Une disposition du statut de journaliste, votée en 1935, permet à tout journaliste de quitter de sa propre initiative une entreprise, tout en percevant des indemnités de licenciement lorsque le journal ou le périodique auquel il collabore est racheté. L’indemnité minimum est de un mois de salaire par année d’ancienneté et en général supérieure.
Certains journalistes de BFM (racheté par Patrick Drahi) et de Marianne (racheté par le Tchèque Daniel Kretinsky) y ont recours mais dans des proportions fort différentes.
Remous à BFM
Le groupe Altice/SFR de Patrick Drahi a racheté à Alain Weill en 2017 51% des parts de NextRadioTV (BFM) ouvrant en juin 2018 le déclenchement de la clause de cession qui se terminera fin 2017. Après cette date les 700 journalistes du groupe (sur 1400 salariés) devront saisir les tribunaux. (Source Lettre A du 16 novembre 2018)
L’ambiance n’est pas au beau fixe avec le conflit larvé que se livrent Stéphane Soumier directeur de la rédaction de BFM Business et Jean-Michel Salvatore directeur des rédactions digitales. Le style de management des directions du groupe Altice n’est pas non plus réputé pour sa tendresse et l’expression «passer à la paille de fer » les fournisseurs et les collaborateurs reflète la réalité quand Drahi prend le contrôle d’une entreprise. Les salariés de SFR peuvent en témoigner.
À BFMTV.com déjà un tiers des journalistes ont annoncé leur intention de départ. Des départs significatifs sont également attendus à BFMTV et dans les deux rédactions économiques. Ce sont généralement les plus anciens et les plus chevronnés qui partent. La direction ne s’exprime pas sur le sujet.
Stabilité à Marianne
Après le rachat à Yves de Chaisemartin par Daniel Kretinsky et l’arrivée de Natacha Polony, on aurait pu s’attendre à une vague de recours à la clause de cession. Il n’en est rien et seulement trois ou quatre journalistes (sur plus d’une une trentaine) en profiteraient. La rédactrice en chef du service société Perrine Cherchève comme la grande reporter Marie Huet quittent le journal. Marc Endeweld, parti avant ne compte pas dans le lot. Hervé Nathan, directeur adjoint de la rédaction hésiterait (il a l’âge de prétendre à partir à la retraite) mais pourrait rester. Le futur d’Eric Decouty directeur délégué de la rédaction est incertain. Il avait été proposé par Yves de Chaisemartin pour succéder à Renaud Dély (plaisamment surnommé “dély d’opinion”) mais le nouveau propriétaire lui a préféré Natacha Polony. L’arrivée de cette dernière – qui est dans le droit fil de l’ADN du journal – semble être vécue comme une chance pour le magazine et la majorité de la rédaction et non comme une contrainte. Restera à Natacha Polony à convaincre certains journalistes, recrutés par des rédacteurs en chef du pôle libéral libertaire du style de France Inter, à suivre sans trop d’états d’âme la ligne « souverainiste de gauche » du journal.