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Polémique : Jean-Michel Aphatie, une synthèse

16 décembre 2024

Temps de lecture : 5 minutes
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Polémique : Jean-Michel Aphatie, une synthèse

Temps de lecture : 5 minutes

Vous connaissez le mot de Michel Audiard : « J’en ai connu des faux-culs mais vous, vous êtes une synthèse. »

Eh bien, il devait trou­ver sa superla­tive illus­tra­tion en Jean-Michel Aphatie. Il s’est fendu d’une sail­lie à l’oc­ca­sion de la réou­ver­ture de Notre-Dame de Paris, offusqué par la présence d’Elon Musk à cette céré­monie. Le parterre illus­tre ne pou­vait souf­frir d’être souil­lé… Je le cite : « On avait déjà Don­ald Trump. En plus, nous avons Elon Musk. À quel titre, celui-ci ? Copain du précé­dent ? On dirait des cow­boys en ter­rain con­quis. Notre-Dame mérite mieux que ça et Emmanuel Macron aurait pu nous épargn­er cette humil­i­a­tion. » Dia­tribe ponc­tuée de son impériss­able et clow­nesque con­clu­sion : « Éton­nant, non ? »

Les gangsters de Paris ?

Une autre de ses pub­li­ca­tions, plus nette encore, une pho­to de Don­ald Trump et Elon Musk posant devant la tour Eif­fel, à laque­lle il ajoute ce commentaire :

« “Deux gang­sters à Paris” La prochaine série à suc­cès, disponible sur les plate-forme du monde entier. Éton­nant, non ? »

Il iro­nise, enfin, sur une pub­li­ca­tion de RFI : « Les États-Unis quit­teront l’Otan si les Alliés ne paient pas plus, lance Trump. » Voici la remar­que qu’il en tire :

« Le voy­age de Don­ald Trump à Paris porte immé­di­ate­ment ses fruits. Emmanuel Macron a bien fait de lui dérouler le tapis rouge. Une vraie réus­site. Éton­nant, non ? »

On peut se sen­tir souil­lé par la vis­ite de l’On­cle Sam mais on con­tin­ue à exiger qu’il nous pro­tège mil­i­taire­ment. Le beurre et l’ar­gent du beurre… made in USA ! Il y a de très bonnes raisons d’être anti-améri­cain, certes, notam­ment celles qui ont le mérite de la cohérence, et de réclamer une réelle indépen­dance à leur égard, plutôt que de jouer les vierges effarouchées pour une cérémonie.

Rasons le château de Versailles !

C’est le même qui voulait, en 2016, ras­er le château de Ver­sailles pour en finir avec la célébra­tion de la grandeur française… Et main­tenant il se soucie de l’hu­mil­i­a­tion de la France par deux amer­loques, qui, en dépit de ce qu’on en pense et tout juge­ment de valeur mis à part, risquent fort de mar­quer la grande His­toire. Quand Jean-Michel Aphatie se pique de défendre l’hon­neur de la France, cela me fait penser au bon mot de Léon Daudet :

« Il me fait l’ef­fet d’une limace sur un fruit. »

Des Pyrénées au conformisme parisien

Je suis le sieur Aphatie sur les réseaux et c’est une source inépuis­able de franche rigo­lade, sou­vent aus­si – il faut bien le dire – de con­ster­na­tion. Je dois admet­tre, cepen­dant, que son accent me plaît. Il nous rap­pelle que la France n’est pas Paris. Il est une fig­ure de la décen­tral­i­sa­tion mal­gré lui. Il m’évoque Pag­nol, le Gar­la­ban, les gabi­ans. D’un autre côté, y a‑t-il fig­ure plus emblé­ma­tique du parisian­isme dans le sérail jour­nal­is­tique aujour­d’hui ? Nous aurons l’oc­ca­sion de le vérifier.

Mariani au pilori

Dans l’émis­sion Quo­ti­di­en, sur la chaîne TMC, Jean-Michel Aphatie se livre à un exer­ci­ce : une présen­ta­tion des « fig­ures du jour. » Je repro­duis ici le por­trait en pied qu’il fait de Thier­ry Mar­i­ani, pour qu’on puisse bien s’im­prégn­er de l’hon­nêteté de notre journaliste :

« Thier­ry Mar­i­ani, on va le qual­i­fi­er sim­ple­ment : l’hor­ri­ble Thier­ry Mar­i­ani. Qui pen­dant des années nous a ven­du Pou­tine et Assad. Il a défendu Bachar el-Assad. Même dimanche, il a fait des tweets, regret­tant à sa manière, le départ de Bachar el-Assad. Hor­ri­ble Thier­ry Mar­i­ani, que le Rassem­ble­ment nation­al – je me demande où ils habitent ces gens-là – a désigné aujour­d’hui comme le can­di­dat du Rassem­ble­ment nation­al pour les élec­tions munic­i­pales à Paris. S’il y a un parisien qui vote pour Mar­i­ani, eh ben j’aimerais bien le ren­con­tr­er, tiens, celui-là. »

Aphatie est scan­dal­isé par le sou­tien de Mar­i­ani à Assad. Cela s’en­tend et peut se dis­cuter. Mais désavoue-t-il la cam­pagne de nor­mal­i­sa­tion des fac­tions islamistes qui ont pris le pou­voir en Syrie entre­pris entre autres par Libéra­tion, jour­nal auquel il col­lab­o­ra au début de sa car­rière ? Où sont passées les « armes de son méti­er : mise en per­spec­tive, dis­tance, sens cri­tique » ?

Le retour de Bel-Ami*

À ce mon­sieur qui n’est qu’un symp­tôme révéla­teur de cette superfine engeance, je voudrais adress­er des remer­ciements chaleureux. Il fal­lait accom­plir cette prouesse : rem­plac­er le bien par le crachat sys­té­ma­tique sur la patrie, le vrai par le trucage et la dés­in­for­ma­tion. Cela suf­fit ample­ment à la gloire d’une généra­tion. Bel-Ami s’est trou­vé des émules. Ils se sont démul­ti­pliés. Grâce à ce genre d’én­er­gumènes qui ont avili la chose écrite aus­si bien que la chose par­lée, c’est presque devenu une honte de tenir une plume.

Jean Mon­talte

Note

*Bel-Ami, roman de Guy de Mau­pas­sant, retrace l’ascension de Georges Duroy, arriv­iste sans scrupules, nav­iguant entre maîtress­es, finances, presse et poli­tique. Le livre a été porté de nom­breuses fois à l’écran, le plus récem­ment en 2012 avec le bri­tan­nique Robert Pat­tin­son dans le rôle de Duroy (ndlr).

Voir aus­si : Jean-Michel Aphatie, portrait

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