L’ami du Bondy blog
Né en avril 1958, Daniel Schneidermann est un journaliste spécialisé dans la critique média et l’analyse des images télévisuelles. Il est le fondateur du site @rrêt sur images, qui fut autrefois une émission télévisée diffusée sur La Cinquième. Il est un des soutiens du Bondy Blog, entreprise visant à la promotion des “racisés” donc ipso facto à l’exclusion des autres.
Est-il possible de faire la critique d’un critique ? Assurément, oui. Analyses pertinentes, enquêtes et scoops dans sa panoplie, Daniel Schneidermann s’est érigé depuis plusieurs années en poil à gratter des médias. Avec son site @rrêt sur images et ses chroniques régulières, il décortique chaque semaine les mécaniques et les coulisses de ceux qui sont censés nous informer objectivement. Mais malgré ses nombreuses qualités et son travail souvent pertinent, Schneidermann n’échappe pas, lui non plus, à la critique. Ainsi va le jeu médiatique.
Portrait vidéo
Formation
Daniel Schneidermann est issu du Centre de formation des journalistes (Paris).
Parcours militant
À 17 ans, il milite durant quelques mois à l’Union des étudiants communistes. Une tendance adolescente pour le communisme partagée, semble-t-il, par beaucoup de ses confrères journalistes, du moins ceux de cette génération.
Cependant, ses partis pris (notamment pour l’immigration, usage de l’écriture inclusive de temps à autre, défense de mouvements ou de militants d’extrême-gauche…) et ses publications (Libé, le Nouvel Obs) l’engagent à gauche.
Le 6 mai 2018 il se fend même d’une chronique dans Libération où il défend le « cortège de tête », c’est-à-dire les casseurs du 1er mai qui ont saccagé plusieurs commerces sur le boulevard de l’Hôpital à Paris : « Le cortège de tête ne va pas saccager le McDo, mais par sa masse même, il autorise le saccage. Le cortège de tête ne soutient pas, mais ne condamne pas ». « Comme on disait il y a cinquante ans à propos d’autre chose, nous sommes tous le cortège de tête ».
Presse écrite
Schneidermann commence par piger pour Le Monde en parallèle de ses études de droit à partir de 1979. Il conserve ce statut jusqu’en 1983, année où il est nommé grand reporter aux « informations générales ». Il se fait alors journaliste de terrain et multiplie les reportages, notamment dans la chronique judiciaire.
À partir de 1992, il se met à la critique média en présentant, d’abord quotidiennement puis une fois par semaine, des chroniques consacrées à la télévision. Dans ses chroniques, il met en évidence les moyens télévisuels pour orienter et manipuler le téléspectateur, s’inscrivant ainsi dans une lignée héritée de François Mauriac et autre Morvan Lebesque.
En 2003, il critique ouvertement sa direction dans son livre Le Cauchemar médiatique. Suite au livre de Pierre Péan, La Face cachée du Monde, Schneidermann estime que la réaction de son quotidien est mauvaise et que ce dernier n’a pas répondu aux arguments avancés par le journaliste. Dès octobre, il est licencié pour cet affront. Le comportement du journaliste est jugé « attentatoire à l’entreprise pour laquelle il travaille », une « cause réelle et sérieuse » pour sa direction. Il poursuivra celle-ci aux prud’hommes et gagnera son procès en mai 2005, confirmé en appel en mars 2007.
Évincé du Monde, il se dirige alors vers Libération, où il poursuit ses chroniques sur les médias tous les lundis depuis 2003. Contrairement à sa chronique au Monde, consacrée uniquement à la télévision, Schneidermann extrapole à tous les médias ce qu’il faisait dans Le Monde pour la télé. Il s’agit ainsi « d’une chronique sur tous les médias, pas uniquement audiovisuels ».
Arrêt sur images
Entraîné par le succès de ses chroniques dans la presse écrite, Schneidermann crée en 1995 une émission de critique médias sur La Cinquième. « Arrêt sur images » est né. Producteur et animateur, il présente son émission en compagnie de Pascale Clark la première année. « Arrêt sur images » a pour but « de décrypter l’image et le discours télévisuels et, avec l’aide de divers chroniqueurs et journalistes, d’analyser les dérives et les succès du récit médiatique ».
L’émission pousse la critique média jusqu’à se critiquer elle-même : chaque mois, une journaliste chargée de suivre les débats sur le forum de l’émission, la « forumancière », fait part à Daniel Schneidermann des critiques sur sa propre émission, soumises par les internautes.
