L’insignifiante ambition
État civil et formation
Né en janvier 1975 au Havre, fils d’enseignants, Christophe Ono-dit-Biot a fait Hypokhâgne et Khâgne au lycée Janson-de-Sailly, à Paris, puis un DEA de Littérature comparée sur les écrivains fin de siècle « décadentistes ». Il est agrégé de lettres modernes (2000). Tombé très tôt dans le monde balbutiant d’Internet, il publie dès 1995 son journal intime en ligne, Le Journal de l’énervé. Cette expérience inédite à l’époque en France lui vaut à vingt ans sa première célébrité, notamment par le truchement d’un reportage de l’émission « Nulle Part Ailleurs » que lui consacre Frédéric Taddéï sur Canal.
Parcours professionnel
À partir de 1996, il publie dans la revue éphémère NRV, dirigée par Frédéric Beigbeder, où il côtoie Michel Houellebecq ou Virginie Despentes. Professeur de littérature française en lycée technique à Meaux pendant deux ans, il commence à collaborer à ELLE, sous la forme de reportages, après la publication de son premier roman, Désagrégé(e) (Plon, 2000), qui raconte sa réaction à son premier échec à l’agrégation. Il travaille aussi à l’époque dans une agence de publicité.
En 2002, il publie un deuxième roman, toujours chez Plon, Interdit à toute femme et à toute femelle, sur le Mont Athos en Grèce. À chaque publication, régulièrement saluée par un prix littéraire, il prend du grade dans la presse : il entre ainsi cette année-là au Point, à qui il livre également des reportages, notamment sur la Birmanie, l’un de ses sujets de prédilection, ou sur les meurtres du Grand Bornand (Affaire Flactif, avril 2003).
En 2004, il écrit un troisième roman, Génération spontanée, qui le propulse grand reporter au Point dans le service politique. À ce titre, il couvrira la campagne présidentielle qui verra le triomphe de Nicolas Sarkozy en 2007.
Cette même année, il publie Birmane, et est promu rédacteur en chef culture de l’hebdomadaire, sous la houlette de Franz-Olivier Giesbert. Il monte en grade en 2010 en devenant directeur adjoint de la rédaction, tout en conservant ses responsabilités sur les pages culture.
À partir de là, c’est table ouverte à la télé et royal au bar : Ono-dit-Biot collabore à « En aparté » sur Canal et au « Bateau livre » sur France 5. En 2009, il pénètre dans le saint des saints, « La Matinale » de Canal, où il dirige d’abord la rubrique culture avant d’y effectuer sa propre interview, « La Promesse de l’aube ». Il officie aussi sur France info comme chroniqueur littéraire et devient chroniqueur en septembre 2011 dans l’émission d’Élizabeth Tchoungui, « Avant-premières », sur France 2.
Christophe Ono-dit-Biot aura ainsi réalisé le parcours sans faute — qu’il annonçait déjà au milieu des années 90 dans son journal sur internet — du jeune loup de province venu conquérir Paris. Doté d’une culture bourgeoise minimale, il aura slalomé avec succès entre les périls qui menacent les romanciers-journalistes dans son genre : de Beigbeder à Giesbert, il a toujours choisi avec soin ses parrains, entre branchitude et notabilité. De même, on ne note jamais dans sa prose un mot plus haut que l’autre. Politiquement, il est libéral bon teint, concernant l’économie comme les mœurs, et incarne une droite décomplexée mais pas trop, qui distribue les bons points culturels du haut de ses hebdomadaires pour CSP+. S’étant trouvé une bonne cause à la BHL, celle du peuple birman en l’occurrence, qui ne mange pas de pain (la cause comme le peuple), il a tiré de ses voyages en des lieux exotiques relativement paisibles (Cuba, Thaïlande, etc.) le fond de ses romans. Son personnage picaresque et récurrent, César, un double fantasmé, n’est jamais totalement parfait ni totalement ridicule : séducteur, avec un vernis de culture et des références rocks, il devient le cliché du bobo parisien qui mouille la chemise kaki en vadrouille. Et fait mouiller la culotte des filles.
Parcours militant
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Publications
Romans
- Désagrégé(e), 2000, Plon/Pocket
- Interdit à toute femme ou femelle, 2002, Plon/Pocket
- Génération spontanée, 2004, Plon/Pocket
- Birmane, 2007, Plon/Pocket
- Plonger, 2013, Gallimard
- Plonger, 2013, Gallimard (adapté au cinéma par Mélanie Laurent en 2017).
