Dès l’annonce de la dissolution, c’était dans tous les journaux : les marchés financiers s’affolaient à l’idée d’une majorité du Rassemblement national après les législatives anticipées. Depuis, les médias continuent à alerter sur les programmes économiques des « extrêmes ». L’occasion d’engager à choisir Renaissance.
Comment l’instabilité politique a fait baisser la notation financière de la France
Fin avril, les agences de notation financières Moody’s et Fitch avaient décidé, à la surprise générale, de maintenir la note de la solidité de la dette française. Cette décision avait permis à la France de conserver son apparent sérieux face aux investisseurs. Or, l’annonce de la dissolution a tout changé, et l’agence de notation Moody’s menace maintenant de dégrader la note. Conséquence, les marchés financiers paniquent, les emprunts sont plus chers, le déficit public se creuse, bref, tout va à vau‑l’eau et les médias peuvent montrer les possibles conséquences d’une majorité du Rassemblement national. France Bleu précise notamment que « la Bourse de Paris a bouclé sa pire semaine en plus de deux ans », ce que note également L’Opinion. Le Nouvel Obs est presque menaçant, sans viser pour autant le RN, lorsqu’il affirme que « le vainqueur potentiel des élections est ainsi prévenu : il a intérêt à faire des propositions qui resteront acceptables pour les investisseurs, qui détiennent les 3 100 milliards de dette publique. » France Info, pour sa part, estime sombrement que « il y a une certitude : les premières conséquences de ces futures élections promettent d’être le dérapage de nos finances publiques. »
Le Nouveau Front populaire condamné par une part réduite de la presse
Si l’ensemble des médias crie haro sur le Rassemblement national, seuls certains titres font de même à l’encontre du Nouveau Front populaire. Ainsi, Le Point estime que, d’un côté comme de l’autre, on assiste à une « foire aux fausses bonnes idées » et que les programmes « présentent des ressemblances. » Une position partagée par le cabinet d’études Astérès, repris par La Tribune, qui parle de programmes « fortement similaires. » Le Point défend notamment la mondialisation, expliquant que « si ses nombreux effets négatifs sont à corriger », il est « difficile de ne pas voir les gains de pouvoir d’achat dont ont profité les ménages les plus modestes. » Des ménages qui, justement, votent pour le RN ou la gauche, mais ne lisent guère Le Point.
Dans les médias publics, on trouve des excuses au Nouveau Front populaire
France Bleu quant à lui, parle d’un « ambitieux » programme, tout en reconnaissant « l’inquiétude des principales organisations patronales et les réserves d’économistes », avec un article indéfini qui insinue que tous les économistes ne s’accordent pas. Au reste, les conséquences économiques du programme sont difficiles à chiffrer, et « plusieurs instituts de conjoncture et banques » s’y refusent, « invoquant les difficultés à ce stade d’un tel exercice. » Ayant noté cette prudence, France Bleu ajoute, dans un reproche à peine voilé, que « le gouvernement n’a lui pas attendu et dégainé en pleine campagne et en quelques heures une estimation “ligne à ligne” du programme. » Une estimation donc plus politique que scientifique. Le média admet toutefois que « certaines mesures sont aussi vues d’un mauvais œil au sein des milieux professionnels » et cite certains économistes qui craignent « un programme potentiellement dépensier difficile à mettre en œuvre »
De trois maux, choisir le moindre : Renaissance ?
De son côté, France Info note que les programmes du RN et du Nouveau Front populaire « promettent d’être si généreux qu’ils en sont extrêmement coûteux », même si, selon le média, « il est normal quand on est en campagne de faire des propositions séduisantes pour attirer les électeurs plutôt que de promettre du sang et des larmes. » Une concession pragmatique, mais aussi assez pessimiste quant à l’avenir de l’économie française : un candidat portant un programme de rationalisation de la dépense publique, donc des aides et subventions diverses, n’aurait aucune chance de convaincre. Après avoir rapidement étrillé les programmes de la droite et de la gauche, France Info concède que « côté Renaissance, il y a aussi des dépenses », mais s’empresse de préciser que « leur facture, en tout cas pour le moment, reste néanmoins nettement moins élevée que celles présentes dans le programme des autres formations, à droite comme à gauche. » Même Libération défend le gouvernement, affirmant que si « le déficit et la dette sont à des niveaux élevés », « l’Etat se refinance facilement ». Il faut bien cela pour accuser le Rassemblement national de « noircir le tableau déjà sombre des finances publiques ». Pour le prouver, Libé cite certains mots de Jordan Bardella : « catastrophique », « quasi-faillite sur le plan financier. » Ce n’est pas chez Libération qu’on verrait de telles hyperboles.
Les médias au secours du gouvernement : conviction ou commande ?
Face aux deux nouveaux blocs de droite et de gauche qui semblent majoritaires, les médias font donc un travail de sape méthodique, qui a peut-être été inspiré par le gouvernement. Sur BFM TV, Bruno Le Maire a bien appelé à ce que « les gens se mouillent », et disent « clairement ce qu’ils pensent des programmes économiques des uns et des autres. » Le tout en prenant soin de rappeler aux chefs d’entreprise ce qu’ils doivent au gouvernement. « Que les chefs d’entreprise à qui nous avons baissé l’impôt sur les sociétés, que les industriels à qui nous avons supprimé les impôts de production pour qu’ils soient compétitifs face à l’Allemagne, pour qu’on puisse rouvrir des usines de voitures, d’avions, de batteries électriques, fassent comprendre au reste de la population : “C’est vous qui décidez, mais sachez que si ce programme-là passe, on ferme nos usines et on supprime des emplois” », demande-t-il. Certains posent une devinette: qui était ministre de l’économie ces dernières années ? Les bonnes réponses gagnent un livre de Bruno Lemaire.
Voir aussi : Les médias publics font ils campagne contre le Rassemblement national ?