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Campagne d’opinion contre Frontex : les médias de grand chemin au rendez-vous

1 février 2021

Temps de lecture : 7 minutes
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Campagne d’opinion contre Frontex : les médias de grand chemin au rendez-vous

Temps de lecture : 7 minutes

Dans un article publié par le site d’investigation Bellingcat et l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, l’agence Frontex a récemment été mise en cause pour avoir pratiqué des refoulements de clandestins en mer Méditerranée. Ces critiques contre Frontex s’inscrivent dans une campagne d’opinion menée depuis plusieurs années par des O.N.G. no-border qui bénéficient de puissants relais parmi les médias de grand chemin.

Fron­tex, l’a­gence européenne de garde-fron­tières et de garde-côtes, a un rôle par­ti­c­ulière­ment impor­tant dans la péri­ode actuelle, tant la pres­sion de l’immigration clan­des­tine est forte en Europe. Mais le tra­vail de Fron­tex n’est pas un long fleuve tran­quille. L’agence fait l’objet depuis plusieurs années d’une cam­pagne de dén­i­gre­ment qua­si per­ma­nente venant d’associations et d’O.N.G. immi­gra­tionnistes. Les médias de grand chemin en sont fréquem­ment le relais.

Entre Frontex et les O.N.G., des critiques de part et d’autre par médias interposés

Les rela­tions entre Fron­tex et de nom­breuses O.N.G. immi­gra­tionnistes sont exécrables depuis de nom­breuses années. Les cri­tiques pleu­vent d’un côté comme de l’autre par médias interposés.

Début 2017, le patron de l’agence, Fab­rice Leg­geri, affir­mait dans une inter­view au jour­nal alle­mand Die Welt que des O.N.G. encour­ageaient le traf­ic de migrants en Méditer­ranée et coopéraient insuff­isam­ment avec la police. La pub­li­ca­tion du rap­port de Fron­tex sur l’analyse des risques en 2017 n’a fait que détéri­or­er ces rela­tions. Sur la base d’observations de ter­rain, l’agence y soulig­nait que des opéra­tions de « sauve­tage » de bateaux chargés de clan­des­tins ont été effec­tuées par des O.N.G. sans appel de détresse et sans infor­ma­tion des autorités sur le lieu de sauve­tage. L’activité de sauve­tage et de recherche à prox­im­ité et par­fois dans les eaux ter­ri­to­ri­ales libyenne y est décrite comme un puis­sant fac­teur d’attraction pour les passeurs de migrants (« pull factor »).

De leur côté, plusieurs O.N.G. et des asso­ci­a­tions immi­gra­tionnistes mènent un véri­ta­ble tra­vail de sape con­tre l’activité de Fron­tex visant à juguler l’immigration clan­des­tine, en par­ti­c­uli­er en mer Méditer­ranée. A par­tir de 2012, le réseau Migreu­rop a organ­isé une cam­pagne auprès de l’opinion publique visant rien de moins que la sup­pres­sion de Fron­tex. Peu après, un cam­pagne appelée « Fron­tex­it » a été lancée à par­tir de mars 2013 pour recenser les « vio­la­tions des droits humains » par cer­tains de ses agents.

Les médias de grand chemin sont fréquem­ment des relais effi­caces de ces cam­pagnes d’opinion, nom­bre de leurs jour­nal­istes partageant les con­vic­tions des no-bor­der. On ne compte plus les arti­cles accu­sant dès 2007 Fron­tex de pra­ti­quer une « chas­se à l’homme » (Le Monde diplo­ma­tique), de béné­fici­er d’un « océan d’impunité » (Poli­tis en mars 2019), etc.

L’enquête du Spiegel et de Bellingcat

Dernier épisode en date, l’hebdomadaire alle­mand Der Spiegel et le site d’investigation Belling­cat ont mené une enquête sur les refoule­ments « illé­gaux » de clan­des­tins par Fron­tex en mer Egée, entre la Turquie et la Grèce. Se bas­ant sur l’exploitation d’informations en accès libre et sur des témoignages d’O.N.G., Belling­cat accuse dans un arti­cle mis en ligne l’agence Fron­tex d’avoir pra­tiqué plusieurs refoule­ments de clan­des­tins entre le mois d’avril et d’août 2020. Ces accu­sa­tions ont été repris­es par Der Spiegel dans un arti­cle du 22 octo­bre 2020. A la suite de la pub­li­ca­tion de ces arti­cles, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a dili­gen­té une enquête au sein de l’agence. Et les tra­cas de Fron­tex et de son directeur ne sont pas terminés…

Interdiction du refoulement ou protection de l’intégrité du territoire, il faut choisir

L’argument cen­tral des accu­sa­tions du Spiegel et de Belling­cat dans leurs arti­cles est que Fron­tex aurait pra­tiqué des refoule­ments en mer, entre la Turquie et la Grèce, sans que les migrants soient infor­més de leurs droits ou aient pu les faire val­oir (demande d’asile, etc.). Le principe du non refoule­ment a dans l’Union européenne plusieurs fonde­ments juridiques : Code fron­tières Schen­gen, Charte des droits fon­da­men­taux de l’UE, TFUE, Con­ven­tion de Genève de 1951. Mais il ne s’applique que quand un risque existe qu’un indi­vidu soit soumis à une per­sé­cu­tion, à de la tor­ture ou à des traite­ments dégradants.

