À l’approche des élections américaines de mi-mandat, et en son numéro du 24 octobre 2018, le magazine Les Inrockuptibles proposait une « Enquête sur les héritiers d’Obama ». Analyse.
L’enquête porte plus précisément sur « les bébés d’Obama ». Un dossier que Jean-Marie Pottier, introduit ainsi : « Dix ans après la victoire de Barack Obama, une quarantaine de ses disciples sont candidats aux élections de mi-mandat du 6 novembre dans un paysage politique dévasté par la victoire de Trump. Ou plane encore, deux ans après son départ, l’ombre de l’ancien président ». OJIM, pardonne-leur, je te prie, ils ne savent pas ce qu’ils font ! La sémantique de cette simple introduction révèle un certain état de confusion mentale (pas nouveau) aux Inrockuptibles : Obama en gourou/Jésus dont la stature hautement messianique planerait toujours au-dessus des Etats-Unis, ayant des « disciples » face au diablotin Trump le paysage est infernal « dévasté ». Les Inrockuptibles ou « Obama bless America », en somme.
In Obama, they trust !
On peut croiser l’auteur de l’article par ailleurs, et comme il se doit , dans So Foot, sur France Inter et dans Slate, en famille. Ici, l’objet de l’enquête est de faire ressentir au lecteur une sorte de nostalgiobamania. Cela commence par le témoignage d’une supportrice d’Hillary Clinton en 2016„ laquelle devait accoucher le jour de l’élection de sa championne… mais, Hillary battue, Trump élu, son bébé est « finalement arrivé plus tard ». Au sein de la rédaction des Inrockuptibles, personne ne doute que l’élection de Trump a (au moins) bouleversé l’ordre de la nature. La maman est maintenant candidate démocrate en Californie. Selon « l’organisation Obama Alumni, qui revendique 15 000 membres » (n’oublions pas que nous parlons d’un pays continent), les initiatives des anciens proches d’Obama se seraient multipliées, dont une quarantaine de candidatures aux prochaines élections, dans le souci de combattre le Mal, pardon le Trump. Il y en aurait même quatorze, rien que cela, candidats à la Chambre des représentants. Pourquoi ? « Nous devons nous sauver nous-mêmes », dit l’un. Rien de moins. Il y a de l’intimité, ainsi : « Mon père est nigérian, ma mère est une blanche du Kansas, ma femme s’appelle Michèle et nous sommes tous les deux avocats. Quand j’ai passé mon entretien d’embauche avec Barack, il m’a dit en riant : « Vous êtes qui, mon frère ? ». Les souvenirs des années Obama « se transforment souvent en récits de vie mêlant l’intime et la politique ».
Obama, nombril du monde
Le monde des bobos, en somme, autocentrés sur un nombril confondu avec l’axe du monde. Une petite touche au sujet de l’obamacare et de tous ces américains séropositifs qui ont cru en l’advenue du Messie, ayant reçu l’onction Prix Nobel pour cause de couleur de peau, un critère comme un autre sans doute. Puis l’article insiste sur le fait que l’ancien président est plus populaire (60 %) que le nouveau (45 %). Sans pourtant remarquer, que 45 % d’opinions favorables pour un président américain, à mi-mandat, cela tient de l’exploit. Ce que l’auteur de l’article ne peut pas faire remarquer puisqu’il obère un fait, un président Trump populaire. La réalité imposée ici est celle d’un nouveau culte, la nouvelle Église obamanienne.
L’avant garde du Bien
Ce que remarque Pottier, c’est que les candidats démocrates se référant à Obama forment un groupe à la fois multiculturel et fortement féminisé, ils seraient ainsi une sorte d’avant-garde du Bien en marche outre-Atlantique. Un témoin confirme que tout va mieux « avec toutes ces femmes et ces hommes de couleur qui se présentent ». Il y aurait un avenir puisque les minorités ethniques, la gauche de la gauche du parti démocrate, ont de plus en plus de candidats, contre les vieux mâles blancs (qui hélas écument aussi ce parti), et que cela pourrait faire naître « un nouvel Obama en 2022 ». Quand il est démocrate, social libéral et libéral culturel, le messianisme ne choque pas. C’est que « Face à un Joe Biden ou un Bernie Sanders qui affichent le même profil (mâle, blanc, âgé, hétéro ?), certains plaident pour jouer le contraste ou le saut de génération ». Bien sûr, dans ce magazine, parler de « contraste » au sujet de couleurs de peau n’a rien de racialiste. Refuser un candidat parce qu’il est blanc et « mâle » ne pose pas de problème, par contre celui qui refuserait une candidate noire et jeune…Les voies des Inrockuptibles sont impénétrables, ou le contraire. Le nec plus ultra reste « la fille d’un père jamaïcain et d’une mère indienne », un surprenant critère de compétence politique.
Les Inrockuptibles, un hebdomadaire étonnant, dont chaque sortie semble destinée à montrer à quel point le paysage médiatique est coupé du paysage humain réel, y compris quand il parle des États-Unis. Les racines (autres que issues des minorités), sont interdites aux Inrockuptibles, alors on prend ses rêves messianiques pour des réalités. Les lendemains de cuite ou de joint seront peut-être douloureux…