Mais peut-on réellement faire une critique sérieuse de la télévision… à la télévision ? Pour Pierre Bourdieu, la réponse était non. Invité le 20 janvier 1996 dans l’émission de Schneidermann, il signait une tribune dans Le Monde Diplomatique intitulée « Analyse d’un passage à l’antenne », quelques mois plus tard, dans laquelle il estimait que l’émission avait illustré ce qu’il avait lui-même l’intention de démontrer : « l’impossibilité de tenir à la télévision un discours cohérent et critique sur la télévision ».
Schneidermann répondra dans le même Monde Diplomatique, se défendant en prêtant à Pierre Bourdieu la volonté de tout contrôler et de ne pas être contredit. Cette querelle sera, en partie, le sujet du documentaire d’un partisan de Bourdieu, Pierre Carles, « Enfin pris ? » en 2002. Lors de ce documentaire, on apprendra notamment que l’émission de Schneidermann n’est pas si critique que cela à l’égard de certains sujets ou personnalités. Par exemple, on peut y suivre un « off » face à Jean-Marie Messier où Schneidermann, alors qu’il l’interroge sur les chiffres liés à la fusion Vivendi-Seagram, le rassure : « Ne vous inquiétez pas on ne va pas vous parler de ça pendant l’émission, on va parler de choses bien plus futiles. »
En 2005 avec Riff Productions, il licencie une des pigistes d’Arrêts sur Images, Perline, car elle fait partie – hors de son métier – de l’association Réseau Voltaire et ne le lui a pas dit. Elle conteste son licenciement et gagne aux prud’hommes en 2007 puis en appel. La Cour a notamment estimé que « un journaliste dans l’exercice de ses fonctions n’est pas un personnage public tenu de s’expliquer sur ses engagements personnels ».
Son émission provoque cependant de nombreuses tensions au sein du petit monde médiatique. Avec Pierre Carles, mais aussi avec France 2, après qu’il ait critiqué le système « bidon » de certains duplex, avec TF1 après qu’il ait invité un ancien correspondant de la chaîne, Alain Chaillou, pour parler de la fermeture de plusieurs bureaux à l’étranger et du faible intérêt de celle-ci pour l’actualité internationale, et avec Patrick de Carolis après que Schneidermann ait rappelé sur son blog que son nouveau patron a présenté dans l’émission « Des racines et des ailes » un reportage falsifié sur les CRS.
Suite à cela, Carolis prendra la décision de supprimer les rediffusions avant, en 2007, de décider d’un arrêt « irrévocable » de l’émission malgré des audiences correctes. Daniel Schneidermann est licencié de France 5 le 30 juin 2007 pour « faute grave ».
Une pétition regroupant 180 000 signataires sera lancée pour protester contre ce licenciement.
@rrêt sur images
Devant le soutien reçu, Schneidermann va alors relancer son émission, mais cette fois sur un support qui se veut « plus libre » : internet. En septembre 2007, il lance le site @rrêt sur images, avec une partie de son ancienne équipe, en espérant fédérer les signataires pour s’assurer un bon lancement. Sur internet, le journaliste espère trouver plus de liberté qu’à la télévision, notamment pour critiquer celle-ci.
Le modèle économique, qui écarte toute publicité, jugée « non fiable », se tourne vers les abonnements payants. En 2008, @rrêt sur images revendique environ 30 000 abonnés et 28 000 en janvier 2017.
En juin 2015, il est victime d’un canular téléphonique orchestré par le hacker israélien Grégory Chelli (connu sous le pseudonyme de Ulcan). Ce dernier se fait passer pour Daniel Schneidermann auprès de la police, et affirme s’être retranché chez lui après avoir assassiné son épouse. Un signalement qui entraîne la venue des forces de police au sein de son immeuble, alors même que le rédacteur d’@rrêt sur Images n’était pas à son domicile. Pour lui, cette mauvaise plaisanterie serait la conséquence d’écrits défavorables au hacker sioniste.
Il publie aussi une chronique média sur le Nouvel Obs, chaque matin du lundi au vendredi, « si possible à 9h15 précises ».
Le 18 novembre 2022, Daniel Schneidermann décide de couper une séquence lors d’un enregistrement d’Arrêt sur images où le député LFI Louis Boyard avait la langue un peu trop bien pendue et évoquait son passé de dealer de drogue (un effet moquette ? On ne sait). Le jeune député demanda à supprimer la séquence et à être réenregistré, ce qui fût fait illico presto sans en référer ni au rédacteur en chef ni à la rédaction, provoquant les protestations de ceux-ci et une mise au point du médiateur.
