En janvier 2021, alors que Donald Trump était toujours président des États-Unis, Facebook et Twitter fermaient ses comptes. Le président des États-Unis aurait favorisé une « tentative de coup d’État » quand des émeutiers ont envahi le Capitole. Facebook a confirmé la suspension. Qu’en pense Le Monde ? Du bien.
Conseil de surveillance
Mercredi 5 mai 2021, le récemment créé Conseil de surveillance de Facebook, mis en place pour un coût estimé à 130 millions de dollars, et largement constitué de proches de George Soros, a confirmé la suspension de l’ancien président des États-Unis pour avoir « légitimé et encouragé la violence. », et propagé de la « désinformation ». Cette confirmation était alors annoncée comme provisoire : le conseil demandait que la décision soit réétudiée dans 6 mois. Une interdiction de la liberté d’expression prise en dehors de toute décision de justice sur la base d’une interprétation de la notion de « désinformation ».
Le rapport du conseil de surveillance soulève d’autres problèmes que celui de la justice. Il questionne aussi le pouvoir des GAFAM : les réseaux sociaux qui ont interdit Trump de parole, Facebook, Instagram et Twitter, ont interdit d’expression une personne qui était toujours le président des États-Unis jusqu’à la date de la passation de pouvoir. Au même moment, un de ses discours était censuré sur CNN.
Le conseil de surveillance de Facebook, une façade en réalité, a dû réétudier la suspension du fait de la charte de l’entreprise qui ne comportait pas la possibilité de suspendre indéfiniment une personne. C’est pour cela que la décision devait être réétudiée. Le réseau social disposait de six mois pour prendre cette décision, suite à l’avis du conseil de surveillance. Elle survient après seulement un mois. Une formalité, en somme.
Facebook ne s’interroge donc pas sur le fond : est-il légitime pour une entreprise de décider qui a le droit de dire quoi ? L’ancien président des États-Unis ne s’y est d’ailleurs pas trompé, déclarant : « Ce que Facebook, Twitter et Google ont fait est une honte absolue. On a retiré la liberté d’expression au président des États-Unis parce que des fous de la gauche radicale ont peur de la vérité mais la vérité sortira de toute façon, plus grande et plus forte que jamais. »
Qu’en pense le quotidien Le Monde ?
Le Monde est revenu sur la question de la suspension/interdiction de Donald Trump dans sa rubrique « Pixels » datée du vendredi 4 juin 2021. Le quotidien analyse la décision de Facebook, prise à l’encontre de l’ancien président des États-Unis.
La décision ? Facebook maintient la suspension du compte de Donald Trump, par ailleurs toujours interdit de Twitter, pour deux ans. L’ancien président a immédiatement riposté : « La décision de Facebook est une insulte aux 75 millions de personnes qui ont voté pour nous en 2020 (…) Facebook ne devrait pas être autorisé à s’en tirer avec cette censure et ce muselage ».
Jusqu’alors, Facebook considérait qu’un message posté par un chef d’État, de gouvernement ou par des élus et responsables politiques devait rester en ligne en tant qu’information de nature politique et à caractère public. La suspension de messages d’hommes politiques était rarissime. Le cas de Donald Trump est un précédent qui va donc faire « jurisprudence » sauf que cela se passe en dehors de tout tribunal et de toute décision de justice. Aucun État de droit n’a condamné ce pour quoi Facebook sanctionne l’ancien président des États-Unis.
Le Monde ne trouve pas cela anormal, ne le suppose d’ailleurs même pas, alors que ce quotidien en appelle par ailleurs très souvent à la liberté d’expression (celle de ses idées). Au contraire, l’article paru dans la rubrique Pixels contient de nombreux éléments de langage qui, au coeur de la description des faits, reviennent à considérer que le problème n’est pas la censure sans base juridique de responsables politiques tels que Trump mais l’existence des idées qui ne sont pas celles du Monde.
Exemples d’éléments de langage
« Le compte Facebook de M. Trump avait finalement été suspendu en janvier, après l’invasion du Capitole par des supporteurs du président sortant, que ce dernier avait incités à marcher sur le siège de la chambre des représentants et du Sénat ». Il y a ici plusieurs fake news : Trump était toujours président des États-Unis ; il n’a pas « incité » à marcher vers le Capitole, la fin de son discours conviant ses partisans à « manifester pacifiquement leur désaccord ». Trump n’a donc pas appelé à « l’invasion », un terme pour le moins fort, et n’a d’ailleurs pas été condamné pour ce que Le Monde considère comme étant la réalité.
C’est ainsi que se fabrique l’information « vérifiée » et « décodée » des médias de grand-chemin.
Le Monde indique aussi que Trump avait affirmé « au mépris de toutes les preuves (une formule qui, elle, méprise la déontologie journalistique) que des fraudes massives avaient eu lieu lors des élections de novembre 2020 et qu’il était le vrai président élu ». Le quotidien semble trouver normal qu’un réseau social puisse reprocher un avis à un président battu lors des élections et, ce, jusqu’à l’interdire de parole. Pourtant, quoi de plus normal qu’un homme politique battu qui, de dépit, suppose des fraudes ? Rien que de très banal dans la vie politique et rien d’interdit par la loi. Ce qui est moins normal c’est que le monde juge… normal de suspendre un compte et donc la liberté d’expression sur cette base.
Autre formule révélatrice : la politique bienveillante de Facebook « a montré les limites de cette politique, l’ancien président des États-Unis ayant utilisé à de multiples reprises son compte pour diffuser des théories du complot, des attaques personnelles contre des journalistes, voire des menaces à peine voilées contre d’autres dirigeants étrangers ». Là aussi, sur quelles bases juridiques et quelles condamnations l’auteur de cet article du Monde se base-t-il ? Qu’est-ce qu’une théorie du complot ? Lesquelles ont été diffusées par Trump ? Pas d’information sur ces sujets. Le journaliste part de présupposés personnels et assène des arguments d’autorité.
Finalement ? Extrait du Monde : « Facebook confirme plus généralement, comme l’annonçait le site spécialisé The Verge, qu’il compte limiter les privilèges de modération dont jouissent les élus et chefs de gouvernement. Le réseau social pourrait aussi faire preuve de plus de transparence sur les avertissements donnés en cas d’infraction à ses règles, qui peuvent conduire à l’exclusion des comptes récidivistes. »
Cela n’interroge pas du côté du Monde : qu’un média en forme de réseau social se prépare à limiter ou interdire la liberté d’expression de personnes choisies pour leurs opinions, en premier lieu politiques, ne paraît pas dangereux pour la démocratie dans les pages d’un quotidien qui se targue en permanence de défendre la démocratie. Cherchez l’erreur.