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Assassinat de J.F. Kennedy, une énigme et des fake news

10 décembre 2023

Temps de lecture : 6 minutes
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Assassinat de J.F. Kennedy, une énigme et des fake news

Temps de lecture : 6 minutes

22 novembre 1963, Kennedy est assassiné à Dallas. Depuis cette date des milliers d’articles, des dizaines de livres ont été consacrés à l’affaire. En-dehors de Lee Oswald, ont été incriminés la mafia, Fidel Castro, la CIA, les anti-castristes, le vice-président en fonction Lyndon Johnson et bien d’autres. François Carlier a consacré sa vie à élucider les circonstances de son assassinat entre légendes et fake news. Nous nous sommes entretenus avec l’auteur autour de son dernier livre, « L’assassinat de Kennedy expliqué, bilan définitif, après 60 ans » (Le Lys bleu).

Pourquoi vous êtes-vous pas­sion­né par l’assassinat de JFK ?

Tout a com­mencé par hasard, lorsque j’avais seule­ment 7 ans. Mes par­ents regar­daient la télévi­sion. J’é­tais dans la pièce. Le pro­gramme était un doc­u­men­taire sur l’as­sas­si­nat de Kennedy. J’ai été intrigué, puis fasciné, donc mar­qué par ce doc­u­men­taire. Je me sou­viens surtout du fait que cela sem­blait être une énigme, un mys­tère avec des ques­tions sans répons­es. Plus tard, j’ai voulu étudi­er cette affaire sim­ple­ment pour savoir la vérité. Il y a de nom­breuses ver­sions. Or, Kennedy n’est mort qu’une fois, et d’une seule manière. Il fal­lait donc réus­sir à sépar­er les faits de la fic­tion pour aboutir à la solu­tion. Ce par­cours fut pas­sion­nant et a néces­sité des années.

Com­ment avez-vous mené votre enquête et sur com­bi­en de temps ?

La pre­mière chose à faire est de se doc­u­menter, et cela pas­sait d’abord par les livres, surtout à une époque avant l’ar­rivée d’In­ter­net. Les pre­mières années, mes recherch­es se lim­i­taient à accu­muler des doc­u­ments, lire des livres, échang­er des cour­ri­ers avec des chercheurs améri­cains, regarder des vidéos (achat de cas­settes), enreg­istr­er des doc­u­men­taires télévisés, inter­roger des témoins de l’époque (quand j’avais leur adresse), vis­iter les lieux ayant rap­port à l’assassinat, ren­con­tr­er des auteurs et par­ticiper à des sym­po­siums à Dal­las. Puis mon tra­vail a gag­né en qual­ité. J’ai entamé un tra­vail de réflex­ion cri­tique. Après avoir tout lu, j’ai cher­ché à faire une syn­thèse, et surtout à véri­fi­er objec­tive­ment les affir­ma­tions. J’ai con­fron­té les thès­es et auteurs : con­fronta­tion des idées, échanges épis­to­laires avec chercheurs et témoins, mise au pied du mur de ceux qui par­lent sans prou­ver, lec­ture atten­tion­née et réfléchie des argu­ments de part et d’autre. Véri­fi­ca­tion, sélec­tion, élim­i­na­tion. Util­i­sa­tion des faits, de la logique et de la sci­ence. Jusqu’à aboutir à la vérité. Tout cela a pris une quin­zaine d’années.

Il existe de nom­breuses théories autour d’un pos­si­ble com­plot, quelles sont les principales ?

