La presse papier souffre. Les ventes de la presse quotidienne nationale sont passées de 447 millions d’exemplaires en 2013 à 328 millions en 2017 (source UDECAM) et sans doute un peu moins en 2018 Parallèlement les recettes publicitaires du web, estimées à 3 milliards d’euros pour 2018, sont captées à hauteur de 80/90% par les réseaux sociaux, Facebook et Google principalement.
La directive droits d’auteur, qu’est ce que c’est ?
Cette directive adoptée en septembre 2018 par le Parlement européen permettra ou permettrait à la presse européenne de mieux négocier avec les géants américains qui s’arrogent la plus grande part du gâteau. D’un côté Google finance le Decodex du Monde ou L’Humanité, d’un autre il étrangle la presse en monopolisant les recettes numériques en compagnie de son concurrent Facebook et de quelques autres.
Le droit voisin a pour objectif d’établir des accords de licence entre les médias (les créateurs de contenus) et les grands acteurs d’internet (les tuyaux). L’article 11 vise à créer un droit voisin au droit d’auteur pour les éditeurs de presse. Un droit qui ressemble à un peu à la SACEM pour la chanson. Si vous écoutez une chanson à la radio ou à la télévision la SACEM va verser une redevance aux ayant droit (auteur, compositeur, interprète, société de diffusion). Les réseaux verseraient une redevance aux créateurs d’information dans un cadre financier qui reste à établir.
Des oppositions fermes
Le droit voisin rencontre deux types d’adversaires. D’un côté les multinationales américaines, GAFAM et autres. Ils voient d’un très mauvais œil l’obligation de partager la moindre part d’un gâteau sur lequel ils ont un quasi monopole. Ils arguent que si la presse au sens large du terme peut diffuser ses textes, vidéos, podcasts etc c’est grâce à eux. Ils ont des poches profondes et des agents d’influence nombreux et bien rémunérés à Bruxelles. De l’autre, certains partisans de la liberté sur internet (allemands notamment) voient dans le droit voisin un risque de création d’une nouvelle censure.
Un avenir incertain
Depuis le début 2019 le Parlement négocie avec la Commission et le Conseil pour élaborer un nouveau texte. Mais les élections européennes sont fixées au 26 mai 2019 et rien ne permet de dire qu’un nouveau vote obligatoire pourra avoir lieu avant cette date. Auquel cas ce serait le nouveau Parlement – largement remanié – qui serait amené à se prononcer. Ensuite le texte européen adopté doit être transposé en droit national puis rentrer dans le dur pour créer les structures nationales ad hoc ayant la capacité de récolter les fonds des GAFAM puis de les répartir. Un long chemin qui pourrait prendre deux ans …ou s’égarer dans les méandres parlementaires dûment travaillés par les lobbyistes des réseaux sociaux.