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Allemagne : comment le Groupe Springer cède à la pression du lobby queer

17 juin 2022

Temps de lecture : 7 minutes
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Allemagne : comment le Groupe Springer cède à la pression du lobby queer

Temps de lecture : 7 minutes

Cela cartonne fort dans les coulisses du groupe Axel Springer, depuis qu’un quintette d’auteurs scientifiques a été invité à publier dans le quotidien Die Welt un article — au titre éloquent :  « Comment les chaînes publiques de télévision sexualisent et rééduquent les enfants ».


La pres­sion exer­cée sur l’en­tre­prise de médias sem­ble être si forte que son PDG, Math­ias Döpfn­er, se met à ram­per, pub­liant une let­tre « en son pro­pre nom », aupar­a­vant envoyée, presque mot pour mot, à tous les employés de la mai­son d’édi­tion. « Notre mai­son représente la diver­sité et la lib­erté », peut-on trou­ver en titre de ses excus­es. Le titre de l’ar­ti­cle, lui, a été mod­i­fié : « sex­u­alis­er et réé­du­quer » devenant « endoc­triner ».

« Diversité » sexuelle et de genre

La diver­sité sex­uelle et de genre serait pour Döpfn­er un sujet « par­ti­c­ulière­ment proche de son cœur », il serait en tout pre­mier lieu con­cerné par la ques­tion : « et en la matière — je pense — la con­tri­bu­tion des cinq auteurs invités est souter­raine ». Les sci­en­tifiques cri­ti­queraient sans nuances les radiod­if­fuseurs de ser­vice pub­lic pour leurs reportages sur les iden­tités trans­sex­uelles chez les enfants et les jeunes, impli­quant par ailleurs de manière tout aus­si peu nuancée qu’il n’y a que deux iden­tités de genre. « Sci­en­tifique­ment, le texte est au mieux som­maire et uni­latéral », selon Döpfn­er, qui, jour­nal­iste de for­ma­tion, cri­tique des sci­en­tifiques ayant un doc­tor­at dans leur dis­ci­pline. Dans leur con­tri­bu­tion à die Welt, ceux-ci se réfèrent au dossier qu’ils ont pub­lié : « L’idéolo­gie au lieu de la biolo­gie dans la radiod­if­fu­sion publique ». Un dossier qui, au moyen de nom­breuses preuves, doc­u­mente l’en­doc­trine­ment et la pro­pa­gande de défor­ma­tion au sujet de faits biologiques  — tout par­ti­c­ulière­ment dans les pro­grammes des­tinés aux enfants et à la jeunesse . L’ap­pel pub­lic qui accom­pa­gne le dossier compte de nom­breux sig­nataires issus de divers­es dis­ci­plines scientifiques.

À la direc­tion du dossier fig­ure Alexan­der Korte, médecin et chef de ser­vice à l’U­ni­ver­sité Lud­wig-Max­i­m­il­ian de Munich. Le Dr Korte traite depuis une ving­taine d’an­nées des enfants atteints de dys­pho­rie de genre trans­sex­uelle. Dans de nom­breuses inter­views, comme récem­ment dans le  quo­ti­di­en TAZ — « C’est branché d’être trans » — Korte met en garde con­tre le pro­jet de loi d’au­todéter­mi­na­tion prôné par la coali­tion au pou­voir et con­tre le fait d’al­i­menter plus encore le battage médi­a­tique trans­genre chez les jeunes filles. Comme beau­coup de médecins, il a observé une aug­men­ta­tion expo­nen­tielle d’auto-diagnostics trans­gen­res chez les jeunes filles ces dernières années.

Battage médiatique trans

Le battage médi­a­tique trans chez les filles pub­ères serait un « trou­ble mod­erne » rem­plaçant l’anorex­ie, observe Korte qui a accom­pa­g­né des cen­taines de cas de ce type en tant que médecin trai­tant. Le mes­sage du lob­by trans aurait un impact sur des filles men­tale­ment insta­bles, ayant d’énormes prob­lèmes avec leur féminité en développe­ment. Le pas­sage au sexe opposé serait présen­té par le lob­by trans comme la solu­tion à tous leurs problèmes.

Rééducation idéologique des enfants

Selon Korte, les chaînes de télévi­sion auraient elles aus­si une part de respon­s­abil­ité dans le prob­lème, leurs nom­breux for­mats dédiés à l’en­fance et à la jeunesse, « basés sur le mes­sage erroné de la pol­y­sex­u­al­ité » faisant du « être trans » un sujet per­ma­nent. L’in­ter­ven­tion chirur­gi­cale liée au change­ment de sexe serait décrite comme « sim­ple comme bon­jour », les prob­lèmes causés par les blo­queurs de puberté, les hor­mones sex­uelles croisées et par l’ab­la­tion chirur­gi­cale des seins et de l’utérus min­imisés. « Les con­séquences men­tale­ment et physique­ment graves et irréversibles de telles mesures ne sont pas du tout décrites ou, au mieux, évo­quées en pas­sant », indique l’ar­ti­cle, un aver­tisse­ment au sujet de la « réé­d­u­ca­tion idéologique des enfants », qui fait aujour­d’hui tant de bruit. L’ap­pel des cinq auteurs est clair : « le pub­lic doit ouvrir les yeux ». « Il est inac­cept­able qu’un petit nom­bre d’ac­tivistes sapent la télévi­sion de droit pub­lic avec leur idéolo­gie trans et « woke/éveillée », dif­fusent des aber­ra­tions comme vérités sci­en­tifiques et nuisent irrémé­di­a­ble­ment à la vie de nos enfants et de nos jeunes. »