Un mois plus tard, le 16 décembre 2022, il quitte le fauteuil d’animateur de l’émission qu’il présentait depuis vingt-sept ans afin de « laisser la place aux jeunes ». L’émission est présentée dès l’année suivante par Paul Aveline, un ancien de BuzzFeed, et Nassira El Moadem, ex-directrice du Bondy Blog et raciste anti-française décomplexée. N’abandonnant pas pour autant son navire, il intervient toujours dans deux émissions et consacrées à la bande dessinée et au cinéma diffusées sur le site, qui héberge également son blog personnel, intitulé « Obsessions », à partir d’octobre 2023. Au fronton de celui-ci, on peut lire que « l’heure est à s’obséder un peu, et qu’il faut assumer ses obsessions ». Fidèle à son programme, Schneidermann en vient à comparer, sur la base d’une déclaration tronquée, Fabien Roussel, le secrétaire national du Parti communiste, à Jacques Doriot, communiste déçu qui se convertit au facisme pendant l’entre-deux-guerres. Même s’il efface son tweet, des représentants du premier cercle de la France Insoumise, Sophia Chikirou et Manuel Bompard, reprennent à son compte sa comparaison. Il en va de même pour le conflit israélo-palestinien où Schneidermann s’avère être l’une des seules voix de gauche à tenir un discours extrêmement sévère à l’endroit du peuple israélien dans la foulée de l’attaque du 7 Octobre, ce peuple coupable selon lui« d’avoir fait disparaître la gauche de la scène politique ».
Le mardi 30 avril 2024, Nassira El Moaddem qualifie la France de « pays de racistes dégénérés » sur X. La raison ? Un article de la Fédération française de football rappelant que le port de casques et de collants n’était autorisé que sur autorisation médicale délivrés par la FFF elle-même. Il existait des soupçons de faux certificats médicaux délivrés pour cacher un voile musulman, ou bien les jambes des hommes. Son Tweet provoque un tollé, bon gré mal gré, Schneidermann se solidarise avec celle qu’il a choisi pour lui succéder avec Paul Aveline.
Publications
- Tout va très bien, monsieur le ministre, Belfond, 1987
- Où sont les caméras ?, Belfond, 1989
- Un certain Monsieur Paul, l’affaire Touvier, Fayard, 1989 (avec Laurent Greilsamer)
- Les juges parlent, Fayard, 1992 (avec Laurent Greilsamer)
- La Disparue de Sisterane, Fayard, 1992
- Arrêts sur images, Fayard, 1994
- Anxiety Show, Arléa, 1994
- Nos mythologies, Plon, 1995
- L’Étrange Procès, Fayard, 1998
- Du journalisme après Bourdieu, Fayard, 1999
- Les Folies d’Internet, Fayard, 2000
- Où vont les juges ?, Fayard, 2002 (avec Laurent Greilsamer)
- Le Cauchemar médiatique, Denoël, 2003
- Les Langues paternelles, Robert Laffont, 2005 (sous le pseudonyme de David Serge)
- Gründlich (sous le pseudonyme de David Serge), Stock, 2007
- C’est vrai que la télé truque les images ?, avec sa fille Clémentine Schneidermann, Albin Michel, 2008
- Préface de Crise au Sarkozistan
- Où le sang nous appelle, avec Chloé Delaume, Seuil, coll. « Fiction et Cie », 2013.
- Terra incognita.net, Le publieur.com, 2013.
- On n’a pas fini de rire, Le publieur.com, 2015.
- Liberté d’expression : a‑t-on le droit de tout dire ?, La Ville brûle, 2015.
- Berlin, 1933 : La presse internationale face à Hitler, Le Seuil, 2019.
- Pouvoir dire STOP, Les Arènes, 2019.
- La guerre avant la guerre: 1936–1939. Quand la guerre prépare au pire, Le Seuil, 2022.
- Cinq têtes coupées. Massacres coloniaux : enquête sur la fabrication de l’oubli, Le Seuil, 2023.
Ce qu’il gagne
Sur France 5, il bénéficiait d’un CDI et gagnait « un peu plus de 12 000 € plus 3000 € par mois pour un « droit au format » de l’émission ». ll a été licencié avec 90 000 € d’indemnités.
Dans les quotidiens parisiens, un rédacteur spécialisé gagne. 2 744,87 € d’indemnités, auxquels s’ajoutent (pour ses 15 ans à Libé) 424,21 € de prime d’ancienneté. Un pigiste fait 66,25€ le feuillet dans les quotidiens, 53,46 € dans un hebdomadaire comme le Nouvel Obs.
A ces revenus variables ou fixes s’ajoutent ceux qu’il tire de son site et ses droits d’auteurs.
