En mars dernier, Buzzfeed exhumait une vieille affaire de violences impliquant Jean-Michel Baylet, ancien patron de La Dépêche du midi et actuel ministre. Mardi, c’est la députée écologiste Isabelle Attard qui remettait, en pleine Assemblée nationale, l’affaire sur le tapis.
« Monsieur le ministre, comment osez-vous encore vous présenter à l’Assemblée nationale ? », a‑t-elle lancé dans un hémicycle quasiment vide. Profitant des débats sur le projet de loi de développement et de protection des territoires de montagne, porté par Baylet, la députée a interpellé le ministre sur son temps de parole, rarement médiatisé.
« Monsieur le ministre, le président de la République a dit vouloir un gouvernement exemplaire, et que la lutte contre les violences faites aux femmes est une exigence », a‑t-elle ajouté avant d’en venir aux faits : « Et pourtant, le 11 février 2002, Monsieur le ministre, vous étiez encore sénateur du Tarn-et-Garonne, quand votre collaboratrice parlementaire a porté plainte contre vous à la gendarmerie de Toulouse. Elle était à votre domicile, lorsque vous l’avez frappée, au visage, à plusieurs reprises, Monsieur le ministre. Vous avez enfermé votre collaboratrice chez vous, et vous l’avez contrainte, sous la menace de nouveaux coups, à rédiger sous votre dictée une lettre de démission, Monsieur le ministre. Vous avez chassé votre collaboratrice de chez vous, en pleine nuit, entièrement dévêtue et pieds nus. »
À plusieurs reprises, son micro a été coupé. Mais l’élue est allée jusqu’au bout de son intervention, qu’elle a d’ailleurs terminée sans micro. De son côté, Baylet s’est contenté de répondre froidement : « On peut tout romancer mais il y a eu une instruction judiciaire dans cette affaire et elle a été classée sans suite. Le procureur de la république n’aurait jamais classé si les choses s’étaient déroulées comme vous l’avez dit. »
Pourtant, c’est bien ce qu’avait rapporté BuzzFeed en mars dernier. Se basant sur des PV d’auditions, le site d’actualité expliquait que, certes, l’affaire avait été classée sans suite, mais que cela s’expliquait par le fait que la collaboratrice de l’ancien sénateur avait retiré subitement sa plainte. En cause, selon BuzzFeed : une transaction financière secrète entre elle et son ancien patron. Notons que Jean-Michel Baylet n’a jamais contesté les faits qui lui étaient reprochés. Certes, celui-ci a bien attaqué plusieurs journaux, mais pour « atteinte à la vie privée » et non pour « diffamation ». Pour la députée écologiste, il s’agit là d’un aveu de culpabilité…
Aujourd’hui, l’ancien sénateur est confortablement installé au poste de ministre de l’Aménagement du territoire, de la Ruralité et des Collectivités territoriale ; mais il lui aura fallu des longues années avant de parvenir à ses fins. Au début du quinquennat, il était mis en examen pour favoritisme. Au printemps 2014, il n’a pas pu rejoindre le nouveau gouvernement Valls à cause d’une autre mise en examen dans une affaire de frais de bouche. Sa récente nomination en tant que ministre aura été une consécration, mais les affaires semblent lui coller à la peau, comme on le voit avec le retour de cette histoire embarrassante qui remonte à plus de 10 ans.
S’il n’est plus, charge gouvernementale oblige, le patron de la Dépêche du Midi, c’est néanmoins son ex-femme qui lui a succédé à la tête du journal, Marie-France Marchand-Baylet, actuelle épouse de Laurent Fabius… Ainsi, lors de sa nomination au gouvernement, la Dépêche avait été le seul titre à applaudir le remaniement du gouvernement.
Crédit photo : Parti socialiste via Flickr (cc)