Un buzz chasse l’autre, l’affaire Pétain succède à l’affaire Benalla qui succédait à l’affaire… laquelle au fait ? La prégnance des chaînes en continu, l’effervescence des réseaux sociaux, tout contribue à enfermer l’information dans un temps court. C’est l’ambition de Disclose de rompre le cycle.
Journalisme d’intérêt général
Deux journalistes ont donc lancé début novembre 2018 Disclose, nouveau média d’investigation qui veut permettre aux journalistes d’enquêter si besoin plusieurs mois sur un unique sujet, seuls ou en équipe. Mathias Destal (ex Marianne) et Goeffroy Livosi (ex Médiapart, France inter, L’Express) constatent que « La plupart des rédactions n’ont pas les moyens de mobiliser un journaliste à plein temps sur une enquête ».
Les sujets seraient déterminés par un comité éditorial bénévole qui choisira les journalistes spécialisés en fonction des sujets : justice, environnement, industrie, fiscalité etc. Un mode de fonctionnement qui paraît à première vue un peu complexe.
Disclose annonce être en négociation avec des mécènes européens et américains dont la fondation Open Society de George Soros.
Financement participatif
Le modèle économique retenu est celui du financement participatif, de la donation et du mécénat, un modèle fragile que connaît bien l’Observatoire du journalisme puisque c’est le sien. Si l’Observatoire ne réalise que peu d’enquêtes au long cours, c’est bien faute de moyens. L’investigation menée en 2018 sur le rachat des médias des Balkans par le général Petraeus, ancien responsable des bombardements en Serbie est une exception. Elle a duré plus de six mois et nous a coûté plusieurs milliers d’euros. Nous n’avons pas pu la répliquer sur d’autres sujets par manque de moyens.
Disclose annonce être en négociation avec des mécènes européens et américains dont la fondation Open Society de George Soros, ce qui augure mal de l’indépendance du média même si celui ci assure que les mécènes n’auront pas droit de regard sur le choix des sujets et sur les budgets.
Tonalité de gauche
Disclose prend la forme d’une association à but non lucratif (tout comme l’Ojim). Il annonce avoir conclu des accords de diffusions avec d’autres médias venant de la gauche (Médiapart, Rue 89 maintenant intégré à L’Obs, Marsactu) ou du monde libéral libertaire le plus conformiste (Radio France, Konbini). La naissance d’un média de temps long ne peut être qu’une bonne nouvelle si le nouveau né sait échapper aux pesanteurs de la profession. Il pourra répondre ainsi à Emile Zola dans la présentation de “La Morasse” chez Marpon et Flammarion, à la demande des secrétaires de rédaction des journaux parisiens en 1888 :
“Mon inquiétude unique, devant le journalisme actuel, c’est l’état de surexcitation nerveuse dans lequel il tient la nation. […] Aujourd’hui, remarquez quelle importance démesurée prend le moindre fait. […]Quand une affaire est finie, une nouvelle commence, car les journaux ne peuvent vivre sans cette existence de casse-cou. Si des sujets d’émotion manquent, ils en inventent.”