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Comment se débarrasser de Trump en dépit d’une possible victoire à la présidentielle ? Explications

29 octobre 2024

Temps de lecture : 9 minutes
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Comment se débarrasser de Trump en dépit d’une possible victoire à la présidentielle ? Explications

Temps de lecture : 9 minutes

De notre correspondant en Amérique du nord, 11 questions réponses sur une élection serrée et d’importance. Suite.

1. Est-il possible de disqualifier Trump si le peuple lui accorde sa confiance le 5 novembre prochain ?

Rap­pelons d’abord que l’élection améri­caine se joue en « trois mi-temps ». Les deux pre­mières sont con­nues du grand pub­lic : ce sont les pri­maires, puis le vote nation­al de novem­bre (cette année, le 5 novem­bre). Mais il y a aus­si une troisième mi-temps, tra­di­tion­nelle­ment sans sur­prise, mais ésotérique. Cette dernière peut être pavée de chausse-trappes.

2. En quoi cela pose un problème ?

La rumeur nous dit par exem­ple que les démoc­rates ont engagé une armée d’avocats pour ten­ter d’invalider dans les états un max­i­mum d’élus représen­tant Trump dans le col­lège élec­toral et ce pour toutes sortes de tech­ni­cal­ités. C’est un moyen habile de faire en sorte que Trump ne dis­pose pas des 270 mem­bres du col­lège élec­toral néces­saires à la pour­suite de son élec­tion finale. Ceci représente le pre­mier détroit à franchir. Reste ensuite à franchir le Cap Horn, celui de la Cham­bre des représen­tants qui a le pou­voir de dis­qual­i­fi­er l’élection de Trump pour ten­ta­tive d’insurrection (évène­ments du 6 jan­vi­er 2021). C’est ce à quoi tra­vaille le « par­ti unique » de Wash­ing­ton, à l’initiative du représen­tant Jamie Raskin, en appui sur les « travaux » de la com­mis­sion du 6 jan­vi­er dirigée par Madame Liz Cheney.

3. Donc tout s’imbrique, les perversions du système électoral qui ont commencé avec le Covid, les deux impeachments de Trump, la commission parlementaire « bipartisane » du 6 janvier (démocrates + Liz Cheney + autres rogatons du clan bushiste), les tentatives apparemment folles de certains états d’empêcher Trump de se présenter, le transport en avion des migrants artificiellement légalisés là où le vote démocrate doit être renforcé, les procès contre Trump au civil comme au pénal, ses inculpations et sa condamnation, les peines y afférent suspendues le temps de passer la date de l’élection du 5 novembre pour éventuellement le mettre en prison avant le 20 janvier 2025, les dernières accusations de fatigue et de sénescence, ainsi que la toute récente accusation d’hitlérisme orchestrée par les généraux du complexe militaro-industriel, bref autant d’ingrédients utiles pour s’en débarrasser « légalement » en dépit du vote populaire ?

En effet : comme tout régime paniqué qui dérive vers l’autoritarisme, celui auto­proclamé de « l’état de droit », (tra­duc­tion : le gou­verne­ment des juges fana­tiques), tend à primer sur la « vox pop­uli, vox dei ». Recon­nais­sons ici que la caste de l’État pro­fond a patiem­ment et de façon cohérente bâti un excel­lent « dossier de licen­ciement » qui ressem­ble à une machine infer­nale à plusieurs canons sus­cep­ti­ble d’exploiter les zones gris­es de la Constitution.

4. Pendant que les « officiels » de l’establishment et le public se concentrent sur l’élection du 5 novembre, le « blob » de l’état profond serait déjà en train de préparer, quand bien même il serait élu, l’éviction de Donald Trump avant même son intronisation ?

Oui! En fait cela fait longtemps que nous sommes entrés dans la troisième mi-temps. Car la ten­dance s’est inver­sée en faveur de Trump, à ce stade de l’élection du moins. Il faut ren­dre à César ce qui est à César. La coali­tion du « par­ti unique », prenant Trump pour ce qu’il est – un dan­ger fon­da­men­tal pour l’oligarchie parce que totale­ment incon­trôlable par ses mar­i­on­net­tistes –, a su patiem­ment tiss­er une toile depuis deux ans. L’objectif serait bel et bien de le dis­qual­i­fi­er avant qu’il ne prête ser­ment afin de nom­mer quelqu’un d’autre. Ce qui vaut pour Biden vaut donc pour Trump.

