Parmi les quotidiens de diffusion nationale, Présent constitue un cas à part. Paraissant contre vents et marées depuis 40 ans, quasi moribond en 2014 avant d’être repris par une nouvelle équipe, le journal s’est vu priver récemment de manière arbitraire de ses aides à la presse quotidienne d’information générale et à faibles revenus publicitaires. La raison invoquée ? Le prix de vente au numéro n’est pas assez élevé (sic). La solidarité des lecteurs a permis de pallier ce coup dur. Mais un procès des anciens dirigeants menace de nouveau l’édifice. Visite juridique guidée et détour par des règlements de comptes peu catholiques.
Conflit sur l’orientation du titre
Madame Smits et Monsieur Figueras, époux à la ville, à la fois anciens responsables et journalistes ont fait jouer leur clause de conscience après la reprise du titre. Portant l’affaire aux prud’hommes, ils ont dans un premier temps été déboutés de leur plainte. Mais la cour d’appel a contredit le conseil des prud’hommes le 14 janvier 2020. Elle estime que la ligne de Présent a changé en 2014 « par un soutien direct au Front National », un jugement étonnant quand on connaît la ligne précédente qui a toujours été très proche de Jean-Marie Le Pen y compris par son fondateur, Jean Madiran décédé en 2013.
Risques encourus
Les deux démissionnaires devraient recevoir des indemnités de licenciement supérieures à 100.000 euros au titre des 15 premières années d’ancienneté, sans compter un possible supplément pour les années au-delà de 15 ans d’ancienneté, déterminé par la commission paritaire arbitrale des journalistes, ce qui pourrait doubler la mise.
La décision du Tribunal est théoriquement exécutoire au 8 février, peu de temps avant que le Tribunal de commerce n’examine le plan de continuité à dix ans de la société éditrice. Quelle est la morale de l’affaire ? Il pourrait y en avoir plusieurs.
Tout d’abord, la clause de conscience est une nécessaire protection des journalistes. Ensuite, le raisonnement du Tribunal d’appel paraît spécieux, le quotidien est bien resté « national » et « catholique » avant et après 2014, que l’on apprécie ou pas ces termes. Enfin il peut paraître étrange qu’une équipe dirigeante qui a pratiquement amené à la ruine un journal en soit d’une certaine manière récompensée. Le tout sans doute au nom de la bonne morale catholique. Les voies du Seigneur sont, dit-on, impénétrables.