  • La piste des castristes
    C’est-à-dire, ni plus ni moins, celle de Fidel Cas­tro, insti­ga­teur d’un com­plot pour se venger des manœu­vres secrètes de la CIA pour l’élim­in­er, qui n’étaient pas ignorées de Kennedy.
  • La piste des anticastristes
    Adver­saires idéologiques de la révo­lu­tion cubaine, les anti­cas­tristes veu­lent ren­vers­er Cas­tro et veu­lent assas­sin­er le prési­dent Kennedy pour lui faire pay­er ce qu’ils voient comme sa trahi­son à refuser un sou­tien aérien lors de l’opération de la Baie des Cochons, qui a tourné au fiasco.
  • La piste de la CIA
    La CIA craig­nait de voir sa puis­sance dimin­uer par l’ac­tion du prési­dent (qui avait une vision poli­tique opposée) et aurait donc voulu pren­dre les devants.
  • La piste des Russes/du KGB
    En pleine guerre froide, après le recul lors de la crise des mis­siles de Cuba, l’année précé­dente, les Russ­es ont pu vouloir se venger et sauver leur honneur.
  • La piste de la mafia
    Le min­istre de la Jus­tice Robert Kennedy, avec l’appui de son frère John, prési­dent, menait une lutte sévère con­tre le crime organ­isé. La mafia a peut-être voulu élim­in­er cet adver­saire. Assas­sin­er le prési­dent enl­e­vait de fac­to le pou­voir au min­istre de la Justice.
  • La piste du vice-prési­dent Lyn­don Johnson
    Cherche à qui prof­ite le crime… Si le prési­dent meurt, alors le vice-prési­dent, par le jeu des insti­tu­tions améri­caines, lui suc­cède. Un tel poste nour­rit les ambi­tions les plus folles ! John­son n’avait que la famille Kennedy sur sa route pour accéder au poste de prési­dent. Élim­in­er JFK lui per­me­t­tait d’ac­céder au poste tant convoité !
  • La piste du com­plexe militaro-industriel
    Toute l’in­dus­trie de l’arme­ment et ses entre­pris­es ont besoin d’une guerre pour relancer son activ­ité et engranger des mil­liards de dol­lars. Sans compter leurs opin­ions expan­sion­nistes. Ils veu­lent faire la guerre au Viet­nam, mais craig­nent que Kennedy y renonce. Elim­in­er Kennedy per­me­t­trait de faire la guerre.
  • Il existe d’autres théories encore. Mais aucune n’a fait ses preuves. S’il est légitime d’émet­tre des hypothès­es, et si on ne peut nier que des indi­vidus ou groupes con­sti­tués aient pu désir­er la mort de Kennedy avec la défense de leurs intérêts en tête, il est aujour­d’hui incon­testable que mal­gré les recherch­es, jamais aucune de ces hypothès­es n’a pu être établie un tant soit peu. Nulle trace n’a jamais été trou­vée. Qui plus est, il existe quan­tité d’ar­gu­ments qui vont à l’en­con­tre de cha­cune de ces hypothès­es. Les témoins de l’époque et proches de la vic­time sont caté­goriques dans leur rejet de ces théories.

Vous con­cluez à l’acte d’un tireur isolé, pourquoi ?

Parce que les faits bruts mènent à cette con­clu­sion impa­ra­ble ! La logique + les faits observés + les véri­fi­ca­tions sci­en­tifiques menées indépen­dam­ment durant ces soix­ante dernières années, tout amène à cette con­clu­sion, avec un niveau de cer­ti­tude élevé ! Toutes les traces relevées sur place pointent vers un seul tireur, Lee Oswald, à par­tir du 5e étage du bâti­ment où il tra­vail­lait. Rien n’a jamais été trou­vé qui puisse envis­ager autre chose, ailleurs. Pour­tant, depuis 60 ans, des dizaines de chercheurs acharnés ont con­sacré leur temps à décou­vrir d’autres pistes. Mais per­son­ne n’a jamais rien trou­vé. Je me rends à l’évidence.

Quelles ont été les moti­va­tions d’Oswald ?

Autant je peux être caté­gorique lorsqu’il s’ag­it de présen­ter des faits avérés ou les résul­tats d’une expéri­ence sci­en­tifique, autant je reste hum­ble et réservé lorsqu’il s’ag­it de don­ner un avis sur les pen­sées d’un homme qui est mort sans laiss­er le moin­dre tes­ta­ment. Lee Oswald n’a jamais par­lé de son pro­jet (pas même à son épouse) et n’a même pas voulu recon­naitre son geste devant la police. Per­son­ne, jamais, ne pour­ra pré­ten­dre être son porte-parole. Néan­moins, on peut dire, à la lec­ture de son jour­nal intime et en étu­di­ant son par­cours et ses déc­la­ra­tions de son vivant, qu’il a voulu tuer le représen­tant du monde occi­den­tal cap­i­tal­iste, sys­tème qu’il détes­tait poli­tique­ment, lui qui se voulait un révo­lu­tion­naire com­mu­niste. Il voulait avoir un impact en faveur de sa cause.

François Car­li­er, L’assassinat de Kennedy expliqué, bilan défini­tif après 60 ans, Le Lys bleu, 2023, 27€.

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