Première diffusion le 04/09/2020
Chaque jour apporte une nouvelle confirmant la quasi-disparition de la liberté d’expression. Chasse aux sorcières contre Valeurs Actuelles pour une œuvre de fiction et une caricature, impossibilité de diffuser un film comme « Et les cloches se sont tues » etc. Un nouvel exemple avec les mésaventures du réalisateur du film Djihad Judiciaire, le cinéaste Gérard Boyadjian. Entretien.
Gérard Boyadjian, quel est votre parcours général de cinéaste ?
Je suis un cinéaste/acteur qui a commencé son cheminement au Mexique. Un parcours fait de nombreux voyages et d’exils, thématique récurrente exposée dans nombreux de mes films. Mon premier court métrage (STA VOLTA — 2007) co-réalisé avec mon frère suscite déjà ma première controverse (indignations malgré les prix) dans tous les festivals où il sera présenté.
Pour faire simple, ma filmographie se décompose en 2 catégories bien distinctes. La première est composée d’œuvres pudiques qui portent sur la nostalgie, la famille, l’hommage, la transmission et l’amour des anciens… La deuxième, diamétralement opposée, est faite d’oeuvres dites subversives, corrosives, qui mettent volontairement mal à l’aise, poussent le spectateur dans ses retranchements, dont le sarcasme acide ; l’humour noir, est une des armes cinématographiques que je déploie.
Quelle est la genèse de votre nouveau documentaire “Djihad judiciaire” ?
“Djihad Judiciaire” est né de ma condamnation au Tribunal Correctionnel pour mon film : “Chameau Pas d’Amalgame” réalisé en 2016. À ce moment-là, je découvre les tribunaux français pour la première fois, et à ma grande surprise, j’apprends qu’en France, on peut être jugé et condamné pour une œuvre de fiction. Dès lors je sens que j’ai un sujet de taille à développer, à décortiquer et à retranscrire avec pour absolue nécessité l’urgence d’avertir mes compatriotes sur les dérives de l’institution judiciaire. PS : Même si je ne l’ai jamais dit publiquement, j’étais fier de me retrouver sur le même banc des prévenus que Houellebecq (que j’admire).
Vous dénoncez des “officines de délation”, quel est leur rôle ?
“Les officines de délation” sont majoritairement les associations dites “anti-racistes” qui signalent massivement/systématiquement, au Parquet (qui poursuit), les contenus qui ne rentrent pas dans ce qu’ils considèrent être “la bonne pensée”. Car quand bien même ils tentent pernicieusement de le maquiller par cette fameuse “incitation à la haine raciale”, nous assistons aujourd’hui à la judiciarisation de la pensée ainsi qu’au délit d’opinion. Évidemment, il y a un enjeu lucratif très important (subventions gigantesques), mais pas que. Il y a aussi un enjeu politico-judiciaire qui consiste à museler toute pensée, opinion et expression, confrontant et contestant celle de la Doxa.
Vous parlez de réinstauration du délit de blasphème au seul bénéfice de l’Islam, par quel mécanisme ?
Le Procureur de la République dira ouvertement et explicitement, lors de mon procès : “Quand on s’attaque à l’islam on s’attaque à qui ? Bah aux Musulmans hein !” Cette sortie à elle seule, nous indique de manière implicite mais circonstancié qu’en France, en 2020, la République Laïque réinstaure le délit de blasphème et condamne désormais toute critique de la religion islamique sur le territoire national.
Extrait à 00:39:30 dans le documentaire : https://www.youtube.com/watch?v=k1dfwzajARU
D’où parlez vous maintenant et pourquoi ?
Je parle depuis la France mais aussi depuis l’étranger, où j’ai la chance d’évoluer, de faire des films et de donner quelques conférences sur les sujets de “liberté d’expression”. Je parle surtout pour que nos compatriotes comprennent que nous glissons vers quelque chose dont nous ne semblons pas mesurer la gravité historique. La liberté d’expression est morte en France. Notre démocratie s’effondre sous le poids de ses mensonges et de ses contradictions. Il y a urgence absolue.
Quand les pouvoirs publics confisquent la parole et l’expression, le peuple se retrouve démuni de moyens pour se défendre et pour faire valoir ses idées et ses combats
Quels sont vos projets ?
Pour rester sur notre sujet, je prépare actuellement “l’interprétation d’un ténor du barreau, d’un magistrat/magistrale, d’un dieu du prétoire qui délivrera une plaidoirie mémorable, formidable, afin qu’une loi puisse enfin voir le jour en vue d’abolir définitivement l’infamie qu’est “la blague”. Car derrière “le rire” se cache “la haine”. Celle qui nous rappelle inexorablement « les heures les plus sombres de notre histoire.” Bref, une démonstration qu’aucun totalitarisme idéologique ne s’avance et ne s’installe sans avoir préalablement fait valoir ses louables et honorables bonnes intentions.
Une oeuvre qui oscille entre Orwell et Ionesco
Comment peut on voir votre documentaire ?
Sur internet exclusivement en cliquant :