L’inauguration du « Club du Monde de l’économie » par Manuel Valls, de même que l’organisation de Forums en Afrique, estampillés Le Monde, interpellent côté déontologie.
Le premier ministre, Manuel Valls, sera le premier invité du tout nouveau « club du Monde de l’économie », lancé en grande pompe par le quotidien le 23 octobre. Ce dernier recevra dans son grand amphithéâtre 200 spectateurs qui auront dû montrer patte blanche pour suivre le cours d’une heure du professeur Valls consacré au “Réformisme à l’épreuve du réel”. Le Monde, qui cherche à se tailler sa part du gâteau dans l’événementiel, donne ainsi une tribune de rêve au premier ministre. Comment ensuite émettre des critiques sur les décideurs politiques ou économiques dans les colonnes du journal, si la direction sort le tapis rouge pour qu’ils soient les guest stars de ses propres manifestations ? Le sponsoring de ce club VIP du Monde, qui se réunira une fois par mois questionne également. Il est assuré par des établissements publics (La Poste, EDF), des grandes sociétés (Score), des cabinets d’audit influents (PWC) ou encore des cabinets d’avocats internationaux (Clifford Chance). Les journalistes du Monde pourront-ils conduire à leur sujet des enquêtes en toute indépendance et sans auto-censure ? Même inquiétude concernant les futurs prix Smart city du Monde, créés en partenariat avec une grande banque.
L’organisation de cinq forums en Afrique par an a démarré en septembre par une première édition à Abidjan en Côte d’ivoire. Censée étoffer « Le Monde Afrique », la chaîne numérique lancée sur Lemonde.fr en 2014, cette nouvelle activité événementielle n’est pas non plus anodine. Le Monde, pour être présent au Gabon, au Sénégal, ou encore au Cameroun et au Congo, devra inévitablement passer sous silence le peu de démocratie qui y règne. Louis Dreyfus, le directeur général du Monde, aurait rencontré plusieurs roitelets africains pour s’assurer de leur bienveillance, avant de lancer la nouvelle activité des forums. On voit le journal tirer ensuite à boulet rouges sur ces régimes !
Au sein de l’état-major du groupe, où ces critiques de la rédaction reviennent régulièrement, on assure évidemment que les risques au plan de la déontologie sont inexistants. Les lecteurs de la presse ne sont manifestement pas de cet avis. Chaque année, la confiance dans les médias recule un peu plus auprès de l’opinion.