- Croire au merveilleux, 2017,Paris, Gallimard
Autres
- Ciels d’orage, entretiens avec Enki Bilal, 2011, Flammarion
- Nuit espagnole avec Adel Abdessemed, collection Ma Nuit Au Musée, 2019, Stock
- La Minute antique, Quand les Grecs et les Romains nous racontent notre époque, 2019, de l’Observatoire
Prix
- Prix Edmée de La Rochefoucauld 2001 pour Désagrégé(e)
- Prix littéraire de la Vocation 2004 pour Génération spontanée
- Prix Vol de nuit 2004 pour Génération spontanée
- Prix Interallié 2007 pour Birmane
- Grand prix du roman de l’Académie française 2013 pour Plonger
- Prix Renaudot des lycéens 2013 pour Plonger
Collaborations
Il succède à Michel Field dans l’animation du magazine littéraire de TF1 (diffusé plus tard sur NT1 et LCI) Au fil des mots entre septembre 2015 et avril 2017, date de l’arrêt de l’émission.
Ce qu’il gagne
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Il a dit
« Aujourd’hui, le paradis est à portée de carte bleue. C’est peut-être pour ça que ce n’est pas le paradis », Birmane.
« “On vit tellement sans amour, aujourd’hui”. C’était terrible à entendre. Parce que je le pensais aussi », Plonger.
« La vérité, ça n’existe pas, comme tous les absolus qu’on n’atteint jamais. Je ne peux que te donner Ma vérité ; imparfaite, partiale, mais comment faire autrement ? », ibid.
« Je ne crois pas en effet que notre époque puisse se raconter sous la forme d’un roman ; Il faut un minimum de narration, et ce monde-ci, toujours entrecoupé par la réception d’un SMS, d’un mail, ne raconte plus grand-chose dans la longueur. La seule chose qui y soit continue, c’est l’interruption », ibid.
« Ne néglige jamais ton corps. C’est ton instrument. Fais-le vibrer, jouer, tires-en les plus belles sensations. Travaille-le pour qu’il soit beau, lumineux, svelte, pour qu’il se faufile partout dans toutes les eaux. Fais en ton meilleur allié. Fais-le rayonner. Exige tout de lui », ibid.
Sa nébuleuse
Franz-Olivier Giesbert : Christophe Ono-dit-Biot doit presque toute sa carrière à l’omnipotent patron du Point, qui l’aura imposé sur les plateaux télé.
Élizabeth Tchoungui : l’animatrice franco-camerounaise lui a conféré une grande notoriété télévisuelle en le faisant intervenir dans Avant-premières, sur France 2.
Yann Moix : comme lui, il est un provincial attiré par Saint-Germain-des-Prés et a tout tentée pour se hisser au-dessus de la pyramide littéraire. On ne s’étonnera donc pas que le journaliste culturel du Point ait été pendant une soirée chroniqueur dans l’émission où Moix officiait précédemment, On n’est pas couché.
Ils ont dit de lui
« Examinons le cas du Point par exemple : comment accorder quelque soupçon de crédit intellectuel à sa récente interview pirate (numéro du 4 septembre 2008, pp. 90–91) aussi imaginaire que profondément stupide, avec Michel Houellebecq ? Tout y pue la malhonnêteté la plus indigne, la sottise, la paresse, la vengeance à deux francs six sous, le règlement de compte minable, en un mot, la vulgarité, qualité qui semble décidément l’une des marques de Christophe Ono-Dit-Biot qui, il est vrai, saluant le mauvais bouquin (qualifié de «livre donut» par notre pitre verbeux) de Yasmina Reza sur Nicolas Sarkozy dont on nous encombra les oreilles et la vue (peut-être même le nez), explora quelque trou noir intellectuel qui, c’est au moins la qualité des trous noirs véritables, le dévora. », Juan Asensio, Stalker, 16/06/2011.
« Si j’étais aussi malin que Christophe Ono-Dit-Biot, ma foi, je n’hésiterais pas à faire de chacune de mes critiques le tremplin publicitaire discret mais efficace de ma parfaite connaissance de l’art de vivre dans lequel tout bel homme moderne ne cultivant pas seulement son physique mais aussi son intelligence se doit de nager, comme un poisson dans une rivière de Champagne », Juan Asensio.
« Ceux qui ne participent pas aux conférences de rédaction du Point ne le savent pas, mais Ono-dit-Biot a toujours été un fou des requins, ces prédateurs débiles », Franz-Olivier Giesbert, Le Point, 24 octobre 2013.
« Sur les migrants, le journaliste évoque la déesse Léto qui erre sur la Terre avec ses deux enfants Apollon et Artémis qui ont soif. Quand elle trouve une source, les habitants l’empêchent de se désaltérer, car “elle n’est pas d’ici », Franceinfo, 31/10/2019.
Crédit photo : capture d’écran vidéo Fondation Cartier pour l’art contemporain via Youtube (DR)