Ce 9 mars 2020, Pascal Praud est menacé de mort ; depuis sa présomption de climato-scepticisme à l’occasion de son émission du 6 mai 2019 sur CNews, le journaliste et présentateur de L’Heure des Pros est la victime récurrente de la vindicte de ses confrères, dans des articles peu flatteurs au Monde, Les Inrocks, Le Huffigton Post, Libération, Le Nouvel Obs, etc. Cette fois-ci, pour les rappeurs Sneazzy et Nekfeu dans leur clip Zéro Détail, il mériterait un « canon au fond de la bouche » et « une balle dans le cervelet », car il salirait l’islam dans ses émissions. L’intégrité physique du journaliste est menacée. Voyons comment ont réagi une partie des confrères à cette occasion.
À L’Express et au Point ? Neutralité express, laissez faire la justice
On prend des pincettes tout en évoquant le fait divers via l’enquête du parquet de Paris ouverte à la suite de la diffusion du clip sur internet, loi Avia oblige.
« Le parquet de Paris a décidé d’ouvrir une enquête après la diffusion du single de Sneazzy et Nekfeu, dont les paroles semblent menacer le journaliste de la chaîne Cnews. »
Au Point, l’accent est mis sur des menaces faites à la police et sur les réactions à chaud de Pascal Praud, parlant avec ironie d’une « méthode de discussion assez expéditive ». En plus de l’insulte, une sorte de « fierté musulmane » entend faire respecter le délit de blasphème. « J’suis musulman et fier de l’être/On va jamais m’traîner dans la boue. ».
Au Parisien, Est Républicain, Sud Ouest, Ouest-France et compagnie des journaux régionaux ? « Aller demander à l’AFP ! »
Peu de choses développées, on reprend la dépêche AFP. Bref rappel des faits, premier gros titre qui saute aux yeux (saint-pasd’amalgame, priez pour nous) : des paroles « mal comprises », selon Sneazzy. On se focalise sur le rappeur, sa vie.
À L’Obs et au Monde, la parole est à la défense
9 mars, dans L’Obs : « Plusieurs personnalités politiques ont également tenu à apporter leur soutien, la plupart issues du parti de droite Les Républicains. » Sont cités Nadine Morano, Bruno Retailleau, Éric Ciotti. Traduction : La Manif pour tous, donc la frange extrémiste et nauséabonde de la droite.
Le 10, on rempile : « DES PAROLES SORTIES DE LEUR CONTEXTE ». L’argumentaire : Praud représente ces « polémistes droitiers omniprésents sur les chaînes d’info », dit Nicolas Truong au Monde le 7 mars. ET EN PLUS ! certains politiques se servent de cette affaire pour tirer à boulet rouge sur l’Islam. Jean-Michel Aphatie, Jérôme Béglé, Philippe Corbé, Françoise Laborde, Éric Naulleau ou Ivan Rioufol ont condamné cet appel au meurtre et soutiennent Pascal Praud. Aux abonnés absents les syndicats de journalistes type SNJ, dont le silence est assourdissant.
Au Figaro, la parole est au procureur Pina
On relit les mêmes choses, que les employeurs de Praud réfléchissent l’action en justice, que les propos sont inadmissibles, on dresse la monographie de Sneazzy, etc.
Quand voici Céline Pina ! pour FigaroVox. Elle défend Praud, dénonce le rappeur : « […] Sneazzy qui pense que l’appel au meurtre est un moyen de témoigner de sa fierté d’être musulman [..]. » et ajoute que les paroles de cette chanson révèlent la mentalité qui sévit dans les quartiers, savamment entretenue par un mélange de discours victimaire et de propagande violente. Derrière, la remise à jour du délit de blasphème et le mutisme des milieux de gauche face à cette affaire, qui fait étrangement écho à l’affaire Mila, ou aux caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo.
Valeurs Actuelles, inversion accusatoire
L’article de VA entend démonter la défense du rappeur à l’occasion du tollé suscité sur les réseaux sociaux après la publication du clip.
Le prévenu parle : les paroles expriment « la haine qui peut exister contre les musulmans et la volonté de les faire taire, le tout imagé par la métaphore de la balle dans le cervelet (pour dire « ne pensez plus ») et du canon dans la bouche (pour dire « ne parlez plus »). En somme, ce serait un mauvais procès qu’on lui fait.
Pour Valeurs Actuelles c’est clair, on est dans l’inversion accusatoire, la victimisation de celui qui appelle au meurtre, le tout au nom de l’anti-islamophobie et de la liberté d’expression.
À RTL comme à Canal+, on défend la profession
La société des journalistes de RTL a dénoncé par tweet les « paroles infectes » de Sneazzy envers Pascal Praud « et plus largement la profession de journaliste ».
Last but not least
Anne-Christine Lang, députée LREM déplore sur Twitter le manque de réaction à gauche : « Il paraît que soutenir Pascal Praud, c’est de droite […] ça en dit long sur la décomposition d’une partie de la gauche… ». Moralité ? De deux choses l’une, la défense d’un collègue ou la défense de la bien-pensance, deux poids deux mesures sont de mise au pays de certains journalistes.
Pour creuser un peu, consultez le portrait de Pascal Praud et notre article sur Frédéric Fromet, le deux poids deux mesures des indignations médiatiques.