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De Stérin aux financements étrangers : la souveraine reprise du magazine Marianne

3 octobre 2024

Temps de lecture : 4 minutes
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De Stérin aux financements étrangers : la souveraine reprise du magazine Marianne

Temps de lecture : 4 minutes

Il était déjà en négociations avec le groupe Czech Media Invest (CMI) à la mi-juillet : Jean-Martial Lefranc est désormais favori dans la course à l’acquisition du journal Marianne.

C’est face à l’opposition mas­sive des salariés de Mar­i­anne que l’homme d’affaires  Pierre-Édouard Stérin avait, le 18 juil­let 2024, aban­don­né son pro­jet de rachat du jour­nal heb­do­madaire. Faisant la fine bouche face à un « pro­fil [qu’elle jugeait] peu engageant », une par­tie de la rédac­tion avait « plaidé pour un rejet ferme et immé­di­at » du can­di­dat réputé catholique con­ser­va­teur et sa prox­im­ité sup­posée avec des élus de droite. Un titre « répub­li­cain » et mu par le « rejet du sec­tarisme » comme Mar­i­anne aurait-il pu tolér­er un tel pro­prié­taire ? Alors que ce dernier avait don­né toutes garanties d’indépendance…

Un nouveau profil pour Marianne

Le jour même, Jean-Mar­tial Lefranc entame les négo­ci­a­tions pour la reprise de Mar­i­anne avec son pro­prié­taire depuis 2018, Daniel Křetín­ský. Pro­duc­teur de ciné­ma, con­cep­teur de jeux vidéo, déten­teur d’une expéri­ence dans la presse (avec la hold­ing Finan­cière de loisirs), le lil­lois âgé de 62 ans s’intéresse aux médias de manière diverse : prési­dent du syn­di­cat des édi­teurs de presse indépen­dants, il prend aus­si la direc­tion de la chaîne TV6 – dis­parue depuis. Les entre­pris­es de presse menées par Lefranc ne sem­blent pas tou­jours heureuses à ses salariés : en témoigne son rachat l’éditeur de pub­li­ca­tions pour enfants Fleu­rus presse, passée sous son giron en 2008 et reven­due en 2015 après d’importantes réduc­tions des moyens (tant humains que matériels) au sein de l’entreprise… L’homme d’affaires mèn­era-t-il le même com­bat au sein de Mar­i­anne ?  « La meilleure garantie de péren­nité d’un titre de presse est de met­tre en œuvre la pra­tique que je mène depuis près de vingt ans en la matière : respect scrupuleux de l’ADN du titre et créa­tiv­ité con­stante dans l’évolution de son mod­èle d’affaire », a‑t-il indiqué à la rédac­tion de l’hebdomadaire. Un dis­cours à dou­ble tran­chant, que cer­tains salariés abor­dent comme un risque pour la survie économique du journal.

Quelle stratégie pour le potentiel repreneur ?

Alors qu’il avait été jugé un can­di­dat finan­cière­ment fail­li­ble, Lefranc a pro­posé une nou­velle offre rehaussée à 8,5 mil­lions d’euros. L’augmentation de cette sur­face finan­cière est en grande par­tie due à ses parte­naires, qui comptent du beau monde : par­mi la liste, le directeur d’une impor­tante banque libanaise, Antoun Sehnaoui, avait fait par­ler de lui en 2010, lorsque ses gardes du corps avaient ouvert le feu dans une boîte de nuit, cau­sant plusieurs blessés. Le choix d’un tel sup­port financier n’a — sem­ble-t-il — pas choqué le mag­a­zine à la ligne dite « sou­verain­iste », qui sem­ble préfér­er à la con­tri­bu­tion finan­cière d’une per­son­nal­ité française au casi­er vierge à des fonds étrangers plus con­tro­ver­sés… D’autres sou­tiens devraient par­ticiper à cette aven­ture, par­mi lesquels l’incontournable Julien Dray, dont le passé trot­skyste sem­ble à quelques lieues de la ligne « chevène­men­tiste » de l’actuelle direc­trice de la rédac­tion du jour­nal Nat­acha Polony, mais Julien Dray – un peu oublié – a sans doute besoin d’un haut parleur.

Les financements de la reprise

Pour l’heure, Czech Media Invest con­tin­ue de men­er les négo­ci­a­tions : les six investis­seurs et Jean-Mar­tial Lefranc sem­blent être prêts à apporter 3,5 mil­lions d’euros, auquel il faut ajouter, si l’on en croit La Let­tre, un prêt d’un mil­lion par voie de souscrip­tion auprès de l’Institut pour le finance­ment du ciné­ma et des indus­tries cul­turelles et un finance­ment par­tic­i­patif mené auprès de la plate­forme Lita. L’affaire doit être con­clue avant la fin de l’année et Jean-Mar­tial Lefranc espère bien ren­con­tr­er d’ici peu les salariés d’un mag­a­zine dont CMI sem­ble telle­ment vouloir se dépar­tir qu’il irait jusqu’à pren­dre en charge une par­tie des coûts de reprise…  Au total les mon­tants investis sem­blent beau­coup trop faibles pour assur­er la survie du titre plus que jamais en danger.

Voir aus­si : Daniel Křetín­ský, infographie

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