Il l’a dit
« Même si la liste Cohen mélange tout (quoi de commun entre les quatre ? Et pourquoi Kassovitz ne figurait-il pas dans la liste initiale ?), chacun en entend bien le point commun : les quatre proscrits, sous une forme ou une autre, ont dit des choses désagréables sur les juifs, Israël, ou le sionisme (…) Se priver d’invités intéressants parce qu’on n’est pas d’accord avec eux est, pour un journaliste payé par le contribuable, une faute professionnelle. Et non seulement c’est indéfendable, mais c’est contre-productif », Libération du 17 mars 2013.
« Nous à @rrêt sur images, on critique des articles, des émissions, des propos publics, on ne s’intéresse pas aux gens. (…) Très souvent à la rédaction on se disait : “il y a eu un fait divers d’insécurité. Est-ce qu’on va l’écrire sachant que ça peut être repris par Le Pen ?” Ben oui, il faut l’écrire ! (…) Je n’ai jamais invité Dieudonné. A la fois parce que j’en ai pas envie, mais aussi parce que je ne saurais pas comment le traiter sur le plateau. (…) Dieudonné et Soral, la moindre des vidéos qu’ils mettent sur Youtube, c’est 800 000 à 1 million de vues. Combien faites-vous de téléspectateurs ici à “La Nouvelle Édition” ? Vous en faites moins qu’eux ! Vous croyez qu’ils nous attendent ? », « La Nouvelle Édition », Canal+, 6 février 2014.
« Socialistes, soyez plus intelligents que les autres, faites-les sans le dire, les réformes. Plutôt que des conseillers en com, embauchez des conseillers en silence. Planquez-les, les réformes, dans les projets de loi les plus inattendus, sur la pêche, le bâtiment, la taille des petits pois. Épargnez-nous les hurlements fatigants et vains, les psychodrames nationaux “à la Sarkozy” de la réforme qui ne débouche finalement sur rien. Faites-les sans flots d’éloquence, sans grosses manchettes de journaux, essayez de passer sous les radars du “Petit Journal”, faites l’économie de l’épuisante et vaine guéguerre entre les cathos et les anticathos qui emplit la chronique franco-française depuis des siècles, cette guerre des grandes gueules qui ne demande qu’une occasion pour se rallumer. Ceux et celles à qui elles s’adressent, les réformes, à qui elles profiteront, et qui les attendent, sauront bien les trouver tout seuls », @rrêt sur images, 2 mai 2014.
« Il faut appeler Le Camp des Saints par son nom : un livre raciste. (…) Jean Raspail était une sorte de Zemmour des années 70 », Libération, mars 2011.
« Aphatie, aujourd’hui, est un journaliste cumulard, au sommet du système, dont on écoute les interviews sur RTL, dont on regarde les prestations indéfinissables sur Canal+ (…) Aphatie règne partout. Autant dire qu’il est un personnage public, et que toute caricature, tout écrit satirique visant ses interviews, son idéologie, ou même ce qui apparaît publiquement de sa personne (son accent donc, mais pas ses origines sociales) sont donc acceptables à priori, pour peu qu’ils ne franchissent pas les limites légales. Si Todd les a franchies, qu’Aphatie saisisse la Justice. On rira bien », Le Nouvel Obs, février 2012 (en réponse aux reproches de Jean-Michel Aphatie, voir plus haut).
« Le con étant la cible naturelle de Charlie, on comprend (oups) que son combat (re-oups) le porte naturellement vers les sujets piège à con, plutôt que vers les dossiers compliqués (bon, j’arrête), comme, au hasard, la crise de l’euro, dans lequel les cons et les pas cons sont plus délicats à départager », @rrêt sur images, 2 novembre 2011.
« Oui, c’est un site qui pue, où se déploie en permanence le classique racisme sournois des Gaulois persécutés, toujours implicite bien entendu. De plus, il est anonyme (nous ne sommes jamais parvenus à entrer en contact avec eux), et donc potentiellement manipulatoire. C’est un site, enfin, qui ne produit aucune information en propre. Mais c’est un agrégateur efficace, appuyé sur une communauté mobilisée. Grâce à cette mobilisation, on y voit, on y entend, des vidéos et des informations, qu’on ne voit pas ailleurs. Il est donc une source d’alertes importante. Attention, bouchez-vous le nez : je l’ai inclus dans mon netvibes, et j’y passe régulièrement », @rrêt sur images, 5 juin 2011.
