En tapant Junge Freiheit (hebdomadaire conservateur allemand NDR) sur Facebook, l’avertissement suivant apparaissait encore récemment : « Ces termes de recherche peuvent être associés à des groupes et individus extrémistes ».
Facebook travaille avec « des organisations qui aident à empêcher la propagation de la haine et de l’extrémisme violent ». Les utilisateurs de Facebook peuvent ainsi obtenir des informations auprès du « Violence Prevention Network/Réseau de prévention de la violence » (VPN).
En un clic de souris, vous accédez au site internet du réseau, une organisation non gouvernementale allemande active dans le domaine de la prévention de l’extrémisme et de la dé-radicalisation Entre-temps, la référence alarmante concernant Junge Freiheit a disparu. Cependant, elle continue d’apparaître lorsque l’on tape le nom de nombreuses organisations, associations et éditeurs du spectre conservateur ou de droite.
Qui ?
Qui détermine donc quelles organisations reçoivent la mention « extrémistes » ? Facebook ou le Violence Prevention Network ? Et selon quels critères ces avertissements sont-ils attribués ? On s’en serait douté : les demandes adressées à Facebook à ce sujet restent sans réponse ; la société, opaque, ne révèle des informations que dans les cas les plus rares. Trouver un contact direct est presque impossible. De même avec le Violence Prevention Network. Aucune réponse à nos demandes de renseignements par courriel pendant deux semaines. L’attaché de presse n’est pas joignable au téléphone car « actuellement en conférence » et « reviendra vers vous plus tard ». Mais aucun appel ne suit. Nouvel essai : l’attaché de presse est absent…
De l’exploitation de la peur supposée
…De tels avertissements sont “dégradants pour les fournisseurs commerciaux de médias et à l’encontre de nos lois sur la concurrence”, commente l’avocat Joachim Steinhöfel dans une interview accordée à Junge Freiheit. Il ajoute : « ils ne sont pas autorisés, même pour les prestataires à but non lucratif. Parce que, pour autant qu’on puisse le voir, ils n’ont aucune base contractuelle et semblent également violer les droits de la personne. Le problème est que presque personne ne s’en défend”. Le déséquilibre entre le monopole du non substituable et tout puissant Facebook et le simple utilisateur joue également un rôle ici », explique Maître Steinhöfel.
Ainsi, une ONG privée sert de portier de l’espace public et en règle l’accès. De tels avertissements peuvent naturellement effrayer un utilisateur non averti des réalités des réseaux sociaux, ce qui a également des conséquences économiques directes pour les médias concernés, ainsi marqués au fer rouge.
Qui est derrière le Violence Prevention Network ?
Alors, qu’est-ce que le Violence Prevention Network ?
Cette association, fondée en 2004, se veut « un réseau de spécialistes expérimentés qui œuvrent avec succès depuis des années dans la dé-radicalisation des criminels violents motivés par l’extrémisme, comme dans la prévention de l’extrémisme ». Depuis 2015, le réseau, centre de conseil pédagogique, est principalement financé par le programme « Démocratie vivante » du ministère fédéral de la Famille, des Aînés, de la Femme et de la Jeunesse. Il y a six ans, divers projets du réseau recevaient 330 000 € de subventions. Le total est passé à 340 000 € en 2016, puis à 1 875 130 € en 2017, 2 910 720 € en 2018 et enfin à 3 360 115 € pour 2019. Au cours des deux dernières années, l’organisation a reçu 2 932 419,86 € (2020), plus 3 005 891,70 € de fonds de projets, auxquels s’ajoutent, pour le financement de l’association, près de 455 000 € de subventions par an. Un soutien financier est également accordé par plusieurs Länder (n.d.t. = entités correspondant très approximativement à nos régions). Pour 2019, le réseau indique un budget total de 7 535 003,10 €. De quoi employer aujourd’hui plus de 100 salariés à temps plein.
L’association exerce également son influence en conseillant le gouvernement fédéral. L’année dernière, elle a participé aux audiences préliminaires de la « Commission gouvernementale pour la lutte contre l’extrémisme de droite et le racisme ». Une commission qui a décidé de la répartition de plus d’un milliard d’euros dans la « Lutte contre la droite ». Des représentants du réseau ont siégés au comité dirigé par le secrétaire d’État du ministère de l’Intérieur, Markus Kerber. L’accent a été mis, entre autres, sur « le renforcement de la coopération entre les autorités de sécurité, le pouvoir judiciaire, l’État et les organisations de la société civile » dans le domaine de la lutte contre l’extrémisme de droite et le racisme. Le compte rendu officiel de cette réunion, consultable sur le site internet du ministère fédéral de l’Intérieur, présente l’une des revendications centrales des participants : « La coopération entre les ONG et les organes exécutifs de l’État » devrait être « institutionnalisée », peut-on lire. Des organisations privées réclament donc plus d’influence sur un domaine de compétence de l’État.
Un “Violence Prevention Network” antipopuliste
Le réseau a su très tôt utiliser la focalisation du gouvernement fédéral actuel sur la « lutte contre la droite ». Dès 2015, il annonçait : « La montée en puissance des partis et mouvements populistes de droite tels que Pegida ou AfD force à mettre en œuvre davantage de projets visant l’extrémisme de droite. » Nouveaux projets, donc nouvelles subventions — pour Violence Prevention Network aussi.
L’accent est donc mis sur l’extrémisme de droite. L’association s’interroge dans ses brochures si le terme concerne aussi les « conservateurs nationalistes, la Nouvelle Droite, la Révolution Nationale ou Conservatrice », « ou s’il se limite simplement au national-socialisme et au néo-nazisme ». Le réseau veut non seulement former les esprits sur Internet mais aussi influencer tous les espaces publics — jusqu’aux jardins d’enfants : le projet « Early Birds » vise à lutter contre les discriminations dès l’âge préscolaire. Les éducateurs doivent être formés à traiter avec des parents « qui s’expriment et se comportent de manière discriminatoire, généralisée et désobligeante envers certains groupes de personnes ». « Islamophobie », « image négative des réfugiés/migrants », « populisme de droite » comme « extrémisme de droite » sont des mots clés.
Deuxième grand sujet du centre de conseil : l’islamisme — car il est « devenu clair que les cas de jeunes exposés à des processus de radicalisation islamiste sont en augmentation en Allemagne ». Le réseau offre des aides et des formations dans les prisons pour socialiser autant que possible les détenus islamistes, visant à dés-idéologiser les personnes radicalisées par le biais de projets éducatifs et effectue un travail d’information dans les mosquées.
Des employés pour le moins discutables
…L’irréalisme des travailleurs sociaux de ce réseau atteint parfois certaines limites, comme on a pu le constater lorsque le touriste Thomas L. a été assassiné à Dresde en 2020. L’agresseur afghan, qui avait poignardé des homosexuels avec un couteau par haine, était auparavant en prison où il avait été pris en charge par le réseau – ce qui ne l’a visiblement pas fait abandonner sa vision du monde selon l’islam. « Un risque résiduel demeure », a regretté ensuite le directeur général du Violence Prevention Network, Thomas Mücke, diplômé en pédagogie, dans un quotidien berlinois. « En ce qui concerne la dé-radicalisation, il faut supposer que des rechutes peuvent survenir. On ne peut pas éteindre tous les incendies, mais empêcher qu’ils se propagent comme un feu de paille ».
Source : Junge Freiheit, 09/08/2021. Traduction AC (nous avons un peu raccourci l’article original).