Ce droit peut, par une inter­pré­ta­tion exces­sive­ment favor­able aux clan­des­tins, s’opposer à celui de pro­téger l’intégrité du ter­ri­toire d’un pays con­tre des entrées clan­des­tines. Alors qu’à l’origine, il s’agissait d’éviter qu’un réfugié subisse des sévices s’il était refoulé, cette dis­po­si­tion est désor­mais util­isée comme un moyen de pren­dre pied dans l’Union Européenne et plus large­ment dans l’espace Schen­gen. Aucun média de grand chemin ne s’interroge dans les arti­cles à ce sujet sur la rai­son pour laque­lle les migrants venant de Turquie n’ont pas fait une demande d’asile dans ce pays dans l’un des nom­breux con­sulats ou ambas­sades de pays européens. Le droit impre­scriptible de faire une demande d’asile, même dans un bateau clan­des­tin en haute mer, est érigé sans débat en principe absolu.

L’Open Society de Soros en embuscade

Les jour­nal­istes du Spiegel pré­cisent à la fin de leur arti­cle que leur enquête a été financée par l’Investigative Jour­nal­ism for Europe (IJFO), une fon­da­tion qui sou­tient le jour­nal­isme d’investigation dans l’Union européenne. L’IJFO ne cache pas sur son site avoir comme co-financeur l’Open Soci­ety Foun­da­tions et… la com­mis­sion européenne.

Le site d’investigation Belling­cat a quant à lui reçu entre 2016 et 2018 383 000 dol­lars de l’Open Soci­ety Foun­da­tions. Il fait par­tie du « Glob­al Inves­tiga­tive Jour­nal­ism Net­work », dont la voca­tion est la for­ma­tion et l’échange d’informations entre jour­nal­istes d’investigation. Cette asso­ci­a­tion a reçu entre 2017 et 2019 1,1 mil­lion de dol­lars de l’Open Soci­ety Foundations.

Le créa­teur de l’Open Soci­ety Foun­da­tions n’est autre que le mil­liar­daire améri­cain George Soros, qui a abondé selon le New York Times sa tré­sorerie de la mod­ique somme de 18 mil­liards de dol­lars en 2017. Le Project Syn­di­cate fait par­tie de la même galaxie.

George Soros a de grands pro­jets pour l’Europe : dans une tri­bune parue en 2015, il expo­sait sa vision du sys­tème européen de demande d’asile. Il pré­con­i­sait l’accueil dans l’Union Européenne d’au moins un mil­lion de deman­deurs d’asile par an. Si George Soros n’a prob­a­ble­ment pas été à l’initiative de l’enquête de Belling­cat et du Spiegel ni n’est inter­venu sur son con­tenu édi­to­r­i­al, on ne peut pas écarter que les jour­nal­istes aient cher­ché, par le choix du sujet et son traite­ment, à s’inscrire dans l’orientation idéologique de l’Open Soci­ety et de son mécène. L’influence de l’Open Soci­ety est égale­ment notable dans le « con­seil de sur­veil­lance » mon­di­al de Face­book. Sans compter ses com­plic­ités à la Cour Européenne des droits de l’homme.

Premiers résultats

L’accumulation de cri­tiques con­tre les agents de Fron­tex qui ont la dif­fi­cile mis­sion de pro­téger les fron­tières extérieures de l’Europe et la cam­pagne d’opinion que les O.N.G. ont su trans­former en cam­pagne de presse ont des résul­tats d’ores et déjà tangibles :

  • Le 13 jan­vi­er, Le Figaro annonçait que « l’Of­fice européen de lutte antifraude a con­fir­mé lun­di 11 jan­vi­er men­er une enquête et avoir perqui­si­tion­né les locaux de l’a­gence durant le mois de décem­bre ».
  • Ouest-France nous informe le 29 jan­vi­er que « des eurodéputés vont enquêter sur Fron­tex, l’agence étant accusée d’avoir pra­tiqué des refoule­ments illé­gaux ».
  • Peut-être pour don­ner des gages au puis­sant lob­by immi­gra­tionniste en Europe, Fron­tex annonçait le même jour sus­pendre ses opéra­tions en Hon­grie « pour dénon­cer son sys­tème d’asile » selon 20 Min­utes.

Dans ce con­cert de préoc­cu­pa­tions human­i­taires et de beaux principes, aucun média de grand chemin ne souligne la con­tra­dic­tion entre la mis­sion de Fron­tex d’éviter les entrées clan­des­tines dans les pays européens et l’interdiction qui lui est faite de refouler des clan­des­tins qui ten­tent d’arriver illé­gale­ment sur les côtes européennes. Quant au sig­nal que ces annonces envoient aux mil­lions d’Africains sur le point d’émigrer, n’en par­lons pas. Une affaire ron­de­ment menée.

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