« Dans la famille “je gueule tout haut sur toutes les chaînes ce que je pense que tout le monde pense tout bas” (et je professe donc misogynie, islamophobie, xénophobie, homophobie, ferme résolution pour le rétablissement de la peine de mort), Ménard tente de disputer son monopole à Zemmour (…) Zemmour et ses semblables sont des loups, qui flairent comme l’odeur du sang notre embarras. L’embarras se voit, s’entend, se sent », Libération, 11 avril 2011.
« Il est vrai que tous les racismes ne sont pas affectés d’un coefficient égal d’impunité. Zemmour aurait-il pris les juifs comme cible de son “incorrection politique, au lieu de cogner sur les Noirs et les Arabes, qu’il serait déjà tenu à l’écart de l’antenne, comme l’est (justement) Dieudonné », Libération, 28 février 2011.
« Et voilà qu’on rit. On rit de l’ignoble culot de ces deux desperados contre les bien-pensants. Et on se surprend là, riant avec Dieudonné, ayant rejoint la grande cohorte de tous ceux qui, tout de même, malgré tout, lui reconnaissent un certain talent. Évidemment, on s’effraie de rire. C’est bien moi, là, qui ris à un sketch de Dieudonné ? Mais cet effroi même surprend. Pourquoi avoir peur ? De quoi ai-je peur ? Qu’ai-je à craindre, de cet autre moi qui rit ? Qui rit certes de ce dont il ne devrait pas rire. Dont on lui a appris à ne pas rire. Si longuement appris. Non pas interdit, non jamais, pourquoi une interdiction eût-elle été nécessaire ? Mais appris, avec de belles images, Schindler, Holocauste. Avec des textes poignants, Anne Frank, Primo Levi. Et voici que, des décennies plus tard, on se découvre capable de rire de ça, de deux salauds culottés piétinant ce que l’on a de plus sacré, tellement sacré qu’on ose à peine le nommer. Voici que l’on découvre en soi une sorte de monstre d’innocence et d’insoumission », Libération, 12 janvier 2014.
« C’est incroyable qu’une telle intelligence se trompe de cibles avec une telle constance, se refuse avec une telle obstination à apprendre à diriger sa colère, fonce dans les pièges, tête baissée, et en souriant, parce qu’on lui a répété qu’il fallait sourire à de Caunes, et ce conseil-là il l’a entendu, conseil pas plus stupide que les autres, mais incohérent », Libération, 8 décembre 2013 (à propos de Jean-Luc Mélenchon).
« Être d’accord avec Marine Le Pen, cette expérience limite, cette sensation qui vous prend par surprise, et vous laisse pantelant, tenaillé par le doute : cette adhésion imprévue révèle-t-elle des pulsions profondes, refoulées ? Et si, au fond, j’étais d’accord avec elle ? », Libération, 27 octobre 2013.
« Pourquoi, en ce début du XXIe siècle, la télé publique ne connaît-elle que l’Histoire de droite ? […] La monopolisation de l’Histoire, à la télévision, par la droite monarchisante n’est pas une fatalité française. Il fut un temps lointain où l’Histoire, à la télé, pouvait être de gauche », Libération 15/10/2017.
« Cette activiste intersectionnelle s’appelait Rokhaya Diallo. Femme et noire, elle était souvent invitée à la télévision. On la conviait rituellement quand il fallait trouver un·e contradicteur·rice aux défenseurs du racisme, de la misogynie ou de l’homophobie à la télévision (car la télévision invitait abondamment des racistes, des misogynes ou des homophobes, à condition qu’ils puissent être intelligemment contredits). Femme intelligente et pondérée, Rokhaya Diallo disait des choses raisonnables face aux racistes, misogynes et homophobes. Corollaire : elle ne contestait pas vraiment les dispositifs télévisuels des émissions qui l’invitaient et restait donc tolérable pour ces émissions, qui pouvaient ainsi remplir avec elle leurs quotas de minorités visibles », Libération 25/12/2017.
« Expulsant de manière humiliante une femme noire intelligente et raisonnable, l’Etat offrit-il une illustration de ce que pouvait être ce fameux racisme d’Etat », ibid.
« L’essentiel, c’est de montrer, par l’exemple, qu’il n’y a pas de fatalité du chien écrasé, et qu’on peut sortir enfin de l’attraction pour le modèle canonique de la télé privée. Car c’est une chose d’enrager soir après soir de voir la chaîne publique décalquer la hiérarchie de l’info des chaînes privées. Mais il manquait, pour rendre ces critiques crédibles, un contre-modèle, même à l’état d’esquisse », au sujet du Média, la télé de Mélenchon (qui pourtant s’en défend), Libération 26/01/2018.
