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HelloQuitteX : ces médias qui aiment la censure

29 janvier 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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HelloQuitteX : ces médias qui aiment la censure

Temps de lecture : 5 minutes

Connaissez-vous HelloQuitteX ? Non, pas le chaton blanc floqué sur le cartable de votre fille. HelloQuitteX est une application développée par le CNRS pour, comme son nom l’indique, quitter le réseau social X (ex-Twitter) sans douleur. Une opération acclamée par les médias du monde libéral libertaire, qui n’iront pas creuser plus loin l’usage des fonds publics.

Comment les médias refont l’histoire d’HelloQuitteX

« Un col­lec­tif de bénév­oles français engagés con­tre la dés­in­for­ma­tion. » C’est ain­si que BFMTV, ain­si que d’autres médias comme Le Petit Jour­nal, présen­tent le groupe à l’origine de la plate­forme Hel­loQui­t­teX. L’article de BFMTV pré­cise ensuite que le col­lec­tif « est com­posé d’une trentaine de per­son­nes de dif­férentes asso­ci­a­tions et organ­i­sa­tions, qua­si­ment toutes bénév­oles, dont une petite équipe de développeurs coor­don­née par le CNRS. » C’est juste­ment là que le bât blesse. Le CNRS est large­ment impliqué dans ce nou­v­el out­il, et il est légitime de s’en offus­quer. Il se trou­ve que le CNRS est un organ­isme pub­lic, et dès lors financé par les impôts des Français. Or, nom­bre d’entre eux, non seule­ment ne prévoient pas de quit­ter X, mais en plus se trou­vent fort bien qu’il ait été racheté par Elon Musk. Cer­tains ont même été ban­nis, avant ce rachat, pour des raisons par­fois ban­cales. Alors, com­ment les mem­bres du CNRS peu­vent-ils dévelop­per sur leur temps de tra­vail une appli­ca­tion dédiée à com­bat­tre une plate­forme qui cor­re­spond aux besoins d’une grande par­tie des Français, ce pour des raisons pure­ment politiques ?

Censure et médias, le grand paradoxe

Les médias se sont bat­tus pen­dant des siè­cles pour la lib­erté d’expression, mais s’en sont apparem­ment lassés. Le Figaro annonce ain­si que « face aux accu­sa­tions de propager de fauss­es infor­ma­tions et de ne pas allouer suff­isam­ment de moyens pour mod­ér­er les échanges, Elon Musk défend une vision rad­i­cale de la lib­erté d’ex­pres­sion et rejette toute forme de cen­sure. » Il alerte même sur le risque que cette vision se propage, puisque les récentes pris­es de posi­tion de Mark Zucker­berg font « crain­dre un recul pour la lutte con­tre les dis­cours de haine ou de har­cèle­ment des minorités. » Autrement dit, en France, cer­tains médias sont pour la lib­erté d’expression, mais seule­ment sous cer­taines con­di­tions. Bref, ils sont contre.

Un exode. Que dis-je un exode ? C’est une révolution !

Un cer­tain nom­bre de médias par­lent d’exode de X, de départ mas­sif, et ten­tent de compter le nom­bre d’utilisateurs ayant quit­té la plate­forme. Or, il est naturelle­ment meilleur d’imaginer une véri­ta­ble saignée plutôt qu’une opéra­tion cir­con­scrite à quelques aya­tol­lahs peu ouverts à la dis­cus­sion. Les arti­cles attireront égale­ment l’attention sur les médias qui choi­sis­sent de quit­ter la plate­forme, ain­si que sur les comptes insti­tu­tion­nels, notam­ment ceux de cer­taines villes ou régions. Le compte de la ville de Paris est du lot. En revanche, rares sont les médias qui noteront le point com­mun entre tous ces comptes, à savoir être de gauche.

Il ne s’agit pas de lutte contre la désinformation, mais contre la droite

Ne nous y trompons pas, le com­bat de Hel­loQui­t­teX est poli­tique. Invité sur BFMTV, David Chavalar­ias, math­é­mati­cien et directeur de recherche au CNRS, évo­quera Bluesky et Mastodon comme alter­na­tives à X, vers lesquelles Hel­loQui­t­teX aide à migr­er. Sur Hel­loQui­t­teX, ces deux réseaux sont d’ailleurs jugés « plus respectueux de la vie privée ». Il se trou­ve que ces plate­formes sont actuelle­ment priv­ilégiées par la gauche. On a dès lors bien du mal à faire la dis­tinc­tion entre la lutte con­tre la dés­in­for­ma­tion et la pro­mo­tion de plate­formes poli­tique­ment plus cor­rectes. L’examen des co-fon­da­teurs d’HelloQuitteX peut apporter un début de réponse. Aux côtés du CNRS, on y trou­ve la Ligue des Droits de l’homme, la Quad­ra­ture du Net, le SNJ-CGT, Noth­ing 2 Hide, On est prêt et Au Poste. Si on ne présente pas la LDH, il peut être utile de savoir que la Quad­ra­ture du Net a reçu plusieurs cen­taines de mil­liers de dol­lars de l’Open Soci­ety Foun­da­tion, la fon­da­tion de George Soros, qui n’est pas con­nue pour favoris­er les dis­cours conservateurs.

X, le réseau social dictatorial

Lorsqu’Elon Musk rachète Twit­ter en avril 2022, l’objectif affiché est d’y restau­r­er la lib­erté d’expression. À en croire les médias français, l’opération est plutôt un échec. France 3 régions explique que « les 550 mil­lions d’abonnés sont soumis au bon vouloir d’Elon Musk. » Une affir­ma­tion qui oublie un peu vite que les pub­li­ca­tions du mil­liar­daire se voient par­fois infliger une Note de com­mu­nauté, ce sys­tème qui donne aux con­tenus un con­texte jugé man­quant par les utilisateurs.

BFMTV nour­rit égale­ment l’idée que le réseau X soit devenu, non pas l’ennemi pub­lic numéro 1, mais plutôt le lieu où il se cache. David Chavalar­ias, math­é­mati­cien du CNRS et respon­s­able du pro­jet Hel­loQui­t­teX, est ain­si invité en plateau pour par­ler de son pro­jet. Selon lui, il s’agit de faire « de la sen­si­bil­i­sa­tion sur les dan­gers d’un réseau tel que X », qui aurait notam­ment influ­encé les élec­tions améri­caines. La Croix n’est pas en reste, et explique que « face à l’absence de mod­éra­tion sur la plate­forme », Le Monde et Libéra­tion quit­tent X. L’explication a de quoi sur­pren­dre. La Croix craint égale­ment que cet exode ne « risque de priv­er [les] usagers d’une infor­ma­tion fiable. Sur Libé.

Des médias quit­tent un espace à cause d’un excès de lib­erté d’expression : rap­pelons que  « Sans lib­erté de blâmer, il n’est pas d’éloge flat­teur », et sans risque d’erreur, il n’est pas d’intérêt journalistique.

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