Depuis quelques jours, le licenciement fin mai de la directrice adjointe de L’Obs, Aude Lancelin, fait l’objet d’une couverture détaillée, précise et abondante de la part de Mediapart.
Plusieurs articles du pure player fortement marqué à gauche sont venus jeter un pavé dans le marigot des petites combines du monde politico-médiatique parisien. Bravo ! Alors que la direction de L’Obs s’évertue à expliquer que l’éviction d’Aude Lancelin ‑elle est la compagne de Frédéric Lordon, l’animateur de Nuit debout !- est strictement dictée par des questions managériales, un SMS de Claude Perdriel adressée à la journaliste dit clairement le contraire. Toujours actionnaire du newsmagazine ‑qu’il a vendu en 2014 au Monde-l’octogénaire affirme dans son message à Lancelin respecter ses convictions, tout en déplorant qu’elles aient pu influencer son travail. De fait, les pages “débats-idée” du très social-démocrate Obs, sont devenues en quelques mois l’agora permanente de l’ultra-gauche. Ainsi, Yanis Varoufakis, le sulfureux ex ministre de l’économie, en a été l’invité régulier au même titre que nombre de penseurs et de sociologues marqués rouge vif. Sans compter les reportages bienveillants sur les députés frondeurs à l’assemblée et le mouvement Nuit débout. De quoi agacer, outre Perdriel, le trio Bergé, Niel, Pigasse, propriétaire du Monde et proche de la gauche socialiste classique.
Voilà pour le contexte, la suite est savoureuse. Virée de toute évidence pour des raisons politiques (mais après tout, chaque journal décide de sa ligne éditoriale et a le droit de s’y tenir), Aude Lancelin compte à présent envoyer L’Obs aux Prud’hommes. Pour lancer la procédure, elle a choisi comme avocat… William Bourdon. Ce ténor du barreau de Paris a fait de la défense des causes marquées à gauche ou anticapitalistes — SOS racisme, les syndicalistes SUD PTT, etc… —, son fonds de commerce. Un tropisme qui l’a poussé à soutenir Mediapart depuis sa création en 2007. Bourdon y tient même un blog au vitriol contre les grandes puissances d’argent, etc. La boucle est bouclée. Le fameux SMS de Perdriel s’est tout naturellement retrouvé par hasard dans la messagerie de l’auteur du scoop, Laurent Mauduit, au mépris des règles les plus élémentaires de confidentialité de la procédure en cours.
Toujours prompt à donner des leçons de déontologie aux autres journalistes et de moralité aux élites en général, Mediapart s’appliquerait-il à lui-même le fameux adage : “Faites ce que je dis mais pas ce que je fais” ?