« Un directeur de journal qui avoue s’être planté, c’est assez rare pour mériter d’être souligné. Comme tous les hommes de pouvoir, le directeur de presse est par essence infaillible. Si son journal ne marche pas, ce sont les lecteurs qui se trompent », Libération 11/3/2018 au sujet de l’interview de Laurent Beccaria qui reconnaît l’échec d’Ebdo… ce qui n’a pas sauvé le titre.
« Un média, avant d’être un noble projet intellectuel, c’est avant tout un format, un support, une périodicité, un mode de financement. On ne met pas la même chose dans un trimestriel et dans une chaîne d’info continue. Dans un média papier et dans un média numérique. Dans un média financé par la publicité, et dans un média uniquement financé par ses abonnés. Si l’on dépend essentiellement, voire uniquement, de ses abonnés, il faut leur faire confiance », ibid.
« Mon invité est énervé. Qu’il pleuve, qu’il neige, qu’il vente, tous les jours, il est énervé, en tous cas très remonté. Nous allons donc lui demander son secret de beauté. Car force est d’admettre que ça maintient journalistiquement en forme, l’énervement. 26 ans qu’il décortique le discours médiatique, qu’il cogne et qu’il critique », France Inter, 24/01/2018.
« C’est plus sous la plume d’un Daniel Schneidermann que nous pourrons déceler toute la malfaisance antisémite. Daniel Schneidermann biberonne les Dieudonné et Soral », JForum, 24/05/2018.
« Le dernier article de Daniel Schneidermann dans Libération s’intitule : « Israël, la poule et la goule. » Il est consacré à Netta qui fait la poule. Il n’y a pas de hasard au jeu de mot pour la rime avec la goule. Une goule est un vampire suceur de sang, dans la mythologie arabo-musulmane. Schneidermann, en bon Essav manipulateur, adresse le mythe du Juif suceur de sang aux populations arabo-musulmanes. La victoire de Netta serait le résultat d’une volonté israélienne pour dissimuler l’extermination de Gaza. […] Une victoire israélienne lui est insupportable », ibid.
« Elle nous lave, cette image. Elle est trop belle pour être vraie. Et plus belle encore quand on apprend que Spiderman est un migrant malien sans papiers, et qu’il s’appelle Mamoudou Gassama », Nouvel Obs, 28/05/2018, au sujet du clandestin malien naturalisé et reçu par Macron pour avoir sauvé un enfant.
« La République reconnaissante, celle qui accorde au compte-gouttes les autorisations de séjour et le droit d’asile, celle qui s’épuise à effacer du paysage les ombres des tentes Quechua, celle qui reconduit les enfants à la frontière, va s’empresser d’honorer Mamoudou Gassama, cette République si secrètement honteuse », ibid.
« Je cherche souvent à pousser mes invités dans leurs retranchements, pas à créer des malaises. Je n’aime pas piéger mes invités. Je préfère quand ils sont dans des bonnes conditions pour produire une réflexion. La deuxième version est incontestablement plus intéressante que la première. Je trouvais que cette première fin était nulle… Je ne suis pas persuadé d’avoir pris la bonne décision. » Mais « Je ne suis pas lié à cette décision. Si quelqu’un me demande de couper un passage d’une émission future, que je refuse, et qu’il m’évoque Boyard, je saurai répondre pourquoi je l’ai fait dans ce cas-ci, et que je ne le referai pas dans un autre. » L’aurait-il fait dans un autre cas que celui de Boyard ? Par exemple avec un jeune député RN de 22 ans ? « Je ne peux pas dire », commentaires contenus dans le communiqué du Médiateur d’ASI après que Daniel Schneidermann ait accepté de couper une séquence du 18 novembre 2022 où le député LFI évoquait son passé de dealer de drogue.
« Haine de soi, woke. Les grands mots sont lâchés. Je ne crois pas me haïr. Disons que Black Lives Matter m’a placé dans une sorte d’état de sidération permanente devant le continent invisible de la domination. Comme MeToo, d’ailleurs. Les deux irruptions ont condamné les hommes blancs de ma génération à une peine de stupeur morose à perpétuité, sur le thème : comment pouvions-nous être à ce point trompés par notre propre regard blanc et masculin ? Depuis, je suis en état de veille », Cinq têtes coupées, Le Seuil, 2023.
« Je n’ai rien de commun avec ce peuple aveugle, qui a élu Netanyahu, qui a envoyé au gouvernement des ““bras cassés”” (Elie Barnavi) qui considèrent les Palestiniens comme des vermines, exigent des militaires qu’ils prennent des congés lors des fêtes religieuses, et affectent l’armée au soutien des colonies illégales de Cisjordanie, plutôt qu’à la protection des populations. Aveugle : n’est-ce pas le mot qui caractérise le présent de ce peuple, y compris dans ce qu’il a de meilleur ? Bien sûr, jusqu’au 7 octobre, une partie de la société civile s’était dressée contre la réforme de la Justice de Netanyahou », Arrêts sur image, 10/10/2023.