Mais le lob­by trans «woke/éveillé» est la nou­velle puis­sance dans l’Alle­magne arc-en-ciel. Le Groupe Springer en ressent main­tenant les effets — ce qui se traduit par la men­tion suc­cincte de Döpfn­er dans son cour­ri­er que, « le salon de l’emploi dédié aux queers, Sticks & Stones, organ­isé par le groupe Uhlala, a exclu comme par­tic­i­pant la société Axel Springer pour cette année. »

Springer à plat ventre devant les queers

Döpfn­er, qui s’est appliqué à dén­i­gr­er la con­tri­bu­tion des sci­en­tifiques comme « super­fi­cielle, con­de­scen­dante et pleine de ressen­ti­ment » et à accuser les biol­o­gistes et médecins réu­nis d’avoir « une atti­tude réac­tion­naire », n’a lais­sé aucun doute sur le fait que lui-même, et donc Springer dans son ensem­ble, serait du côté des bons et des tolérants : Pour tous ceux qui se sen­tent faire par­tie de la « com­mu­nauté LGBTIAQ* », ​la con­tri­bu­tion des uni­ver­si­taires serait « blessante et insupportable ».

Un prix Pride Champion Gold

Ce qui a suivi la proster­na­tion de Döpfn­er devant le lob­by queer est sus­cep­ti­ble d’être une sup­pli­ca­tion unique dans l’his­toire du groupe : en rai­son d’une seule con­tri­bu­tion d’au­teurs externes, « près de 18 000 employés de l’en­tre­prise seraient tenus sol­idaire­ment respon­s­ables », a déploré le PDG. Le Groupe Springer a « été l’une des toutes pre­mières entre­pris­es à soutenir ce salon depuis 2010 », écrit Döpfner.

L’ex­clu­sion de Springer à ce salon de l’emploi est évidem­ment d’une impor­tance con­séquente. Le groupe Uhlala, qui non seule­ment organ­ise le salon, mais con­seille égale­ment des entre­pris­es telles que Microsoft, Coca Cola, Google et SAP dans leur « LGBTIQ+ Diver­si­ty Man­age­ment » et décerne le prix Pride Cham­pi­on Gold aux entre­pris­es par­ti­c­ulière­ment con­formes, est un exem­ple mon­trant que « trans » et « queer » sont syn­onymes d’un chiffre d’af­faires se comp­tant en mil­liards de dol­lars auquel cor­re­spond une influ­ence poli­tique proportionnelle.

Springer a son propre réseau LGBTIAQ*

Döpfn­er ne craint pas en fait d’être exclu d’un quel­conque salon de l’emploi, mais de pren­dre de plein fou­et la force de la « can­cel culture/culture de l’an­nu­la­tion » — et cela, « bien que plus de 800 employés soient impliqués dans le réseau mon­di­al LGBTIAQ* du Groupe Springer », et bien que l’en­tre­prise, comme peu d’autres, « ait non seule­ment accep­té dif­férentes iden­tités sex­uelles et modes de vie pen­dant des années, mais les ait même expressé­ment pro­mus ». Des zones de sécu­rité et des toi­lettes « tous gen­res » seraient la preuve de cette « cul­ture d’en­tre­prise pro­fondé­ment libérale ».

Il ne doit pas être facile pour Döpfn­er de trou­ver l’équili­bre sur cette corde raide : met­tre les queers et les trans dans son escar­celle sans s’al­ién­er pour autant un lec­torat hétérogène mais de ten­dance plutôt con­ser­va­trice et bour­geoise. « Notre mai­son est pour la diver­sité. Donc aus­si et surtout pour la diver­sité d’opin­ion » — Döpfn­er prend donc tout de même fait et cause pour les com­men­taires incon­fort­a­bles en général et pour les « souter­rains» en par­ti­c­uli­er. Beau­coup trop de ses lecteurs sont con­scients que la ques­tion de savoir « com­ment et quand refuser ou per­me­t­tre aux enfants de dis­cuter et de pren­dre des déci­sions sur les iden­tités de genre fluc­tu­antes » est extrême­ment impor­tante et délicate.

Expulsion et exclusion

Un pas­sage du cour­ri­er de Döpfn­er, qui décrit le manque de lib­erté dans son essence, s’ac­com­pa­gne du courage du dés­espoir : « L’ex­clu­sion entrave non seule­ment les débats, mais aus­si la con­nais­sance et l’évo­lu­tion. L’ex­clu­sion est l’ex­act opposé de l’in­clu­sion et de la diver­sité. L’ex­pul­sion et l’ex­clu­sion ne favorisent ni la tolérance ni la com­préhen­sion mais l’in­tolérance ». C’est d’une ironie presque trag­ique quand la lutte pour la diver­sité et l’in­clu­sion, pour la tolérance et la lib­erté des formes de vie, est menée avec les moyens de l’ex­clu­sion, de l’in­tolérance et du manque de lib­erté. L’in­vi­ta­tion de Döpfn­er au directeur général d’Uh­lala, Stu­art Bruce Cameron, pour représen­ter une con­tre-posi­tion, frise presque la témérité.

Source : Junge Frei­heit, 04/06/2022. Tra­duc­tion : AC

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