

Temps de lecture : 4 minutes
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Vivendi : les contours de la scission révélés

Temps de lecture : 4 minutes

Le conseil de surveillance de Vivendi approuvait, le 28 octobre, le projet de scission découpant le groupe en quatre entités : Havas, Canal+, Louis Hachette et Vivendi. Un projet appuyé sur une opération complexe.

C’était le 28 octo­bre 2024 : le con­seil de sur­veil­lance de Viven­di a approu­vé le pro­jet de scis­sion visant à découper le groupe en qua­tre sociétés cotées. Une opéra­tion à laque­lle on pou­vait s’attendre, puisque l’étude du pro­jet de scis­sion avait été annon­cée le 13 décem­bre 2023 et validée fin jan­vi­er 2024. Le groupe sera donc divisé en qua­tre entités, répar­ties dans trois places bour­sières choisies par Viven­di : ain­si, Havas sera instal­lé à Ams­ter­dam quand Canal+ sera instal­lé à Lon­dres ; Louis Hachette group (Lagardère SA et Pris­ma Média) et Viven­di (coté sur le marché régle­men­té d’Euronext Paris) res­teront quant à eux à Paris. La pre­mière cota­tion des actions des trois sociétés devrait inter­venir à par­tir du 16 décem­bre prochain, en cas d’approbation com­plète de la scission.

Voir aus­si : Canal+ à l’offensive en Asie

L’objectif du découpage

Si l’on en croit Le Figaro, c’est parce qu’il trou­verait le groupe Viven­di sous-val­orisé en Bourse que Vin­cent Bol­loré aurait décidé de procéder à son éclate­ment. « Si tous les act­ifs de Viven­di étaient cor­recte­ment val­orisés, ils pour­raient val­oir 14 mil­liards », indi­quait dans ce sens une note de la banque UBS. Une telle opéra­tion pour­rait donc per­me­t­tre au groupe Bol­loré, qui détient 31,5 % d’Havas, de Canal+ et Louis Hachette Group et 29,9 % de Viven­di, de détenir une valeur des par­tic­i­pa­tions de plus de 4 mil­liards. Selon cette même source, c’est afin « d’assurer à la dynas­tie famil­iale un avenir fructueux » que l’homme d’affaires aurait souhaité men­er une telle opéra­tion. Pour l’heure, deux des qua­tre enfants de Vin­cent Bol­loré occu­pent effec­tive­ment des fonc­tions opéra­tionnelles dans le groupe. Enfin, cette opéra­tion devrait per­me­t­tre, selon le groupe, de béné­fici­er d’une plus grande vis­i­bil­ité à Londres.

Voir aus­si : Viven­di, les ambi­tions de Yan­nick Bolloré

Un « contournement des règles financières françaises » ?

Pour les détracteurs les plus assidus de Vin­cent Bol­loré, l’opération sup­posé­ment orchestrée par le seul Vin­cent Bol­loré aurait pour objec­tif de con­tourn­er les règles finan­cières français­es. Déplo­rant que les « action­naires appelés à vot­er le 9 décem­bre don­neront [prob­a­ble­ment] leur feu vert » à l’opération, Le Monde souligne que l’expatriation de deux des qua­tre sociétés per­me­t­tra à Bol­loré d’éviter de lancer une offre publique d’achat (OPA) « comme l’impose la régle­men­ta­tion bour­sière française quand le seuil de 30 % est franchi ». Ain­si, pour le groupe Canal+, réfugié à Lon­dres, il n’y aura pas d’OPA oblig­a­toire puisque les sociétés non bri­tan­niques n’ont pas à s’y soumet­tre. À l’inverse, la société Louis Hachette, dont les actions devraient être négo­ciées par Euronext Growth à Paris, l’OPA n’est oblig­a­toire qu’à par­tir de 50 % de déten­tion du cap­i­tal – et Bol­loré n’en détient que 31,5 %.

Les griefs des détracteurs de Vivendi

Le Monde, qui sem­ble soudain devenu sou­verain­iste, déplore que l’expatriation « pose ques­tion ». « Est-il oppor­tun qu’une entre­prise de com­mu­ni­ca­tion et de con­seil ayant accès à l’intimité des fleu­rons français prenne un passe­port étranger ? » s’interroge son jour­nal­iste. Un jour­nal­iste qui appelle peu ou prou le fics à inter­venir. « Quand l’optimisation fis­cale va trop loin, le Tré­sor pub­lic sait sif­fler la fin de la récréa­tion […] Peut-il y avoir fraude ? », sem­ble espér­er la jour­nal­iste Isabelle Chap­er­on, passée autre­fois par Le Figaro et Les Échos.

D’autres griefs sont for­mulés à l’encontre de l’homme d’affaires bre­ton. Ain­si, les action­naires minori­taires regret­tent l’installation de cer­taines sociétés à l’étranger qui entraîneront une affil­i­a­tion au droit du pays con­cerné ; le sys­tème de droits de vote mul­ti­ples découlant de la cota­tion à l’étranger (par exem­ple, pour la société Havas délo­cal­isée à Ams­ter­dam, dépen­dant du droit néer­landais) pour­rait per­me­t­tre au groupe Bol­loré de détenir plus de 40 % des droits de vote. Le ges­tion­naire indépen­dant CIAM, représen­tant d’1% des action­naires minori­taires, a ain­si saisi l’Autorité des Marchés financiers de manière à « obtenir le respect du droit des action­naires et le lance­ment préal­able d’une offre pub­lic­i­taire sur Viven­di ».  

Vin­cent Bol­loré est un homme d’affaires : l’opération com­plexe menée en ce sens vise à accroître son groupe. Une vel­léité a pri­ori insup­port­able à cer­tains com­men­ta­teurs : pour des jour­naux comme Le Monde, détenu par des mil­liar­daires (dont Xavier Niel) sou­vent proches de cer­tains milieux poli­tiques (en l’occurrence, Emmanuel Macron), le groupe Bol­loré devrait se mon­tr­er d’une impar­tial­ité irréprochable. « La vérité, écrit encore la plume du Monde à pro­pos de Vin­cent Bol­loré, c’est que beau­coup d’investisseurs craig­nent le puis­sant mil­liar­daire, dont l’influence aug­mente à mesure qu’il trans­forme son empire des médias, de l’édition et de com­mu­ni­ca­tion en une machine de guerre idéologique ». On trem­ble.

Voir aus­si : le groupe Bol­loré, infographie

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