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Crise migratoire durant l’automne-hiver 2017 : encore plus !

5 avril 2018

Temps de lecture : 18 minutes
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Crise migratoire durant l’automne-hiver 2017 : encore plus !

Temps de lecture : 18 minutes

Red­if­fu­sion. Pre­mière dif­fu­sion le 17 jan­vi­er 2018

DOSSIER — Début septembre, l’OJIM vous présentait la couverture médiatique de la crise migratoire pendant l’été. Depuis cette période, la pression migratoire ne s’est pas relâchée, bien au contraire, tout comme sa couverture par les médias. Alors que l’été avait été marqué par l’annonce par le Président Macron de l’augmentation des capacités d’hébergement des clandestins et demandeurs d’asile, cet automne a été placé sous le signe d’un discours de fermeté du Ministre de l’intérieur et l’annonce d’une Loi sur l’asile en 2018. Cet infléchissement déplait non seulement aux associations d’aide aux migrants et à leurs supporters, mais aussi à une large frange de la classe médiatique. Les uns et les autres peuvent se réjouir des premiers reculs du gouvernement. Revue de presse thématique des informations dispensées à ce sujet dans les médias.

Quelques manifestations de la pression migratoire

Porte de la Chapelle à Paris, comme ailleurs, l’afflux inces­sant de migrants ne tar­it pas. Le Parisien cite le « tuyau » que se don­nent les débouté du droit d’asile en Alle­magne : « Il faut aller porte de la Chapelle ». Avec l’espoir d’être hébergé et pris en charge. Le Figaro du 14 décem­bre 2017 estime à 300 000 les déboutés du droit d’asile en Alle­magne. Le jour­nal­iste fait le con­stat qu’« ils arrivent mas­sive­ment en France » et représen­teraient « près de 40% des migrants enreg­istrés en Pré­fec­ture depuis le début de l’année ».

Les médias rela­tent les arrivées de clan­des­tins en dif­férents points du pays : La Croix nous informe que deux campe­ments d’africains se sont con­sti­tués à Cham­béry. À Annecy, 600 migrants ont débar­qué dans la ville en sep­tem­bre selon France 3. À Reims, selon France 3 Régions, « les tentes de for­tune du “camp Eisen­how­er” ne désem­plis­sent pas ». L’Union nous informe que le cam­pus Croix-Rouge a été envahi par des « réfugiés » en sep­tem­bre. À Brest, le 115 sat­ure. En cause : « un accroisse­ment des appels de migrants » selon Le Télé­gramme. À Rennes selon Breizh Info tout comme à Nantes selon France Bleu, il y a pénurie de loge­ments face à l’afflux de migrants. Cer­tains sont à la à la rue. À Lyon, « des migrants (se sont) abrités à l’u­ni­ver­sité, la direc­tion tient à laiss­er faire » nous informe BFMTV le 23 novembre.

À Lille, « les Restos du Cœur ne peu­vent plus nour­rir tous les migrants », « de plus en plus nom­breux à la friche Saint-Sauveur » selon France 3 Régions. « Au point que les asso­ci­a­tions sont débor­dées ». Libéra­tion nous informe le 18 décem­bre que « de 1 500 à 2 000 migrants arrivés d’Italie ont ten­té une dan­gereuse tra­ver­sée des Alpes depuis trois mois » par le Col de Mont­genèvre. « Ils arrivent du Séné­gal, du Camer­oun ou du Mali ».

À Vin­timille, le maire estime dans une inter­view dans l’édition de décem­bre de Causeur que près de 60 000 migrants sont passés par sa com­mune. Ils souhait­ent se ren­dre en France, bien que « la Vénétie affiche un des taux de chô­mage les plus bas d’Europe (6,8%) », ajoute le journaliste.

