On ne prête qu’aux riches, dit le dicton. Il faut être très riche pour s’offrir un titre de la presse quotidienne nationale pourrait devenir un autre proverbe. Si vous avez un peu moins de 600 millions d’euros de côté, vous pourriez vous offrir Le Parisien/Aujourd’hui en France, un titre national qui dispose d’une bonne influence. Par ici la monnaie et la visite.
Amaury jette l’éponge, Arnault rachète
En 2016, la famille Amaury décide de se recentrer sur L’Équipe et ses activités (Tour de France, chaîne télé, etc). Et vend pour un peu moins de 90M d’euros la totalité des activités du groupe Le Parisien : journal, immobilier, distribution, web. À peine installé, LVMH optimise la trésorerie du journal en l’envoyant bronzer sous le soleil de sa filiale financière belge. Avec un intérêt fiscal évident.
Vous n’auriez pas 80M€ ?
Vous devez les avoir ! Cette somme (un peu faible, reconnaissons le) vous permettra de regonfler en décembre 2018 la trésorerie du titre que vous avez racheté un peu plus de deux ans plus tôt. Si tout se passe bien (ou pas trop mal), vous devriez éponger les pertes de 2018 (non connues en février 2019) et celles de 2019, l’année en cours. Plus sans doute quelques investissements dans le numérique
Passez par la case départ et versez 440M€
Contrairement au Monopoly, vous ne touchez pas quelque chose en repassant par la case départ. Vous remettez au pot. C’est la Lettre A du 15 février 2019 qui nous l’apprend. UFIPAR, une des holdings du groupe LVMH est le véhicule financier qui possède Le Parisien. Cette holding vient de se livrer à ce que l’on appelle une « opération accordéon ». Pour faire simple, vous augmentez le capital en injectant une somme qui correspond aux pertes antérieures, puis vous réduisez le capital d’autant, les pertes sont alors apurées. C’est ce qu’a fait UFIPAR augmentant le capital de 440M€, le portant de 520M€ à 960M€ puis le réduisant d’autant, la dette est apurée.
Pourquoi tant d’argent
LVMH est dans le trio de tête des aides directes à la presse pour la période 2012/2017 avec la coquette somme de 65 millions d’euros. Ce qui corrobore notre premier dicton, on ne prête (et subventionne) qu’aux riches. Mais si on fait le total, 90M de rachat+ 80M en trésorerie+440M pour apurer les pertes, cela fait quelques 610M€. Comme les espoirs de profits sont maigres, la morale de l’histoire est claire : si Bernard Arnault investit des sommes importantes dans les médias ce n’est pas pour dégager un profit mais pour gagner en influence. Une influence qui lui permet de défendre à la fois son empire économique et de se faire quelques amitiés utiles en politique. À ne pas oublier quand vous lisez Le Parisien ou Les Échos.