5. Comment un limogeage de Trump pourrait alors être organisé ?

Il faut savoir, infor­ma­tion de con­texte, que, dans le loin­tain passé et à deux repris­es, le Prési­dent améri­cain avait été désigné par la Cham­bre des représen­tants de façon automa­tique. Un proces­sus con­sti­tu­tion­nel nor­mal existe donc déjà qui prévoit qu’en cas d’impossibilité pour cha­cun des can­di­dats de franchir la bar­rière des 270 votes au col­lège élec­toral, la Cham­bre des représen­tants doit choisir entre trois des can­di­dats qui y ont obtenu le plus de votes (au col­lège élec­toral). C’est ce proces­sus, légitime, qui risque d’être bafoué. Nous allons pren­dre ici l’argumentation de Jim Rickards, ani­ma­teur de Strate­gic Intel­li­gence, inter­rogé récem­ment par la chaîne inter­net Blaze TV. Son analyse des dates clés est limpide :

  • Pre­mière étape (5 novem­bre 2024) : Trump est élu par la population
  • Deux­ième étape (11 décem­bre 2024) : les électeurs du col­lège votent, dans chaque état, pour le can­di­dat qu’ils représentent.
  • Troisième étape (17 décem­bre, à un ou deux jours près) : les états cer­ti­fient leurs résul­tats qu’ils trans­met­tent à Washington.
  • Qua­trième étape (3 jan­vi­er 2025) : le Con­grès nou­velle­ment élu prête serment

6. Il ne resterait plus que la formalité de la ratification lors de sa session du 6 janvier ?

Pas si vite! Car Jamie Raskin a déjà annon­cé qu’il présen­terait dès le 4 jan­vi­er 2025 une réso­lu­tion déclarant Trump insur­rec­tion­nel, au titre de la sec­tion 3 du 14e amende­ment (qui fut intro­duit à l’issue de la guerre de séces­sion pour ban­nir les anciens con­fédérés de toute fonc­tion poli­tique ou de haute admin­is­tra­tion fédérale).

7. Est-ce plausible ?

Sur le fond, lors des pri­maires, la Cour suprême avait cette année inter­dit aux états de l’Union d’empêcher Trump de se présen­ter au titre de l’article 3 du 14e amende­ment, pré­cisant toute­fois que ce serait à la Cham­bre des représen­tants de régler cette ques­tion. En con­séquence, la Cham­bre nou­velle­ment élue, selon sa com­po­si­tion, pour­rait très bien vot­er la dis­qual­i­fi­ca­tion de Trump (ce serait ensuite à la Cour suprême de décider si une telle dis­qual­i­fi­ca­tion était légitime – notons ici que Trump n’a fait l’objet d’aucune pour­suite ni con­damna­tion au titre une éventuelle insur­rec­tion, prob­a­ble­ment parce que ce chef d’inculpation est dif­fi­cile à prouver).

8. Ce serait donc pour cela que Trump a massivement fait campagne en Californie et dans l’État de New York où il n’a pourtant aucune chance de gagner le collège électoral ?

Exact. Out­re le fait que ses – immenses – réu­nions publiques tenues dans ces deux États ont impres­sion­né autant ses par­ti­sans que ses adver­saires, il lui est néces­saire d’y « faire feu de tout bois » afin de pou­voir en extraire un max­i­mum d’élus loy­al­istes au Con­grès (Cham­bre et Sénat). La cam­pagne Trump démon­tre ain­si qu’elle com­prend l’enjeu : la seule per­for­mance per­son­nelle de Trump, le 5 novem­bre prochain, ne peut suf­fire; il lui faut faciliter la bonne per­for­mance de tout un par­ti répub­li­cain renou­velé, lui-même devenu « MAGA ». Et déjà les vieilles gardes par­lemen­taires de droite et de gauche s’activent pour créer la vraie crise qui pour­rait « tech­nique­ment » le men­er à la dis­qual­i­fi­ca­tion. Ce n’est pas à sous-estimer.