Selon Nice Matin, « une vague d’im­mi­gra­tion tunisi­enne a été stop­pée en novem­bre à la fron­tière ital­i­enne ». « Des faits d’a­gres­sions, de vols, ont été relevés ». « Le par­quet de Nice indique que cette immi­gra­tion a cessé bru­tale­ment (…), après que le tri­bunal cor­rec­tion­nel de Nice a infligé des peines rel­a­tive­ment lour­des ».

Out­re-Mer, la sit­u­a­tion à May­otte fait l’objet d’une inter­view d’un député LR dans Causeur de décem­bre. L’élu estime le nom­bre de clan­des­tins à un tiers de la pop­u­la­tion de l’île et le nom­bre d’immigrés réguliers à un autre tiers. « 74% des nais­sances sont issues de mères étrangères ». « On est au bord de l’implosion ». « Les forces de l’ordre s’interposent entre les maho­rais et les clan­des­tins devant la Pré­fec­ture ». France Info nous informe que «  La Guyane face à une vague migra­toire sans précé­dent », etc.

La situation dans le Pas de Calais

Out­re les acci­dents qui survi­en­nent fréquem­ment sur la rocade du lit­toral calaisien, plusieurs rix­es impli­quant des migrants ont eu lieu durant le deux­ième semes­tre 2017. La rela­tion de ces événe­ments par les medias est pure­ment factuelle : Europe 1 nous informe que fin août, à Div­ion, « un jeune est mort lors d’une rixe avec des migrants dans un foy­er d’in­ser­tion ». À Calais, il y a eu « cinq blessés dans une nou­velle rixe entre migrants, vingt-sept inter­pel­lés » selon La Voix du Nord. Le quo­ti­di­en nordiste informe qu’en dépit du « déman­tèle­ment » de la jun­gle, à fin sep­tem­bre,  « il y aurait actuelle­ment à Calais entre 450 (chiffre de la pré­fec­ture) et 600 (chiffre des asso­ci­a­tions) migrants à Calais, en majorité des Éry­thréens, Éthiopi­ens et Afghans ». Sans compter les autres regroupe­ments dans le départe­ment et jusqu’en Nor­mandie.

Plus glob­ale­ment, le Figaro du 14 décem­bre indique dans un dossier sur les migrants que le nom­bre de deman­deurs d’asile a dou­blé de 2010 à 2017, pour attein­dre 100 000, alors que le nom­bre d’éloignements des déboutés est passé de 36 000 en 2012 à 28 000 en 2017. Comme pré­cisé dans l’édition du 9 jan­vi­er 2018, c’est sans compter « les « dizaines de mil­liers de deman­deurs (d’asile) passés sous le statut des accords de Dublin, c’est-à-dire ceux qui ont déjà ten­té leur chance dans un pays de l’Union, comme l’Allemagne ou l’Italie, par exem­ple, et qui repassent au guichet en France ». Ni les clan­des­tins qui ne font pas de demande d’asile et qui sont par déf­i­ni­tion dif­fi­ciles à évaluer.

Dans un autre arti­cle de l’édition du 14 décem­bre du Figaro con­sacré à l’hébergement, on apprend que mal­gré les 123 000 places dans les dif­férents cen­tres et sys­tèmes d’accueil, sat­urés, de 15 000 à 25 000 places d’hôtels seraient occupées par des étrangers en sit­u­a­tion irrégulière.

Logement social

L’accès au loge­ment social est par­fois facil­ité pour les migrants. Ce qui selon Le Parisien provoque la colère du maire d’Asnières qui « ne veut pas des 70 migrants », cen­sés être hébergés sur la com­mune à par­tir de cet été. «  Ils seront logés dans des loge­ments soci­aux de Paris Habi­tat ». Pour jus­ti­fi­er sa posi­tion, le maire met en avant les quelque 3 800 deman­des de loge­ments soci­aux sur la ville. « Je ne me vois pas dire à quelqu’un qui attend un loge­ment depuis dix ans : “Passez votre tour, un migrant vient d’arriver” ». Libéra­tion nous informe le 6 décem­bre que suite à l’occupation de locaux de l’université à Nantes, «quar­ante cham­bres» en cité uni­ver­si­taire vont être réservées «pri­or­i­taire­ment aux migrants étu­di­ants» à par­tir du 1er févri­er 2018. « La prési­dence pren­dra à sa charge leurs frais d’inscription et leurs frais de restau­ra­tion seront assumés par le CROUS. Le flot ne se tar­it pas, loin s’en faut : il y aurait 300 jeunes mineurs isolés étrangers à Nantes, dont une soix­an­taine à la rue ».

