Nous reprenons un article de notre confrère germanique Junge Freiheit du 9 décembre 2020. Le magazine Der Spiegel (“Le miroir”) dispose de sa chaîne YouTube où ils diffusent entre autres des reportages sur la criminalité organisée et l’immigration, provoquant la réaction des journalistes immigrés. Certains intertitres sont de notre rédaction.
« Nouveaux acteurs »
« Les Nouveaux acteurs des médias allemands, ou NdM, ont accusé Spiegel TV, la chaîne de programmes sur YouTube du périodique national Der Spiegel, de produire des reportages racistes et déformés et lui ont décerné le prix, négatif, de la « Pomme de terre d’or ». Cette association de personnes issues de l’immigration a invoqué les reportages du Spiegel TV sur les récents crimes de clan comme raison : “Les reportages sur le crime organisé dans les médias allemands, en particulier sur Spiegel TV, sont déformés, stigmatisants et racistes”, indique NdM dans son message accompagnant le prix.
Spiegel TV aurait réduit ses reportages sur le crime organisé principalement aux clans, donnant l’impression que « les associations de type mafieux en Allemagne sont principalement des familles arabes ou gitanes ». Alors que l’Office fédéral de la police criminelle n’imputerait que 8% du crime organisé aux clans.
« Selon Spiegel TV l’Allemagne sombre dans le crime, de soi-disant clans dirigent des villes entières et l’État, faible, est impuissant face à cette évolution. Cela n’a rien à voir avec la réalité », se sont indignés les journalistes de NdM. Les déclarations des policiers seraient également acceptées sans réserve et leur manière de travailler ne serait pas surveillée correctement.
Pauvre Spiegel
Les reportages du Spiegel TV seraient :
Racistes. Car, selon NdM, dans ces reportages le racisme n’apparaîtrait généralement que sous la forme d’accusations sans fondement. Le fait que les gitans et les personnes d’origine arabe soient exposés au racisme serait rejeté comme une simple affirmation protectrice ne servant qu’à détourner l’attention du comportement criminel. Une partialité en elle-même raciste.
Stigmatisants. Par ailleurs, toujours selon NdM, tout membre d’une famille portant un nom suspect serait qualifié de criminel dans les rapports. Les « bars à chicha » (lieux où l’on fume le narguilé) seraient décrits comme des lieux suspects où les criminels se rencontrent. De nombreux restaurants et magasins de migrants seraient filmés et accompagnés de commentaires menaçants sur les « sociétés parallèles », bien que les commerçants n’aient aucun rapport avec le crime.
Unilatéraux. Les mêmes experts donneraient toujours le ton, sans nuances.
Indifférenciés. NdM toujours : qu’il s’agisse de poursuites en voiture, de bruit dans les hôpitaux, de vente de tabac au noir dans les bars ou de parking en double file, tout comportement peu glorieux de personnes d’origine arabe serait souvent lié par réflexe au «crime de clan» sans aucune justification.
Généralisants. Enfin, d’après ces mêmes journalistes, le terme « clan » apparaîtrait dans les médias allemands exclusivement ou presque, en rapport avec des familles arabes ou gitanes — en relation avec la criminalité. En revanche, certaines familles liées pour affaires se verraient rarement attribuer ce terme : personne ne parlerait du clan Aldi, par exemple.
Cependant, la critique ne s’applique pas seulement à Spiegel TV. Les reportages d’autres médias sur les crimes de clan, tels que ceux de RTL par exemple, ou du Nouveau Journal de Zürich pour ne pas donner ici la longue liste des médias supposés offensants, sont aussi pris dans le collimateur de NdM. Spiegel TV ne mériterait le prix que pour avoir surpassé de nombreux médias dans le genre négatif.
Pomme de terre en or
L’an dernier, plusieurs émissions de la radio du service public avaient été sélectionnées pour la « Pomme de terre d’or », les patrons d’émissions ayant, toujours selon NdM, à plusieurs reprises permis aux extrémistes de droite et aux racistes de s’exprimer.
Le racisme serait traité comme normal et les représentants des minorités ethniques et religieuses seraient rarement invités dans les émissions. Un « manque de diversité » selon NdM.
L’année précédente, la « Pomme de terre d’or » avait été décernée au périodique Bild pour “manque d’objectivité, pour préjugés et tactiques de peur en ce qui concerne les thèmes de l’intégration, de la migration et de l’asile, de deux poids deux mesures dans les rapports sur les personnes avec et sans origine migratoire et pour une vision fortement ethnocentrique de notre société d’immigration et de ses défis”.
NdM a aussi attiré l’attention en se proclamant gardien de la langue allemande, dictant aux journalistes des autres médias comment rendre compte de la crise de l’asile. Ainsi, à la place de «vague de réfugiés», il faudrait selon eux écrire «arrivée de migrants», au lieu de «demandeur d’asile» plutôt «réfugié». Et pour les personnes issues de familles immigrées, le terme «diversité culturelle» serait recommandé.
L’association est également financée par les fonds publics. Elle a reçu plus de deux millions d’euros du gouvernement fédéral ces dernières années. »
La liste des signataires
Mohamed Amjahid, Die Zeit, Berlin
Erkan Arikan, Deutsche Welle
Mo Asumang, Berlin
Dr. Mehmet Ata, Mediendienst Integration, Berlin
Ferda Ataman, Der Spiegel, Berlin
Gökalp Babayiğit, Süddeutsche Zeitung, München
Murad Bayraktar, WDR, Düsseldorf
Marco Bertolaso, Deutschlandfunk, Köln
Göksen Büyükbezci, ntv, Köln
Dr. Carmen Colinas, SWR, Frankfurt
Daniel Drepper, Buzzfeed, Berlin
Sineb El Masrar, Berlin
Kathrin Erdmann, NDR, Tokio
Ferdos Forudastan, Süddeutsche Zeitung, München
Tabea Grzeszyk, hostwirter, Berlin
Eren Güvercin, Quanatara, Leverkusen
Hadija Haruna, HR, Frankfurt/Main
Dunja Hayali, ZDF, Berlin
Diana Hodali, Deutsche-Welle-Akademie, Köln
Kemal Hür, Deutschlandradio, Berlin
Dr. Ranty Islam, Deutsche Welle, Berlin
Ian P. Johnson, Deutsche Welle
Melisa Karakus, renk, Berlin
Esra Karakaya, FUNK, Berlin
Chris Köver, netzpolitik.org, Berlin
Iva Krtalic, WDR, Köln
Veronica Laleye, NDR, Hamburg
Loay Mudhoon, Quantara.de, Köln
Nkechi Madubuko, 3sat, Mainz
Malcolm Ohanwe, BR, München
Gülseren Ölcüm, FUNK, Bremen
Prasanna Oommen-Hirschberg, Köln
Miltiadis Oulios, Köln
Khue Pham, Die Zeit, Hamburg
Prof. Ulrich Pätzold, Dortmund/Berlin