Certains jugent Al Jazeera complaisante à l’égard d’Israël, d’autres l’estiment au contraire très critique envers ce dernier. Au final, la chaîne qatarie a du mal à se positionner clairement.
L’illustration a été faite tout récemment. Un article rédigé par un professeur d’origine palestinienne, associé à l’université américaine de Columbia, Joseph Massad, a été censuré puis republié trois jours plus tard accompagné de minces explications. Ce dernier arguait qu’Israël avait besoin de l’antisémitisme pour se légitimer et se positionnait contre le régime sioniste.
Sa publication a entrainé un flot de protestations parmi les défenseurs de l’État hébreux ; son retrait a enflammé les antisionistes, criant à la censure. Finalement, sa remise en ligne a été publiée avec un commentaire, précisant seulement que le papier « [avait] suscité de nombreuses questions ».
Et celui-ci d’ajouter : « Nous aurions du mieux gérer cette affaire, et nous en avons tiré les leçons qui nous permettront de maintenir le plus haut niveau d’intégrité journalistique […] Al Jazeera ne se soumet pas aux pressions, quelles que soient les circonstances, et notre histoire est pleine d’exemples de circonstances où, confrontés à des choix difficiles, nous n’avons pas cédé. C’est le secret de notre réussite. »
Un blog, Electronic Intifada, s’est interrogé sur ce comportement : « La volte-face fait suite à des critiques croissantes à l’intérieur comme à l’extérieur d’Al Jazeera à propos du retrait de l’article, et des craintes que cela suscite quant à l’indépendance éditoriale et la liberté d’expression alors que la chaîne qatarie s’apprête à lancer sa chaîne aux États-Unis. »
Enfin, comme le conclut Pierre Haski sur Rue89, « dans cette affaire, Al Jazeera a réussi à irriter tout le monde, pro et anti-Israël, aussi bien que ses propres journalistes inquiets de voir un article retiré sans un mot, et remis sans explications claires, et bien sûr l’auteur de l’article, un Palestinien né en Jordanie qui enseigne la pensée arabe à Columbia. »
Dessin : © Milady de Winter pour l’Ojim