Le PDG de Challenges et de Science & avenir, Claude Perdriel (voir portrait), se heurte à plusieurs broncas internes. À 87 ans, le patron de gauche, qui a cédé Le Nouvel Observateur en juin en raison de sa mésentente avec l’équipe rédactionnelle, n’a pas l’intention de jeter l’éponge. Encore que…
Près de deux heures de débats houleux. La dernière réunion du comité d’entreprise du newsmagazine hebdomadaire Challenges a donné lieu le 9 février à une série de joutes verbales parfois violentes. Au cœur du malaise, l’arrivée de plusieurs pigistes de luxe à Challenges, tous proches de Perdriel. Dans l’ordre, il s’agit de Maurice Szafran et de Nicolas Domenach, ancien PDG et éditorialiste politique de Marianne. François Bazin et de Bruno Roger-Petit, tous deux issus du service “Politique” de L’Obs, sont aussi venus renforcer les troupes. Prévus pour travailler sur le numérique (Challenges.fr), ils seront coordonnés par la rédactrice en chef “Politique” de Challenges, Ghislaine Ottenheimer. Côté Perdriel, cette “task force” se justifierait. Elle doit en principe booster l’audience du site (1,2 millions de VU en janvier, selon l’éditeur). Le PDG a au passage égratigné la rédaction, accusée de ne pas suffisamment abonder pour le web. Selon le personnel en interne, ces arrivées causent deux soucis majeurs. Avec 1,4 millions d’euros de pertes et probablement deux millions d’euros en 2016, Challenges ajoutera des charges salariales supplémentaires, alors même que le groupe a annoncé un plan d’économie de 700 000 euros pour 2015. Les aspects politiques n’ont pas été non plus absents des débats. La prose des nouveaux collaborateurs reflèterait un anti-sarkozysme primaire. Or, le newsmagazine économique vante l’économie libérale à longueur de colonnes. Vincent Beaufils, le directeur de Challenges, n’a jamais caché que ses préférences politiques allaient plutôt à l’UMP qu’au PS, même “social-démocratisé” par Emmanuel Macron. Le malaise des journalistes présents au CE s’est encore accru lorsque Claude Perdriel s’est inscrit en faux face à cette ligne éditoriale plutôt centriste. Il a asséné à la surprise générale que Challenges était bel et bien un journal de gauche.
Le climat se tend donc clairement entre le PDG et ses troupes, largement désorientées. Claude Perdriel semble décidé à ne pas lâcher ni ses amis, ni ses idées. Il a menacé clairement les réfractaires de fermeture de Challenges si, comme à L’Obs depuis des années, il ne s’entend plus avec la rédaction. Chantage ou intox ? L’autre mouvement de rébellion interne ne devrait en tout cas guère contribuer à calmer l’octogénaire. La société des journalistes de Science & avenir a ainsi vivement protesté par écrit mi-février contre un dossier promotionnel paru dans le mensuel de février, sans mention particulière.
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