« Si je tweetais moi-même, comme c’est parfaitement mon droit, et le droit de quiconque, que la France est un ““pays de racistes dégénérés””, je serais insulté chez Pascal Praud et chez le repris de justice Morandini, toute l’artillerie Bolloré et son infanterie de trolls racistes et dégénérés se déchainerait contre moi (ça m’arrive régulièrement), mais personne ne me proposerait de ““me casser””, surtout en ces temps de “plus philosémite que moi tu meurs” chez les héritiers du parti fondé par des Waffen SS […] », Arrêts sur image, 02/05/2024.
Ils l’ont dit
« Car, c’est bien connu, le juif est fourbe, ses indignations sont sélectives, et ses compassions, purement communautaires. Il ne supporte pas qu’on dise des “choses désagréables” sur sa communauté, il a inscrit sur une “liste noire” un “humoriste” (Dieudonné) et un “publiciste inclassable” (Soral, inclassable ?), il se prive d’“invités intéressants” (pour débattre de quoi ?) “parce qu’ils ont contrevenu à un dogme” (lequel ? la Shoah ou la loi qui réprime sa négation ?). Bref, voici un juif pris la main dans le sac de son lobby et coupable de “faute professionnelle”. Si je relis ces phrases aujourd’hui, c’est parce qu’elles me laissent effaré et meurtri comme au premier jour où je les ai lues et aussi parce qu’il est temps d’en mesurer les dégâts. De mesurer vos dégâts, Daniel Schneidermann (…) Car c’est bien votre chronique de “Libération” qui met le feu à la “fachosphère”, ce sont vos phrases que Soral et Dieudonné répètent mot pour mot dans leurs premières vidéos du printemps 2013 appelant leurs partisans à des représailles contre moi, votre rhétorique de “liste noire” et de réflexe communautaire que reprend Dieudonné chaque soir sur scène pour me vouer aux chambres à gaz, votre charge qui nourrit encore aujourd’hui à mon encontre la haine antisémite qui se répand sur internet. Beau travail ! (…) Pour m’avoir ainsi désigné comme l’une des incarnations du “lobby sioniste”, celui qui muselle les médias et empêche de “casser du juif” tranquillement, vous êtes devenu l’un de leurs héros, l’idiot utile du “dieudonnisme” », Patrick Cohen, « Le Plus » du Nouvel Obs, 6 février 2014 (un an après que Schneidermann ait critiqué sa « liste noire » de gens à ne pas inviter dans les médias).
« C’est à partir de votre chronique qu’il (Patrick Cohen, ndlr) a commencé à être hué dans les spectacles de Dieudonné et que les dieudonnistes s’en sont pris à lui », Élisabeth Lemoine, « La Nouvelle Édition », Canal+, 6 février 2014.
« Voici alors les propos de Daniel Schneidermann : “On l’a entendu s’exprimer sur Aphatie et sur le tort considérable qu’il fait au midi de la France. Dahan, qui était à votre place, a imité remarquablement l’accent il y a une seconde.” Voilà. Loin d’être alerté par les propos d’Emmanuel Todd, Daniel Schneidermann raconte que lui-même et ses invités se sont bien moqués de l’accent. (…) La prétention et la condescendance des acteurs de toute cette séquence, leur sentiment de supériorité, leur goujaterie, tout cela est assez stupéfiant », Jean-Michel Aphatie, RTL.fr, 26 février 2012 (après qu’Emmanuel Todd ait méprisé son accent du midi dans une émission d’@rrêt sur images).
« Nous nous réjouissons que le moindre de nos gestes soit désormais épié et interprété par les journalistes à l’instar des plus grandes stars. Certains, en dépit de plusieurs années passées à animer des émissions de TV, d’une idéologie conformiste, d’une francophobie à fleur de peau et de leur appartenance à la gauche mondaine n’y sont jamais parvenus. C’est le cas de Daniel Schneidermann et de son site (payant) dont l’audience reste en deçà de celle de notre modeste blogue d’amateurs et de bénévoles », Fdesouche.com, 24 décembre 2009.
« Le souci du chroniqueur quotidien, c’est qu’il faut écrire un papier par jour. C’est à peu près la seule explication que je vois en lisant cette très étonnante chronique, “L’irrésistible portrait d’Eva Joly dans Le Figaro”, signée Daniel Schneidermann », Vincent Glad, « Le Plus » du Nouvel Obs, 15 juillet 2011.
