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Jean-Marie Le Pen : les journalistes aboient, le Menhir passe

13 janvier 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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Jean-Marie Le Pen : les journalistes aboient, le Menhir passe

Temps de lecture : 5 minutes

Avec la mort de Jean-Marie Le Pen se révèle une facette assez peu glorieuse de certains médias.

Celui qui les a tenus en échec disparu, ils déversent tout leur fiel sur un homme qui ne peut plus se défendre, et qui au reste ne le pouvait plus depuis de nombreuses années.

Konbini danse sur les tombes

Sur Tik­Tok, Kon­bi­ni annonce sobre­ment la mort de Jean-Marie Le Pen. Une pho­to en noir et blanc, où il est au reste à son avan­tage, un texte explicite : « Jean-Marie Le Pen est mort à l’âge de 96 ans ». Un sans-faute ? Met­tez le son. Pen­dant que vous lisez son image, Kon­bi­ni dif­fuse « Beau­ti­ful Day », d’Akon :

« Dieu, mer­ci pour le soleil, mer­ci pour la pluie. Mer­ci pour la joie, mer­ci pour la douleur. C’est une belle journée, yeah-ay-ay-ay. »

On quitte les hau­teurs de la poli­tique pour le bac à sable de l’école maternelle.

L’Humanité et Libération soignent leur Une

L’Humanité fait de l’événement sa Une : on y trou­ve le poignard de Jean-Marie Le Pen sur­plom­bant le titre « la haine était son méti­er ». Une Une « à la hau­teur de l’Histoire » pour Nas­sira El Moad­dem, jour­nal­iste qui avait traité la France de pays de racistes. Elle dif­fusera ensuite deux Unes l’une à côté de l’autre : Le Parisien et Valeurs actuelles. Ils se trou­vent qu’elles ont choisi le même titre : « c’était le Pen » avec des points de sus­pen­sion pour Le Parisien. De quoi per­me­t­tre à Nas­sira El Moad­dem d’associer les deux titres, et à Chris­t­ian Dau­ri­ac d’abonder en son sens. De son côté, Libéra­tion titre « Maréchal, le voilà », insin­u­ant ain­si que Jean-Marie Le Pen va rejoin­dre Pétain. A Paris Match en revanche, on titre « Jean-Marie Le Pen, une his­toire française », ce qui per­me­t­tra à cer­tains de crier à la nor­mal­i­sa­tion de l’extrême-droite et au bour­rage de crâne. Bour­rage de crâne tout à fait inex­is­tant à l’inverse dans la Une de L’Huma.

Voir aus­si : Nas­sira El Moad­dem, sym­bole des jour­nal­istes haïs­sant les Français

À France Info, un contre-hommage

France Info a égale­ment fait son tra­vail, avec une liste des « nom­breuses con­damna­tions » de Jean-Marie Le Pen pub­liée le 8 jan­vi­er à 6 heures du matin. L’article com­mence par citer les pro­pos sur les cham­bres à gaz. On apprend ensuite qu’en 1964, Jean-Marie Le Pen frôle en voiture le député de la 3e cir­con­scrip­tion de la Seine. Cet écart de con­duite lui vau­dra un doigt d’honneur, et comme il serait mal­hon­nête de faire pass­er Jean-Marie Le Pen pour quelqu’un de calme, le tout dégénère en bataille de rue. Jean-Marie Le Pen édit­era par la suite un disque de chants nazis et sera accusé d’antisémitisme pour avoir fustigé cer­tains jour­nal­istes. Il aura son lot de « provo­ca­tion à la haine » et con­sort. La liste de France info con­fine à l’ennui et on en vient à se deman­der si Jean-Marie Le Pen choi­sis­sait ses mots pour avoir des procès ou si les juges le pour­suiv­aient pour un rien.

Le directeur de France 3 verse dans l’insulte

Hasard du cal­en­dri­er, Jean-Marie Le Pen est mort le jour des dix ans de l’attentat de Char­lie Heb­do. Donc dix ans après un atten­tat con­tre la lib­erté d’expression. Quand on sait l’importance que le « Men­hir » accor­dait à cette lib­erté, la coïn­ci­dence tient presque de l’hommage. Elle n’est cepen­dant guère goûtée par cer­tains jour­nal­istes français, notam­ment Chris­t­ian Dau­ri­ac, directeur de la rédac­tion de France 3. Après avoir posté sur X « Quel sale type… il aurait pu choisir un autre jour pour cla­quer ! #JeSu­is­Tou­joursChar­lie », il se met en devoir de partager tout ce qui ressem­ble de près ou de loin à une insulte à Jean-Marie Le Pen.

RIP, mais seulement si vous êtes de gauche

On s’étonne. Ne doit-on pas en général un peu de respect à un mort ? La gauche n’a pas l’habitude d’écouter sen­ten­cieuse­ment ceux qui pointent les dél­its de ceux qui meurent dans des pour­suites suite à des refus d’obtempérer. Dans ces moments, il faut respecter la douleur des familles et la dig­nité de ceux qui ne méri­taient pas de mourir. La logique ne sem­ble pas s’appliquer à Jean-Marie Le Pen. Edwy Plenel dénonce ain­si des « hom­mages de la honte, tri­om­phe de la lep­éni­sa­tion des esprits. Un flot de com­men­taires fal­lac­i­eux, silen­ciant son anti­sémitisme, son racisme et la tor­ture pra­tiquée en Algérie. Une perte de sens totale, jusqu’au plus haut niveau de l’État. » Off Inves­ti­ga­tion abonde dans ce sens dans son arti­cle qui décrypte le com­mu­niqué de l’Elysée où « Macron tombe le masque ». En effet, il « escamote les aspects con­tro­ver­sés de la per­son­nal­ité du fon­da­teur du Front National ».

De façon générale, pour les médias de  la gauche libérale lib­er­taire, le temps d’hommage à Jean-Marie Le Pen a été pour le moins dif­fi­cile à vivre. De François Bay­rou à Éric Ciot­ti, les poli­tiques du cen­tre à la droite se sont ren­dus coupables de ne pas cracher sur une tombe pas encore refer­mée. Libéra­tion rap­porte ain­si les mots d’Éric Ciot­ti, « qui a trahi l’héritage gaulliste de son ancien camp ». Vu le mal que Libéra­tion s’est don­né pour défendre feu l’URSS et François Mit­ter­rand, on ne se serait pas atten­du à ce qu’il défende le gaullisme.

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