Breizh Info décrit la stratégie à l’œuvre « par­faite­ment rôdée » en Bre­tagne comme ailleurs de cer­taines asso­ci­a­tions pro migrants pour par­venir à leurs fins : loge­ments et papiers pour les clan­des­tins. Les occu­pa­tions d’universités se mul­ti­plient, soutenues par des asso­ci­a­tions d’extrême gauche, les medias offrent de la vis­i­bil­ité à la pra­tique du fait accom­pli. Des solu­tions sont ensuite trou­vées. Bis repeti­ta. Libéra­tion du 18 décem­bre indique que le Min­istre de l’intérieur annonce le 22 décem­bre la mobil­i­sa­tion de 20 000 loge­ments pour les migrants.

Autre sujet d’actualité, « en même temps », pour para­phras­er le jour­nal­iste J.P. Per­naut rap­pelé à l’ordre par le CSA, France 3 évoque le 26 décem­bre le sort des 140 000 sans-abri en France au tra­vers de l’itinéraire de Frank, à la rue et au chô­mage. Totale­ment hors sujet ?

Quelques réactions locales

Les réac­tions des habi­tants hos­tiles à l’arrivée de migrants relatées dans les jour­naux sont rares, alors que les sondages mon­trent invari­able­ment une majorité de français opposée à l’accueil mas­sif des migrants. Dans le nord, à Nédonchel, des habi­tants se réu­nis­sent pour dire « Non aux migrants », nous informe La Voix du Nord. À Vil­lars-les-Dombes (01), France 3 évoque l’arrivée prochaine d’une cen­taine de migrants « hébergés dans un ancien hôtel » qui scan­dalise des habi­tants qui se sen­tent mis devant le fait accompli.

Les collectivités en appellent à l’aide de l’État

Con­cer­nant les migrants mineurs, un sce­nario sem­ble se répéter un peu partout en France, à l’image de ce qui se passe en Mayenne. Ain­si, le site d’information Laval ma ville relate le 30 août un afflux de mineurs étrangers. La grosse majorité vient du Mali ou de Guinée. « Ceux qui les envoient leur dis­ent de venir à Laval car il y a déjà une com­mu­nauté » indique le prési­dent du con­seil départe­men­tal de la Mayenne. « Ils arrivent à la gare, sou­vent sans bil­let, et vien­nent directe­ment au con­seil départe­men­tal ou ils sont récupérés par la police et le 115. Le loge­ment relève ensuite de notre respon­s­abil­ité, car ils sont mineurs. ». Pour les loger, « des hôtels ont été sol­lic­ités ».

Plus à l’ouest, le Télé­gramme indique le 10 octo­bre qu’ « ils n’é­taient qu’une poignée, voire une dizaine, dans chaque départe­ment bre­ton il y a seule­ment quelques années ». « Au 31 août, les qua­tre con­seils départe­men­taux pre­naient en charge 1 316 mineurs isolés étrangers ». « Une part impor­tante des per­son­nes se présen­tant comme mineures sont en fait majeures. Être mineur étranger et isolé (sans famille) per­met une prise en charge totale et automa­tique par les Départe­ments. Et un mineur est inex­pulsable et peut plus facile­ment obtenir un titre de séjour à sa majorité ».

