Connaissez-vous HelloQuitteX ? Non, pas le chaton blanc floqué sur le cartable de votre fille. HelloQuitteX est une application développée par le CNRS pour, comme son nom l’indique, quitter le réseau social X (ex-Twitter) sans douleur. Une opération acclamée par les médias du monde libéral libertaire, qui n’iront pas creuser plus loin l’usage des fonds publics.
Comment les médias refont l’histoire d’HelloQuitteX
« Un collectif de bénévoles français engagés contre la désinformation. » C’est ainsi que BFMTV, ainsi que d’autres médias comme Le Petit Journal, présentent le groupe à l’origine de la plateforme HelloQuitteX. L’article de BFMTV précise ensuite que le collectif « est composé d’une trentaine de personnes de différentes associations et organisations, quasiment toutes bénévoles, dont une petite équipe de développeurs coordonnée par le CNRS. » C’est justement là que le bât blesse. Le CNRS est largement impliqué dans ce nouvel outil, et il est légitime de s’en offusquer. Il se trouve que le CNRS est un organisme public, et dès lors financé par les impôts des Français. Or, nombre d’entre eux, non seulement ne prévoient pas de quitter X, mais en plus se trouvent fort bien qu’il ait été racheté par Elon Musk. Certains ont même été bannis, avant ce rachat, pour des raisons parfois bancales. Alors, comment les membres du CNRS peuvent-ils développer sur leur temps de travail une application dédiée à combattre une plateforme qui correspond aux besoins d’une grande partie des Français, ce pour des raisons purement politiques ?
Censure et médias, le grand paradoxe
Les médias se sont battus pendant des siècles pour la liberté d’expression, mais s’en sont apparemment lassés. Le Figaro annonce ainsi que « face aux accusations de propager de fausses informations et de ne pas allouer suffisamment de moyens pour modérer les échanges, Elon Musk défend une vision radicale de la liberté d’expression et rejette toute forme de censure. » Il alerte même sur le risque que cette vision se propage, puisque les récentes prises de position de Mark Zuckerberg font « craindre un recul pour la lutte contre les discours de haine ou de harcèlement des minorités. » Autrement dit, en France, certains médias sont pour la liberté d’expression, mais seulement sous certaines conditions. Bref, ils sont contre.
Un exode. Que dis-je un exode ? C’est une révolution !
Un certain nombre de médias parlent d’exode de X, de départ massif, et tentent de compter le nombre d’utilisateurs ayant quitté la plateforme. Or, il est naturellement meilleur d’imaginer une véritable saignée plutôt qu’une opération circonscrite à quelques ayatollahs peu ouverts à la discussion. Les articles attireront également l’attention sur les médias qui choisissent de quitter la plateforme, ainsi que sur les comptes institutionnels, notamment ceux de certaines villes ou régions. Le compte de la ville de Paris est du lot. En revanche, rares sont les médias qui noteront le point commun entre tous ces comptes, à savoir être de gauche.
Il ne s’agit pas de lutte contre la désinformation, mais contre la droite
Ne nous y trompons pas, le combat de HelloQuitteX est politique. Invité sur BFMTV, David Chavalarias, mathématicien et directeur de recherche au CNRS, évoquera Bluesky et Mastodon comme alternatives à X, vers lesquelles HelloQuitteX aide à migrer. Sur HelloQuitteX, ces deux réseaux sont d’ailleurs jugés « plus respectueux de la vie privée ». Il se trouve que ces plateformes sont actuellement privilégiées par la gauche. On a dès lors bien du mal à faire la distinction entre la lutte contre la désinformation et la promotion de plateformes politiquement plus correctes. L’examen des co-fondateurs d’HelloQuitteX peut apporter un début de réponse. Aux côtés du CNRS, on y trouve la Ligue des Droits de l’homme, la Quadrature du Net, le SNJ-CGT, Nothing 2 Hide, On est prêt et Au Poste. Si on ne présente pas la LDH, il peut être utile de savoir que la Quadrature du Net a reçu plusieurs centaines de milliers de dollars de l’Open Society Foundation, la fondation de George Soros, qui n’est pas connue pour favoriser les discours conservateurs.
Lorsqu’Elon Musk rachète Twitter en avril 2022, l’objectif affiché est d’y restaurer la liberté d’expression. À en croire les médias français, l’opération est plutôt un échec. France 3 régions explique que « les 550 millions d’abonnés sont soumis au bon vouloir d’Elon Musk. » Une affirmation qui oublie un peu vite que les publications du milliardaire se voient parfois infliger une Note de communauté, ce système qui donne aux contenus un contexte jugé manquant par les utilisateurs.
BFMTV nourrit également l’idée que le réseau X soit devenu, non pas l’ennemi public numéro 1, mais plutôt le lieu où il se cache. David Chavalarias, mathématicien du CNRS et responsable du projet HelloQuitteX, est ainsi invité en plateau pour parler de son projet. Selon lui, il s’agit de faire « de la sensibilisation sur les dangers d’un réseau tel que X », qui aurait notamment influencé les élections américaines. La Croix n’est pas en reste, et explique que « face à l’absence de modération sur la plateforme », Le Monde et Libération quittent X. L’explication a de quoi surprendre. La Croix craint également que cet exode ne « risque de priver [les] usagers d’une information fiable. Sur Libé.
Des médias quittent un espace à cause d’un excès de liberté d’expression : rappelons que « Sans liberté de blâmer, il n’est pas d’éloge flatteur », et sans risque d’erreur, il n’est pas d’intérêt journalistique.