9. Ainsi le dossier de « l’insurrection » du 6 janvier 2001, qui avait provoqué un deuxième impeachment – raté – contre Trump, suivi d’une commission d’enquête « bipartisane » conduite par Liz Cheney, cirque qui fut suivi par la nomination (illégale ?) d’un procureur spécial, Jack Smith, sans oublier l’inculpation de Trump consécutivement à la saga Stormy Daniels (laquelle fait figure de victime autant que Trump lui-même), constitueraient donc le vecteur de l’opération destinée à « réveiller » principalement le 14e amendement de la constitution ?

Effec­tive­ment. le mythe de l’insurrection, au sec­ond plan de la cam­pagne, en est au pre­mier au sein des manœu­vres du par­lemen­taire démoc­rate Jamie Raskin, qui a décidé une bonne fois pour toutes qu’il faut sor­tir Trump en refu­sant de cer­ti­fi­er les résul­tats de l’élection pour cause d’insurrection. Et ce n’est pas un hasard si le clan Cheney est de plus en plus vocal à ce sujet. Kamala Har­ris se fait voir de plus en plus avec Liz Cheney. Ce n’est pas non plus action erra­tique de la part de Raskin lorsqu’il accuse Trump de d’ores et déjà refuser une tran­si­tion de pou­voir « pais­i­ble ». Et ce n’est pas un hasard si les généraux néo­con­ser­va­teurs qui s’étaient glis­sés au sein de l’administration Trump avant de se faire évac­uer « réalisent » aujourd’hui, à la fin de la course prési­den­tielle, que le 45e prési­dent (Trump) est somme toute un fas­ciste. Pire encore ce père et grand-père d’enfants juifs se prendrait pour Adolf Hitler. Toute cette agi­ta­tion sem­ble se pro­duire pour créer un effet d’ambiance. Cela aura peu de chance de mod­i­fi­er les résul­tats de l’un ou de l’autre can­di­dat à quelques jours de l’élection, mais sous-ten­dra la désta­bil­i­sa­tion de Trump s’il est élu. Telle serait la « police d’assurance V.2 » de l’état pro­fond (la pre­mière étant la célèbre col­lu­sion russe qui avait tour­men­té la prési­dence Trump entre 2016 et 2020).

10. Est-ce que Kamala sera vraiment élue si les anti-Trump regagnent la Chambre ? Quid de JD Vance ?

Jim Rickards pré­cise d’abord que Vance n’étant pas impliqué dans les évène­ments de 2001, il sera de toute façon élu par le Sénat le 6 jan­vi­er. Cepen­dant qu’à la Cham­bre, les répub­li­cains for­cés de vot­er pour Kamala Har­ris auraient le choix entre accepter une prési­dence Har­ris (sachant que JD Vance deviendrait son Vice-Prési­dent) ou faire chaise vide le jour de la nom­i­na­tion de Har­ris. Auquel cas, faute de quo­rum, selon le 12e amende­ment, le Sénat pour­rait nom­mer Vance à la Prési­dence. Il y aurait alors deux per­dants : Kamala Har­ris et Don­ald Trump (ce dernier, et toute son équipe pou­vant cepen­dant béné­fici­er du par­don prési­den­tiel de Vance pour toutes les affaires qui l’ont miné depuis des années).

11. Il faudrait donc que Trump gagne massivement la présidence et les deux chambres du Congrès pour se trouver totalement immunisé ? Et puisse appliquer son programme de réforme du pays ?

Oui, mais la boite à mal­ices de l’État pro­fond lui réservera encore bien des sur­pris­es. Fort heureuse­ment pour lui, il dis­pose désor­mais d’une équipe de poids lourds ain­si que d’une voix plus forte que la sienne, ain­si que de trois réac­teurs sup­plé­men­taires : Tul­si Gab­bard, RFK Junior, et Elon Musk. Qui vivra verra.

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