Causeur évoque en décem­bre la sit­u­a­tion dans le départe­ment des Hautes Alpes qui a enreg­istré 882 arrivées de « mineurs » depuis le début de l’année. « 35% ont été con­sid­éré comme majeurs ». Loin des clichés mis­éra­bilistes, un jour­nal­iste du men­su­el souligne que la récente crois­sance économique des pays sub­sa­hariens accélère les départs, « des par­en­tèles africaines se coti­sant pour financer les départs ». « L’émigration est con­sid­érée comme une fil­ière économique à part entière ».

Dans Le Figaro du 14 sep­tem­bre, le con­stat du prési­dent de l’Assem­blée des départe­ments de France (ADF) est le même. Selon lui, le nom­bre de pris­es en charge des mineurs étrangers isolés explose partout en France et les struc­tures sont en voie de sat­u­ra­tion. Dans cette édi­tion du Figaro, il est estimé que «  le nom­bre de mineurs isolés arrivés en France entre 2015 et 2017 a aug­men­té de 100 % ». « Ces mineurs étrangers coû­tent 1 mil­liard d’euros par an aux départe­ments ». « Pour chaque départe­ment, cela représente env­i­ron 50 000 euros par an et par indi­vidu en moyenne ». Chiffre revu à la hausse (60 000 euros par jeune par an) dans une inter­view à France 3 Régions.

Le Prési­dent du départe­ment du Nord affirme au micro de RMC ne plus avoir les moyens d’accueillir de jeunes nordistes « car pri­or­ité est don­née aux mineurs non accom­pa­g­nés étrangers », « qui arrivent à rai­son de 100 par semaine ». Il indique que cer­tains trou­vent de faux papiers en arrivant à Lille. Le jour­nal­iste de RMC évoque la loi en Grande Bre­tagne où les migrants mineurs ne béné­fi­cient pas d’un accueil incon­di­tion­nel comme en France mais doivent pour rester sur le ter­ri­toire béné­fici­er du statut de réfugié.

Con­cer­nant les migrants majeurs, le 16 décem­bre, le jour­nal Le Monde pub­lie dans une tri­bune de plusieurs maires de grandes villes dont Mar­tine Aubry (Lille, PS) et Alain Jup­pé (Bor­deaux, LR), qui deman­dent à l’E­tat d’en « faire plus ». Les héberge­ments des « deman­deurs d’asile, pilotés par l’Etat, sou­vent avec l’appui de nos col­lec­tiv­ités, sont en effet com­plète­ment sat­urés, et ce mal­gré l’augmentation régulière du nom­bre de places ». « Il y a urgence à venir en aide aux déboutés du droit d’asile qui mal­gré tout restent sur notre ter­ri­toire ». Des extraits de cette tri­bune sont repro­duits dans de nom­breux journaux.

Le mag­a­zine d’opinion Valeurs actuelles dans son édi­tion du 21 décem­bre est un des seuls organes de presse à cri­ti­quer cette démarche : « que récla­ment à l’État ces élus qui n’en peu­vent plus ? une poli­tique énergique et courageuse de maitrise des flux migra­toires ? Pas du tout. Ils deman­dent “un véri­ta­ble plan d’accueil des migrants” ».

Un discours de fermeté sous les feux médiatiques de la critique

Prob­a­ble­ment sous le coup de l’assassinat de deux jeunes femmes à Mar­seille par un clan­des­tin, le Prési­dent Macron indique en octo­bre lors d’un entre­tien télévisé large­ment dif­fusé dans les jour­naux d’informations qu’il sera intraitable avec les clan­des­tins… délinquants.

Puis ce sont les déboutés du droit d’asile et clan­des­tins que le chef de l’Etat entend faire recon­duire dans leur pays ou dans un pays sûr. Le Huff­in­g­ton Post nous explique « pourquoi la poli­tique sur les migrants a bas­culé dans une ligne “dure” » : « après avoir affiché un vis­age bien­veil­lant pen­dant la cam­pagne prési­den­tielle, Emmanuel Macron ne veut laiss­er aucun espace à la droite ».

