[Première diffusion le 23 février 2016] Rediffusions estivales 2016
La Bundeszentrale für politische Bildung (Agence fédérale allemande pour la formation politique), très officielle émanation du Ministère fédéral allemand de l’intérieur, publie une série de vidéos déconcertantes sur l’islam.
L’enfer est pavé de bonnes intentions. La BpB a été créée en 1952 en tant qu’organisme de propagande et de rééducation de la population allemande avec les meilleures intentions du monde : il s’agissait en effet alors d’extirper du cœur de cette dernière toute nouvelle tentation totalitaire. Le danger que représentait la nature fondamentalement totalitaire et donc porteuse de tous les ferments de la destruction de ce qu’il devait défendre d’un tel organisme ne fut pas perçu au moment de sa création.
La société allemande s’est fracassée à Cologne contre le mur des réalités. Qu’à cela ne tienne : dans l’Allemagne d’aujourd’hui, les réalités ne sont pas seulement ignorées… leur description est à la limite de l’illégalité. Comme le mythe socialiste dans l’ex-URSS, c’est la fiction « Multikulti » qui est la seule vérité pensable et autorisée.
C’est dans ce contexte que la BpB a lancé un projet visant à « informer sur l’islam » afin de « lutter contre les préjugés ». Ce projet consiste en toute une série de vidéos présentant les interventions de blogueurs réel ou improvisés pour l’occasion sous l’égide de la BpB. Le titre générique du projet global est « Info Islam ». Le résultat est pour le moins déconcertant.
Prenons un simple exemple : celui de la vidéo de 6 minutes portant le titre de « Djihad ».
On y voit une femme voilée et en djellaba exposer, toute souriante et dans un allemand parfait, ce que recouvre selon elle la notion de « Djihad ». La symbolique d’infériorité de la femme que marque son accoutrement échappe totalement au BpB qui a oublié au passage les principes d’égalité des sexes pourtant énoncés dans la Grundgesetz, la loi fondamentale allemande.
La jeune femme commence par expliquer doctement que « Djihad » veut dire mot-à-mot « effort », en l’occurrence un effort à déployer afin d’atteindre un certain but. Ni plus ni moins. Le rapport avec l’idée de « guerre sainte » : aucun. Les Islamistes se trompent : ils parlent de Djihad mais projettent dans ce mot leur propre haine et leur propre violence, en ne faisant que répandre les préjugés contre une religion mondiale. Ils divisent et sont dans l’erreur, n’ayant rien compris à leur propre foi.
« Djihad », continue-t-elle, est une vision marquant la volonté de s’améliorer en tant qu’être humain, à ne pas se laisser aller à l’avidité et à l’égoïsme et à écouter l’autre avec un cœur ouvert. « Djihad » veut dire tout simplement… « être humain » !
Il y a un grand et un petit djihad.
Le grand Djihad désigne un grand effort religieux. Certes, on le concède ici, un tel effort a bien désigné aux débuts de l’islam la guerre. Mais ce n’était qu’au début, et les restrictions étaient nombreuses : un ordre du calife était nécessaire, les savants modernes ne reconnaissent plus que les guerres défensives, etc. Tout ceci est donc obsolète. La notion que le Coran est la parole incréée de Dieu passe complètement à la chausse-trappe. L’islam accepte totalement aujourd’hui le principe de la coexistence pacifique des peuples sous l’égide des institutions internationales. Il veut dire respecter les traités internationaux et l’amitié entre les peuples.
La jeune femme finit enfin par expliquer ce qu’est le « petit Djihad » — son Djihad :
- Il veut dire « se lever tôt le matin au lieu de se prélasser au lit »
- Il veut dire « aller à l’université et faire un effort d’apprentissage et de compréhension »
- Il veut dire « être patient avec les autres, même s’ils cherchent à me mettre en rage »
- Il veut dire « rechercher des compromis », « dire la vérité », « être amical »
- Il veut dire « travailler », « être conscient de ses responsabilités sociales » et « être disposé à discuter avec les autres et à échanger avec les autres au moyen des mots ».
On notera donc la totale congruence de la notion de « Djihad »… avec les valeurs centrales de la société allemande, travail, effort, cohésion sociale, sens du compromis, maîtrise de soi…
L’enseignement de cette vidéo surréaliste ? L’universel, cette valeur exaltée par le monde contemporain, ne peut être incarné que par une infinité de particularités et de particularismes. Au-delà ce n’est qu’une idée platonicienne hors du temps et de l’espace. L’Allemagne se pense universelle, comme le font toutes les autres sociétés occidentales. Les musulmans sont des « être humains comme les autres »… donc ce sont des allemands comme les autres.