Alors que l’épidémie du Coronavirus, partie de Chine, se répand dans le monde entier, Le Courrier Picard a tenté un petit jeu de mot en titrant sa une du dimanche 26 janvier 2020, “Alerte jaune”. Il n’en fallait pas plus aux bien-pensants pour y voir un titre raciste (sic) rappelant la théorie du “péril jaune” de la fin du XIXe siècle, concept annonçant la future domination du monde par l’Asie, au détriment de l’Occident.
Une “alerte jaune” qui ne passe pas
En plus de cet intitulé de une, “Coronavirus chinois : alerte jaune”, le Courrier Picard a titré son éditorial du jour, “Le péril jaune ?”.
Twitter, devenu l’un des principaux lieux de l’indignation, que ce soit d’anonymes ou de collectifs liberticides comme les Sleeping Giants, a vivement réagi à la sortie du journal. Madjid Messaoudene, élu à Saint-Denis, a twitté en parlant de “racisme décomplexé”, d’autres se sont demandés si le titre n’était pas “un peu limite” ou sont allés jusqu’à parler de “vannes racistes”. Mais cette une ne serait qu’une goutte d’eau dans le vase des réactions anti-asiatiques qui fleurissent avec le Coronavirus, ce qui a même entrainé la création d’un hashtag “#JeNeSuisPasUnVirus”.
Suite à cette indignation, la LICRA aurait porté plainte contre le journal, malgré le mea culpa de ce dernier. Le ridicule ne tue plus, il censure.
Le Courrier Picard utilise la “colorimétrie” (?!) pour se justifier
C’est dans un article du jour même de la une, que Le Courrier Picard a présenté ses excuses et s’est expliqué sur ses choix dialectiques.
Après la classique présentation d’excuses et l’appel à plus de vigilance à l’avenir, le quotidien a tenté de surprenantes justifications de ses propos.
Concernant le titre de l’éditorial, ils rappellent avoir mis un point d’interrogation, pour bien souligner “la distanciation avec le propos”. Le terme de “péril jaune” faisait bien référence à celui du XIXe siècle, pour “relativiser justement l’éventuelle panique irrationnelle pouvant se répandre après l’apparition des premiers cas en France”, “panique irrationnelle” qui serait similaire à celle s’étant répandue il y a plus d’un siècle. Alors que la Chine est de plus en plus puissante géopolitiquement, l’illustration est peut-être mal choisie pour parler d’irrationalité…
Et pour ce qui est du titre de la première page, “l’alerte jaune”, ils se sont justifiés en expliquant qu’il faut le prendre au “sens colorimétrique, à savoir dans une gradation du jaune au rouge. À l’image des alertes météo allant du vert au rouge en passant par le jaune et l’orange. Et voulait, par ce biais signifier qu’il ne fallait pas sur-réagir à cette épidémie.” (?!). Avec de telles explications, la rédaction pourra être gratifiée, sans trop de concurrence, de la palme de “l’excuse la plus farfelue de l’année”.