Première diffusion le 8 juin 2023
Établissement renommé internationalement, reconnu par la Conférence des Grandes Écoles (CGE), le Celsa est « l’École des hautes études en sciences de l’information et de la communication ». Créée en 1957 à l’initiative d’universitaires et de chefs d’entreprises, elle est aujourd’hui intégrée à Sorbonne Université.
S’adressant aux étudiants (formation initiale et apprentissage) comme aux professionnels (formation continue), elle dispense des formations en journalisme, communication, marketing, publicité, médias, ressources humaines, et délivre les diplômes de Licence, Master, Doctorat, Magistère et MBA. En son sein, l’école de journalisme a été fondée en 1979 et reconnue par la profession dès 1981.
Un projet « libéral et humaniste »
Se voulant en adéquation étroite avec le monde professionnel et à la pointe des nouvelles technologies, le Celsa souhaite être une « passerelle » et un « lieu de rencontres » entre les différents acteurs du monde de l’information et de la communication. Se félicitant d’accueillir un public diversifié (ce qui ne saute toutefois pas aux yeux si l’on en croit le témoignage d’anciens élèves) et de favoriser l’ouverture et la mobilité internationale, l’école affirme être porteuse d’un projet « libéral et humaniste ».
Un humanisme qui n’exclut pas l’élitisme, le concours d’entrée étant considéré comme très sélectif (environ une trentaine d’admission pour près de 1000 candidats). Parmi les heureux élus ayant fréquenté l’établissement, on peut citer Christophe Beaugrand, Frédéric Beigbeder, Sidonie Bonnec, Pascale Clark, Bernard de La Villardière, Anne-Élisabeth Lemoine, ou Delphine Horvilleur… Un carnet d’adresses qui est l’une des richesses et des forces de l’école, le « réseau » étant fondamental pour la carrière des futurs journalistes (l’association des « anciens et amis du Celsa » — Celsa Alumini — compte plus de 10 000 adhérents).
Le témoignage de Stéphanie (le prénom a été changé)
L’aspect libéral quant à lui, selon l’ancienne élève Stéphanie B., se concrétise par une relative « neutralité » des enseignements.
« Je n’ai jamais vraiment ressenti, au cours de mon cursus, de pression idéologique ou politique. Bien sûr il y a une sorte de doxa dominante, mais elle est plutôt libérale. On baigne dans l’air du temps et il ne faut pas dépasser les limites de la « bienséance » politiquement correcte mais le gauchisme et le wokisme sont sensiblement moins omniprésents qu’à la fac de lettres que j’ai également fréquentée… Au Celsa, on peut lire le Figaro sans recevoir des cailloux… Bon, il ne faut pas non plus aller beaucoup plus à droite… Mais tant que l’on ne remet pas en cause les dogmes du libéralisme, tout va bien…» explique-t-elle.
Une option « libérale » que confirme le profil des enseignants associés en charge actuellement de la formation en journalisme : Arnaud Le Gal, rédacteur en chef des Échos, Alain Guillemoles, chef de rubrique La Croix et Ivan Valerio, rédacteur en chef de BFMTV.com. Mais d’autres profils de professeurs sont plus conformes à ce qui se fait dans la plupart des écoles de journalisme, comme le note un autre témoignage.
Et celui d’Étienne (le prénom a été changé)
Celui-ci fait part d’une neutralité toute relative. Sur une trentaine d’élèves de sa promotion, deux peuvent être classés à droite, un au centre, tous les autres sont de gauche et d’extrême gauche, ce qui révèle un tropisme certain dans le recrutement. Le professeur de photographie officie à Libération, un autre professeur qui écrit dans Le Monde fait preuve d’une déontologie curieuse, soulignant, nous citons, « être journaliste c’est pas dire ce qu’on voit, c’est dire ce qu’on veut », on a du mal à reconnaître la charte de Munich. Si le profil idéologique des professeurs est mixte, mais plutôt quand même du côté libéral libertaire, la gestion des ressources humaines est du style néo-libéral le plus classique si l’on en croit la crise des vacataires qui a secoué l’établissement en 2019.
En 2019, la crise des vacataires
En effet, à cette date, les vacataires du Celsa ont menacé de ne pas communiquer les notes des épreuves de concours d’entrée qu’ils avaient corrigées, réclamant un engagement écrit et ferme de la direction sur le paiement régulier des vacations. Ce mouvement de grogne révélait alors la grande précarité des conditions de paiement des vacataires qui devaient parfois attendre plus d’un an avant de toucher leur rémunération.
Selon Corinne Lellouche, vacataire au Celsa depuis 2006, certains vacataires étaient à cette époque au RSA et travaillaient sans bulletin de salaire pendant des mois. Le profil des vacataires a en effet profondément évolué au cours des années. « À l’origine, les vacataires étaient de gens avec de bonnes situations qui faisaient cela en plus de leur activité principale. Ce n’est plus le cas. Les nouveaux vacataires du Celsa ne sont plus des journalistes ou des communicants en poste. Ce sont des jeunes précaires qui multiplient les activités et ont besoin d’attestation d’emploi et de bulletins de salaire pour pouvoir faire valoir leur droits au chômage auprès de Pôle emploi. » explique Madame Lellouche. Au moment de la crise, le Celsa comptait 600 vacataires pour 120 titulaires, dont les personnels administratifs, révélant un dévoiement d’un statut sensé servir à combler des besoins ponctuels. À la suite de leur protestation, les vacataires ont finalement obtenu d’être payés tous les deux mois.
Jouissant d’une réputation nationale et internationale (plus 400 accords avec des universités et des écoles étrangères), l’école de Journalisme du Celsa s’est imposée comme une des références dans son secteur. En 2022, 88 % de ses étudiants ont trouvé un poste moins de 2 mois après la fin de leur formation. Sa quasi-gratuité (le coût de scolarité est limité aux frais d’inscriptions universitaires) lui donne une image un peu moins socialement corsetée que celle de ses consœurs. Pour l’enseignement, suivant les cours on retrouvera un peu plus de neutralité qu’ailleurs ou le classique mélange libéral libertaire à la sauce progressiste.