Le jeudi 12 juillet 2018, lors des débats relatifs à la réforme de la Constitution, le premier amendement adopté par les représentants du peuple Français supprimait le mot « race » de l’article 1er de la Constitution, et affirmait l’égalité « sans distinction de sexe », autrement dit le rejet des discriminations dites de genre. Ainsi, deux des principaux combats des minorités idéologiques agissantes en France trouvaient un débouché constitutionnel : le féminisme radical, au point d’en être ridicule, l’antiracisme autrefois inventé par Mitterrand et ses amis. Cette première modification de la Constitution prend place dans le cadre d’une réforme constitutionnelle plus large, réforme qui provoque bien des débats, y compris au sujet des deux modifications évoquées. En particulier dans la presse jusque-là très favorable au président de la République actuelle, comme dans Libération, Le Monde ou le Huffingtonpost. Le plus étonnant n’est pourtant pas le fait de retirer le mot « race » de la Constitution, mais plutôt ceci : ce retrait va à l’encontre de tout ce que l’idéologie actuellement dominante et au pouvoir promeut au quotidien, à commencer par la promotion de toutes les identités autres qu’européennes, et du multiculturalisme comme mode de vie. Un exemple ? La chaîne de télévision Bet, qui s’affirme « 100 % noire ».
Il y a des Blancs et des Noirs, oui ou non ?
L’observateur aimerait bien être éclairé à ce propos, tant le décalage paraît grand entre ce qui se produit dans le pays réel (les rues des villes), la société médiatique (ici, Bet) et les votes des députés. Officiellement, il n’y a pas de races puisque la Constitution a été révisée, et le racisme est d’ailleurs un délit amplement puni par la loi. S’il n’y a pas de races, il n’y a pas de différences de nature entre les êtres humains. S’il n’y a pas de différences de nature entre les êtres humains, il ne saurait donc y avoir de chaîne de télévision « 100 % noire » ; la chose étant par nature impossible puisque il n’existe pas d’humains blancs ou noirs mais simplement des humains. Pourtant il y a Bet. On en perdrait presque le peu de latin qui reste, pour peu qu’il en reste.
Bet, c’est quoi ?
Une chaîne de télévision américaine, uniquement consacrée à la culture noire et afro, débarquée en France depuis 2012. D’abord modestement, sur MTV. Puis de façon autonome, à compter de 2015. La chaîne ne s’intéresse pas aux autres cultures, ni aux autres couleurs de peau (couleurs qui pour le coup, du point de vue de Bet, existent bel et bien). Uniquement à la culture de personnes ayant la peau supposément noire, le tout dans un contexte officiellement non racialiste. Un peu comme lors de la fête de la musique du 21 juin 2018 à l’Élysée. La chaîne diffuse des séries, des talk-shows, des documentaires, des émissions de télé réalité, des cérémonies. Comme les « Bet Awards ». Bet, c’est pour « Black Entertainment Télévision ». Il y a donc ainsi, avec les Awards, dans un monde sans races ni discriminations, une télévision uniquement noire qui organise une cérémonie de récompenses, cérémonie qui ne récompense que des personnes noires et parce qu’elles sont noires. En 2015, Télérama considérait que tout cela était une « bonne nouvelle ». Peu surprenant. Au début cependant, Bet manquait… de Noirs à l’antenne, ce qui a provoqué une polémique. En particulier dans Le Monde, mais dans ses pages… Le Monde Afrique, ce qui tout de même ne manque pas de piquant.
Le temps des héros !
Pour éteindre le feu, la chaîne fit alors appel à Rokhaya Diallo, ce qui est un gage évident d’ouverture d’esprit. La présentatrice s’est souvent illustrée par la finesse de sa réflexion, ainsi au sujet des pansements, trop blancs de son point de vue. Des pansements racistes, en somme. Ce qui évidemment laisse perplexe, dans un contexte où, la Constitution l’affirme, les races n’existent pas. Il est vrai que madame Diallo considère qu’il y a en France un « racisme d’État », tandis qu’il ne lui semble pas évident que d’être la tête d’affiche d’une chaîne à vocation exclusivement noire a quelque chose d’un « racisme de média ». Une personnalité « racisée » (c’est le vocabulaire de ces milieux-là) travaillant dans un média racialiste (uniquement noir) haute en couleur, si l’on ose.
Madame Diallo n’est cependant pas la seule star de Bet France. Il y a aussi l’homme araignée malien, Mamoudou Gassama ; le clandestin malien a été filmé en train de récupérer un enfant sur un balcon, après avoir escaladé la façade d’un immeuble. Il demandait l’asile politique en France, ce qui ne l’empêche pas d’être ensuite reçu en grande pompe au Mali, son pays natal. Le caractère exceptionnel de cet événement est à noter : il n’est pas fréquent qu’un « réfugié politique », ayant quitté son pays d’origine, ici le Mali, pour des raisons… politiques, donc, soit reçu avec tous les honneurs par le chef de l’État dont il s’est enfui. Reste que Gassama a connu d’autres honneurs, ceux des 18e Bet Awards 2018, à Los Angeles, en présence d’une Rokhaya Diallo en robe longue. Mamoudou a été primé. Ce dernier lien est intéressant à suivre, c’est un média militant en faveur de la régularisation des clandestins en Europe. En descendant sur la page, l’on s’apercevra que le média en question (Studio Tamani, « toutes le voix du Mali ») est financé par l’Union Européenne, la Suède et la Suisse.
Ainsi, autour de Bet France, tout est racialisé. Dans un pays qui vient de retirer le mot race de sa constitution, qui affirme que les hommes « naissent libres et égaux », que les discriminations fondées sur la couleur de peau sont un délit, un tel média ne fait-il pas tache ? La couleur au choix de chacun et chacune.