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Bardella sur le grill de France 2

22 novembre 2024

Temps de lecture : 4 minutes
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Bardella sur le grill de France 2

Temps de lecture : 4 minutes

Quand un policier interroge un peu rudement un délinquant, on dit qu’il le « cuisine ». C’est ce qui est arrivé à Jordan Bardella quand il s’est rendu sur le plateau de France 2 pour parler de son livre Ce que je cherche, le 9 novembre 2024.

Objectif, le coincer entre Trump et Poutine

Durant près d’une heure, Jor­dan Bardel­la, sous pres­sion con­stante, a don­né des gages de sa bien-pen­sance espérée. Harcelé d’abord par Léa Salamé, puis par Christophe Decha­vanne et enfin par les autres chroniqueurs, Bardel­la a don­né des preuves du change­ment opéré par le RN depuis une quin­zaine d’années. Au bout de deux min­utes, Léa Salamé inter­roge son invité sur l’élection de Trump afin de savoir s’il s’agit d’une bonne ou d’une mau­vaise nou­velle pour la France. Aculé dans les cordes, Bardel­la cherche à s’extirper de ce mau­vais pas en soulig­nant l’aspect très améri­cain de Don­ald Trump pour finir sur la néces­sité d’avoir un dirigeant patri­ote pour un pays.

Deux­ième sujet sur lequel Bardel­la est som­mé de se posi­tion­ner : l’Ukraine. Ici le jeune homme de 29 ans est plus clair. Il note qu’« il faut met­tre Pou­tine en échec », et appuie le fait que « l’objectif doit être la paix ». Si Bardel­la essaie de nuancer son pro­pos, évo­quant une « guerre com­plexe », Thomas Sné­garoff est bien là pour lui rap­pel­er que cette guerre est sim­ple selon le point de vue améri­cain ver­sion Joe Biden : il faut détru­ire Poutine.

Dernier petit taquet, lorsque Gas­pard G, un vidéaste, demande à Bardel­la ce qui le dérange chez Trump. L’un des chroniqueurs cite « le cli­mat », une perche que le prési­dent du Rassem­ble­ment nation­al s’empresse de saisir, soulig­nant que cette posi­tion est pro­pre aux améri­cains. Dans cette séquence on sent Bardel­la pris au piège entre une cer­taine sym­pa­thie pour Trump et la néces­sité qu’il a fait sienne de paraître fréquentable. Au bout du compte, il appa­raît comme « trump­iste mais pas trop », une posi­tion déli­cate alors que les chroniqueurs cherchent à le mon­tr­er comme un trump­iste pur et dur.

Le Pen diabolisé et Léa Salamé dans le déni

Nous le con­sta­tons, Bardel­la est venu sur le plateau de Quelle époque ! afin de parachev­er (une fois de plus, mais ce ne sera jamais assez) la dédi­a­boli­sa­tion du RN. Rien de sur­prenant, alors, à le voir hon­nir Jean-Marie Le Pen. Le mot « out­rance » est le seul que Bardel­la a à la bouche pour qual­i­fi­er le fon­da­teur du Front Nation­al. Si on peut regret­ter cer­taines sor­ties médi­a­tiques du Men­hir, le réduire à cela et oubli­er son com­bat con­tre l’immigration, com­bat mené depuis 1972 et sans lequel Jor­dan Bardel­la ne pour­rait pas être prési­dent du RN, peut être con­sid­éré à tout le moins comme très réducteur.

Cepen­dant, toute la bonne volon­té du monde ne suf­fi­ra pas à ren­dre le RN fréquentable aux yeux du ser­vice pub­lic. Léa Salamé – com­pagne de Raphaël Glucks­mann – se veut formelle : sans rire, elle affirme que le RN a le même traite­ment médi­a­tique que tous les autres par­tis. Macron ou Attal seraient mis à la même enseigne que Jor­dan Bardel­la. Une affir­ma­tion naïve qui nie la pro­pa­gande mise en place, par exem­ple, lors de la nom­i­na­tion de Gabriel Attal à Matignon où son tal­ent poli­tique était encen­sé sur tous les plateaux de grand chemin.

Voir aus­si : Léa Salamé, portrait

Enfin un bel exem­ple de mal­hon­nêteté intel­lectuelle nous a été offert par Christophe Decha­vanne. Après un quart d’heure d’entretien, l’ancien présen­ta­teur de Ciel mon mar­di cite une déc­la­ra­tion de Bardel­la dans laque­lle il bro­carde la gauche qui appelle les flics des bar­bares car ils tuent la pop­u­la­tion. Decha­vanne, se croy­ant sans doute malin, l’interroge : « de quelle gauche par­lez-vous ? ». Bardel­la lui répond en citant LFI et Decha­vanne lui réplique que « LFI ce n’est pas la gauche. ». Nous avons été sur­pris de voir qu’en France, ce serait Christophe Decha­vanne qui décide ce qui est ou n’est pas la gauche ? Rap­pelons que le con­seil d’Etat a lui-même classé la France Insoumise à gauche de l’échiquier politique.

De cette heure d’entretien nous retenons finale­ment peu de choses. Comme sou­vent, Jor­dan Bardel­la a aligné les élé­ments de lan­gage face à un parterre de jour­nal­istes de grand chemin ayant pour seul but de le pouss­er à la faute. Si le prési­dent du RN s’en sort rel­a­tive­ment bien dans cet exer­ci­ce, peu de choses nous ren­seignent sur sa vision de la France, sans doute par manque de journalistes…

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