Peu après, le Min­istre de l’intérieur annonce en sep­tem­bre dans la lignée du chef de l’Etat qu’il entend recenser les clan­des­tins dans les cen­tres d’hébergement d’urgence.

La bronca des associations d’aide aux migrants est largement relayée dans les médias

Le Monde indique le 20 novem­bre que « le monde asso­ci­atif lance des Etats généraux des migra­tions ». « 470 asso­ci­a­tions et col­lec­tifs d’aide aux migrants (…) espèrent ensem­ble peser face à la poli­tique du gou­verne­ment ». L’Opinion estime que « Gérard Col­lomb défie les asso­ci­a­tions » et que « la ligne rouge est franchie ». Selon La Nou­velle République, le Min­istre de l’intérieur engage un « dur­cisse­ment vis-à-vis des sans-papiers ». Ce qui est selon Actu Orange le 19 décem­bre “une vic­toire poli­tique” pour le FN.

Le 20 décem­bre, à 7h45, sur France inter, le ren­voi des déboutés du droit d’asile est qual­i­fié de « rafle », le recense­ment des clan­des­tins dans les dis­posi­tifs d’hébergement d’urgence de « tri ».

Une expres­sion égale­ment util­isée par le directeur de la Cimade sur France Info à l’occasion de la journée des réfugiés. Les élé­ments de lan­gage sem­blent partagés. Le point God­win — par des références aux heures les plus som­bres de l’histoire — est atteint. Ce procédé qui inter­rompt une dis­cus­sion, et insi­dieuse­ment tend à inter­rompre le proces­sus de réflex­ion lui-même.

À tel point que le Min­istre de l’intérieur se croit obligé de con­fess­er : « J’en ai marre de pass­er pour le facho de ser­vice ». Le camp du bien et celui du mal sont désor­mais con­nus. On com­prend l’empressement de cer­tains à faire le bon choix.

De nom­breux jour­naux relaient les tri­bunes en faveur d’un accueil encore plus large des migrants. Selon le point de vue, c’est un pilon­nage en règle ou une sim­ple cam­pagne d’opinion. Dans Le Monde le 30 novem­bre, « « La nasse libyenne a été en par­tie tis­sée par la France et l’Union européenne », dans Les Échos le 7 décem­bre, « Pourquoi nous avons besoin des migrants  », dans Medi­a­part le 18 décem­bre, « L’humanité de demain se con­stru­it par l’accueil des migrants aujourd’hui », dans Libéra­tion le 21 décem­bre, une let­tre ouverte au Prési­dent de la république dénonçant « un accueil des migrants indigne des valeurs et de l’histoire de la France », relayée le 29 décem­bre par L’Express, etc.

Le 10 jan­vi­er 2018, à la veille d’être reçues par le Pre­mier Min­istre, Le Parisien nous informe que « les asso­ci­a­tions met­tent la pres­sion avant un ren­dez-vous à Matignon. 26 d’entre elles vont con­tester devant le Con­seil d’E­tat une cir­cu­laire sur le recense­ment des migrants ». Et le jour­nal­iste de con­clure : « la polémique vire désor­mais au bras de fer ».

Le Figaro indique dans un arti­cle sur les migra­tions qu’en 2050, l’Afrique aura dou­blé sa pop­u­la­tion. En écho, un soci­o­logue ital­ien inter­viewé par L’Obs estime que l’accueil de migrants per­me­t­tra d’enrayer le déclin démo­graphique de l’Europe. Des pro­pos en phase avec le com­mis­saire européen chargé de l’immigration dans une tri­bune du 21 décem­bre sur le site de Politi­co : « nous devons tous être prêts à accepter l’immigration, la mobil­ité et la diver­sité comme nou­velle norme et à adapter nos poli­tiques en con­séquence ».

