À l’occasion d’une enquête menée par Télérama, le magazine Quotidien, porté par Yann Barthès, a été mis en cause pour des méthodes de « management décrié[es] ». La première étape vers le naufrage de l’émission progressiste ?
Du cool pas si cool
C’est un article de Télérama, publié le 23 septembre 2024, qui a mis le feu aux poudres : l’émission Quotidien, « la plus cool du PAF », aurait-elle des choses à cacher ? Derrière les allures nonchalantes de son présentateur Yann Barthès, celui-ci est-il correct avec ses collaborateurs ?
Pour l’enquêteur de l’hebdomadaire, qui évoque des cas de « souffrance au travail, burn-out, management défaillant [et des] accusations de harcèlement », rien n’est moins sûr : « C’est une entreprise de dingue avec des moyens de dingue…mais qui peut aussi très facilement vous broyer », confie anonymement un ancien cadre. Un autre témoin, monteur, suggère avoir été licencié par la production (ndlr. Bangumi, créée par Yann Barthès et Laurent Bon) après avoir participé à un mouvement des intermittents de l’audiovisuel. Contredisant sa version, la production évoquera évasivement des « pauses cigarette prolongées à des moments inopportuns et d’autres difficultés rencontrées dans le passé. » Deux de ses collaborateurs pensent avoir été « blacklistés » pour avoir apporté leur soutien au monteur.
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La Cour et ses courtisans
En dépit de ses leçons de moral permanentes, l’émission Quotidien ne semble pas s’appliquer les préceptes qu’elle dispense. Le fonctionnement très vertical de la production évoquée dans l’article semble d’ailleurs d’un autre temps. Laurent Bon, le co-créateur de la production, est ainsi désigné comme le « roi Laurent », disponible pour « sa cour » seulement – ce que dément l’intéressé. « Attention à ne pas tomber en disgrâce : du jour au lendemain, tu peux être plus insignifiant qu’un pot de fleurs », explique à Télérama un salarié. Soulignant que l’émission n’avait aucune condamnation à son actif, Bon dément aussi l’accusation selon laquelle les départs d’anciens journalistes vers d’autres cieux seraient perçus par la production comme une « petite trahison ».
Faux humour et fausse impertinence
Une autre émission du producteur Bangumi est remise en question pour des méthodes similaires : ainsi, un salarié de l’émission des Reportages de Martin Weill semble avoir fait l’objet d’une dépression sérieuse. Il dénonçait dans une lettre des « intimidations, critiques acerbes, gratuites, publiques, incessantes » du jeune présentateur fétiche. Un présentateur qui avait déjà été épinglé par sa consœur Nassira el Moaddem – elle-même non à l’abri de débordements — des conduites « sexistes », susceptibles de « racisme » et de harcèlement lorsqu’ils étaient étudiants à l’ESJ Lille. Dans cette promotion, raconte ainsi el Moaddem, certains de ces étudiants « étaient revendiqués comme la preuve de leur “coolitude” et de leur impertinence. Leur logique : tout faire passer sous le vernis de l’humour. Une stratégie qui avait deux avantages : elle permettait d’abord de s’en laver facilement les mains et elle disqualifiait d’office ceux qui osaient s’y opposer ». Une description assez proche, en somme, des agissements de Quotidien…
Avec une part d’audience de l’émission estimée à 1,3 million de téléspectateurs (6,9 % de part de marché), Quotidien avait réalisé le 2 septembre sa meilleure rentrée historique. Un chiffre qui dépasse l’émission concurrente TMTP, qui a réuni 1,24 million de téléspectateurs en moyenne. Une rivalité qui n’a pas empêché Cyril Hanouna d’apporter son soutien à l’émission de Barthès. Dénonçant les méthodes pratiquées par les journalistes ayant enquêté sur l’émission de Barthès, l’animateur de TMTP a déclaré : « Pour moi il n’y a rien dedans ! Un anonyme qui dit ‘j’ai travaillé, chez Quotidien et y’a un mec qui m’a dit pourquoi t’as mis des baskets fallait mettre des mocassins’ je suis désolé, c’est comme le Complément d’enquête sur moi… » Un soutien inattendu du présentateur star de Canal +, à mi-chemin entre le baiser de Judas et la défense de ses pairs.
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