« À force de vous prendre au sérieux, Daniel Schneidermann, vous avez fini par nous ennuyer. Jusqu’à vous fourvoyer. Durablement. Votre art de couper les cheveux en quatre est devenu avec le temps une entreprise de démagogie au service de vos dogmes et de la santé financière de votre site », Yves Delahaie, « Le Plus » du Nouvel Obs, 17 novembre 2011.
« Je ne m’adresse pas au journaliste qui tient actuellement la boutique de son site d’Arrêt sur images, au spameur qui inonde régulièrement les boîtes mail de ceux qui, comme moi, ont fini par le délaisser, pour leur demander de se réabonner, ni même à celui qui endossa le rôle d’écrivain quand, l’année dernière, avec votre équipe, vous avez publié “Crise au Sarkozistan” », ibid.
« Juste après que Daniel a pris congé des abonnés, l’antenne est rendue, et Boyard quitte le plateau et nos locaux, visiblement agacé. Quelques minutes plus tard, Boyard et son attaché de presse reviennent dans la rédaction, et, accueillis par Daniel, entrent dans son bureau. Selon Daniel, Louis Boyard lui aurait alors présenté ses excuses pour son énervement, et expliqué que la question de son passé de dealer était très douloureuse pour lui pour des raisons personnelles. Le député propose alors de couper la séquence, mais de revenir à un autre moment chez ASI pour en parler. Daniel refuse : on ne coupe pas nos émissions. Après un quart d’heure d’échanges, Daniel et Boyard passent un marché : la séquence sera coupée, mais une nouvelle version doit être tournée sur-le-champ, avec l’extrait de TPMP de 2021 où le député LFI évoquait son passé de dealer. C’est cette fin d’émission que nos abonnés peuvent visionner aujourd’hui…
Daniel sait que cette décision va faire réagir. Et certainement pas en bien. Mais il réaffirme son crédo : “Je pense qu’on peut faire beaucoup de choses du moment qu’on est transparent.” Comme ici, modifier la fin d’une émission normalement tournée dans les conditions du direct. En espérant que ça ne se reproduise plus. », communiqué du Médiateur d’ASI après que Schneidermann ait accepté de couper une séquence du 18 novembre 2022 où le député LFI évoquait son passé de dealer de drogue.
« Quand Fabien Roussel parle des ouvriers qui “parlent le français”, c’est pour sous-entendre que le gouvernement ne parle pas leur langue. Cela n’a évidemment strictement rien à voir avec les origines.» Et de constater, résignée : «Ce n’est pas la fin du monde, les polémiques naissent puis meurent… Mais on regrette quand même que des journalistes comme Daniel Schneidermann l’aient relayé dans un premier temps », un membre de l’équipe de campagne de Fabien Roussel, Libération, 17/09/2023.
« C’est l’économie circulaire de l’Histoire contrefaite. Rien ne se perd, tout se transforme. Un carburant de propagande à la fois renouvelable et fossile : Daniel Schneidermann est un dinosaure de la propagande d’extrême gauche, il en connaît toutes les ficelles qu’il use à l’envi, recycle jusqu’à la corde sans vergogne, à temps et à contretemps. Sauf que cette fois, ça ne passe plus. La (grosse) ficelle a cassé, laissant l’extrême gauche en rade. Née avant la honte, elle s’est auto-éjectée elle-même de l’arc républicain, selon l’expression convenue, et risque de se relever cabossée. Si elle se relève », Gabrielle Cluzel, Boulevard Voltaire, 10/10/2023.
« Depuis quelques années, le vernis n’en finit plus de craquer. Notamment dans ses billets vengeurs de Libération. On se souvient de « La liste de Patrick Cohen ». Quelques lignes pour accuser le journaliste de C à vous de tenir une « liste noire » de personnalités qu’il refuse d’inviter pour avoir dit pêle-mêle « des choses désagréables sur Israël, les juifs ou le sionisme ». Notez l’amalgame. En guise de liste, quatre noms : Marc-Édouard Nabe, Tariq Ramadan, Dieudonné et Alain Soral… Tous antisémites ! À l’image de Nabe, qui fera l’éloge des attentats du 11-Septembre, une « raclée apocalyptique » menée par des kamikazes « morts pour la justice ». « Un type plutôt sympathique », écrit Daniel Schneidermann. Avec lui, contrairement au peuple d’Israël, il se sent manifestement des affinités », Franc-Tireur, 18/10/2023.
Crédit photo : capture d’écran vidéo CPVALDELOIRE via Youtube (DR)