Le jour­nal Le Monde donne à l’occasion de la journée des réfugiés le 18 décem­bre la parole à sa spé­cial­iste des ques­tions de migra­tions. Le doute ne la tra­verse pas : « Tous les écon­o­mistes con­sta­tent que les migrants “rap­por­tent” plus qu’ils ne coû­tent ». « L’ouverture des fron­tières  flu­id­i­fie les pas­sages et ne bloque pas dans le pays d’exil ». Le Monde, quo­ti­di­en de référence ou jour­nal d’opinion ?

Sans sur­prise, La Croix estime que «  catholiques et protes­tants dénon­cent les mesures d’Emmanuel Macron ». Libéra­tion indique qu’après l’homélie de Noël du Pape pré­con­isant davan­tage d’accueils de migrants, « la presse approu­ve le Pape et craint la sur­dité des croy­ants ». Le jour­nal­iste s’appuie sur de nom­breux édi­to­ri­aux de quo­ti­di­ens favor­ables à l’homélie du Pape et à un plus large accueil de migrants : Sud-Ouest, La Presse de la Manche, Le Répub­li­cain Lor­rain, Le Cour­ri­er picard, La Montagne/Centre France, L’Union, Le Jour­nal de la Haute-Marne. Les admon­es­ta­tions se suc­cè­dent au gré des articles.

Sur France Inter, l’heure est à la mobil­i­sa­tion. Le 6 jan­vi­er l’émission Comme Un Bruit «  vous invite au Procès de l’Europe des fron­tières devant le Tri­bunal Per­ma­nent des Peu­ples ». On ne peut être plus clair. Ras­surez- vous, il ne s’agit que d’un « tri­bunal de con­science ». Par oppo­si­tion à ceux qui n’en ont pas ? « Le ver­dict sera ren­du dimanche 7 jan­vi­er 2018 à l’occasion de la clô­ture du Moussem-Fes­ti­val de l’Immigration et de la Tri­con­ti­nen­tale ». Un fes­ti­val où des invités provo­quent un malaise selon Le Parisien. Le 10 jan­vi­er, lors de l’émission « le télé­phone sonne », la députée LREM est bien seule face à des asso­ci­at­ifs, des élus et l’animatrice, tous d’accords pour nier la dis­tinc­tion entre réfugié poli­tique et clan­des­tin et estimer insuff­isant l’accueil de « 30 000 migrants » (relo­cal­isés NDLR). Un chiffre sou­vent mis en avant pour cri­ti­quer l’accueil de la France alors qu’il ne représente qu’une par­tie des arrivées. Pour présen­ter son émis­sion du 11 jan­vi­er L’heure bleue, Lau­re Adler évoque l’« ode aux migrants » de ses deux invités.

La con­tra­dic­tion sem­ble bien rare, voire par­fois inex­is­tante sur ce sujet, comme l’OJIM l’avait déjà con­staté en 2016.

De son côté, L’Obs tire à boulet rouge sur E. Macron dans son édi­tion du 11 jan­vi­er. Comme le décrit un jour­nal­iste de France Inter, la cou­ver­ture représente « Emmanuel Macron au vis­age fer­mé, les lèvres pincées, le regard métallique, un vis­age en noir et blanc qui monte la garde der­rière des bar­belés, et ce titre d’une ironie mor­bide, “Bien­v­enue au pays des droits de l’homme” ». Le lyrisme et l’émotion sont à leur comble.

Les premiers reculs sous l’effet conjugué du lobbying associatif et médiatique

La « vic­toire » d’une ligne dure selon Valeurs actuelles, à peine adop­tée par Emmanuel Macron, a déjà du plomb dans l’aile. Sous la pres­sion des asso­ci­a­tions d’aide aux migrants et d’un intense battage médi­a­tique, le Min­istre de l’intérieur bat en retraite.

Le ren­voi des déboutés du droit d’asile dans un pays tiers et sûr par lequel ils ont tran­sité est aban­don­né. Le Huff­in­g­ton Post nous informe que « Gérard Col­lomb renonce à l’idée du “pays tiers sûr” dans sa loi sur l’im­mi­gra­tion ».

