Il a dressé une liste de médias avec lesquels il est formellement interdit de s’entretenir : en janvier 2024, Bernard Arnault faisait parvenir un mail à ses cadres pour les inciter à ne pas répondre à certaines plateformes médiatiques…
Lettres confidentielles
C’était le 17 janvier 2024 : au détour d’un mail adressé aux dirigeants du groupe, que la Lettre s’est procurée, Bernard Arnault a demandé que LVMH ne réponde plus à certaines « lettres soi-disant confidentielles », des médias qui s’appuieraient sur des « sources internes en dehors des circuits de communication mis en place dans nos entreprises ».
Dans le viseur du dirigeant : La Lettre, l’Informé, Médiapart, Le Canard enchaîné, pour les plus connues, et quelques titres plus confidentiels. Formulant une « interdiction absolue » de s’entretenir avec eux, Arnault l’assure : il sera « intraitable devant tout manquement à ces règles qui marquerait pour [lui] un défaut de loyauté intolérable ». S’ils venaient à déroger à cette règle, leur attitude serait considérée comme « une faute grave, avec les conséquences qui y [seraient] attachées ».
Peu de moyens de pression par la publicité
Pour La Lettre, qui a donné libre accès à son article, cette attaque contre la liste de médias précitée tiendrait à l’absence de publicités de ceux-ci : « toutes ces publications, à l’exception de Miss Tweed et Puck, ont pour point commun d’avoir choisi un business model sans soutien publicitaire des grands annonceurs, ni organisation d’événements, explique la lettre confidentielle. Et cette indépendance prive nécessairement l’état-major du groupe de luxe de potentiels moyens de pression ».
Le milliardaire n’a pas souhaité commenter cet article lorsque l’AFP l’a contacté. Au passage remarquons que l’OJIM qui n’a pas de publicité est indépendant de toute pression à caractère commercial ou politique.
Indépendance relative des rédactions
Détenteur des journaux Le Parisien et Les Échos, Bernard Arnault dispose aussi du magazine spécialisé Connaissance des Arts et Radio Classique. Et même au sein des titres qu’il détient, les relations entre Bernard Arnault et la presse n’ont pas toujours été roses : ainsi, la société des journalistes du quotidien Les Échos s’était insurgée, en mars 2023, des conditions du départ du directeur de la rédaction du journal. Selon la Société des journalistes, le directeur de la rédaction aurait été « limogé […] pour avoir laissé publier des articles ayant déplu à son propriétaire » — en l’occurrence, un article en faveur du livre d’Erik Orsenna attaquant Vincent Bolloré avec lequel Arnault était en discussion pour le rachat de Paris Match et du JDD. La société s’était alors indignée de cette « éviction brutale […] en contradiction avec les garanties d’indépendance négociées âprement au moment du rachat des Échos par LVMH en 2007 ».
Voir aussi : LVMH, infographie