Puis, le 3 jan­vi­er 2018, en « off » de sa con­férence de presse, c’est selon France Info le Prési­dent de la République qui réduit l’objectif de la cir­cu­laire Col­lomb. Il ne s’agit plus de recenser les clan­des­tins et déboutés du droit d’asile dans les cen­tres d’hébergement « en vue de l’éloignement effec­tif ». L’objectif est désor­mais de per­me­t­tre aux fonc­tion­naires de la pré­fec­ture d’aller dans les cen­tres d’hébergement pour faciliter les démarch­es admin­is­tra­tives. Les médias comptent les points. À ce stade, c’est : asso­ci­a­tions 2, gou­verne­ment : 0.

Comme le résume Europe 1, « la pres­sion est donc mise sur le gou­verne­ment qui, déjà, a com­mencé à aban­don­ner cer­taines pistes envis­agées. ». Dans Libéra­tion le 20 décem­bre, le directeur général de France Terre d’Asile et sou­tien d’E. Macron pen­dant la prési­den­tielle affirme qu’il « a encore d’autres points prob­a­bles du texte (pro­jet de Loi sur l’asile présen­té en 2018, NDLR) dans le viseur »…Les tri­bunes ne risquent pas de man­quer dans les medias. Le lob­by­ing des asso­ci­a­tions est « en marche », comme le décrit 20 Min­utes.

On le con­state, la ligne max­i­mal­iste en faveur de l’accueil incon­di­tion­nel a de fer­vents sup­port­ers dans le monde médi­a­tique et asso­ci­atif. Les voix dis­cor­dantes qui se font enten­dre – ou que l’on écoute ‑sont rares. Avant même le débat sur la Loi sur l’asile et l’immigration prévu début 2018, Breizh Info s’appuie sur la Loi de Finance 2018 pour soulign­er que les crédits de lutte con­tre l’immigration clan­des­tine con­naitront une baisse de 5 mil­lions d’euros en 2018. Tout ce buzz médi­a­tique pour ça ? Alors que, comme l’indique La Voix du nord, le bud­get 2018 con­sacré à l’asile, l’immigration et l’intégration sera porté en 2018 à 1,3 mil­liard d’euros, en hausse de 26 % par rap­port à 2017.

On trou­ve rarement dans les dif­férents arti­cles sur le sujet les prin­ci­paux enjeux :

- L’abandon du règle­ment Dublin, qui prévoit la réad­mis­sion dans le pre­mier pays européen où les deman­deurs d’asile sont arrivés. Ce qui revient à remet­tre en cause l’application par le France d’un texte nor­matif européen, pour une fois…

- Le respect des con­di­tions de séjour en France.

- Alors que comme l’indique Ouest-France et Le Monde, cer­tains pays comme l’Allemagne ou l’Autriche pla­fon­nent le nom­bre des deman­deurs d’asile à leurs capac­ités d’accueil, des asso­ci­a­tions, de rares élus et une large frange des medias plaident pour…que les clan­des­tins puis­sent rester en France. Ain­si, la dis­tinc­tion entre réfugié poli­tique et économique est qual­i­fiée de « nauséabonde » dans un blog de Medi­a­part. C’est une « facil­ité de lan­gage » pour un uni­ver­si­taire qui s’exprime dans L’Express.

À peine envis­agées, les mesures visant au respect des règles de séjour ont fait l’objet d’un tir de bar­rage par médias inter­posés. Les ter­mes du débat posé dans les organes d’information qui sem­blent don­ner le tem­po sont réduits à tout ou rien, toute mesure restric­tive étant stig­ma­tisée. A l’image de ce jour­nal­iste de France Cul­ture pour qui « la ques­tion qui est posée est donc bien celle du coût humain de toutes ces mesures des­tinées à couper l’Eu­rope du reste du monde ». Une coupure bien peu vis­i­ble ces derniers temps…

Crédit pho­to : VOA — Nico­las Pin­ault via Wikimé­dia (cc)

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