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L’école de journalisme de Lannion, vivier de talents pour Mediapart

13 août 2024

Temps de lecture : 5 minutes
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L’école de journalisme de Lannion, vivier de talents pour Mediapart

Temps de lecture : 5 minutes

La Bretagne est un pays dont le cœur médiatique bat au rythme de Ouest-France. C’est probablement vers ce titre que soupirent les étudiants de l’IUT de Lannion qui ne parviennent pas à être publiés dans Mediapart, malgré l’affection de ce média pour l’école.

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L’OJIM prend ses quartiers d’été : du dimanche 28 juil­let au dimanche 25 août nous repub­lions les arti­cles les plus sig­ni­fi­cat­ifs du pre­mier semestre.

Une école récente, tournée vers la presse locale

L’école de jour­nal­isme de Lan­nion est, avec celle de Cannes, la seule à recevoir les étu­di­ants directe­ment après le bac­calau­réat. Elle pro­pose un cur­sus en deux ou trois ans avec un DUT Infor­ma­tion-Com­mu­ni­ca­tion Jour­nal­isme, puis une année sup­plé­men­taire fac­ul­ta­tive pour obtenir une licence pro­fes­sion­nelle. Le but ? For­mer « des spé­cial­istes de l’in­for­ma­tion qui ont pour objec­tif de ren­dre compte de l’ac­tu­al­ité en appor­tant leur pro­pre analyse et leur éclairage. » On ver­ra que cette analyse est quelque peu ori­en­tée. L’école demande à ses étu­di­ants de faire des stages de qua­tre, puis huit semaines, et un dernier de douze semaines en troisième année, à moins de la faire en alternance.

Le DUT Jour­nal­isme de Lan­nion, créé en 1996, est recon­nu par la Com­mis­sion par­i­taire nationale de l’emploi des jour­nal­istes (CPNEJ) depuis 2004. Il accepte chaque année 28 élèves sur plus de mille can­di­da­tures, exam­inées sur la base d’un dossier et d’épreuves orales et écrites. Dans ce dossier, on regarde par­ti­c­ulière­ment les expéri­ences précé­dentes dans le jour­nal­isme ou les engage­ments asso­ci­at­ifs divers. De quoi cern­er les intérêts des can­di­dats… ou leurs idées. Les étu­di­ants sont ensuite prin­ci­pale­ment engagés dans la presse locale. Avec la jeunesse de l’école, cette car­ac­téris­tique empêche la for­ma­tion de met­tre en avant de grands noms de jour­nal­istes issus de ses bancs.

Voir aus­si : Écoles de jour­nal­isme, le dossier de l’OJIM

La presse régionale et ses sujets sont d’ailleurs large­ment mis en avant par le DUT de Lan­nion sur ses réseaux et sites publics. Out­re les travaux autour d’événements locaux, comme le prix Bayeux ou les événe­ments sportifs, la deux­ième année pro­pose des parte­nar­i­ats de dif­fu­sion avec cer­tains médias régionaux. De quoi faire con­naître les étu­di­ants et leur pré­par­er un port­fo­lio de nature à intéress­er leurs futurs employeurs. En effet, la presse régionale, quoique moins con­nue, est par­ti­c­ulière­ment lue en France, et elle est tou­jours en quête de jour­nal­istes pour ali­menter ses colonnes.

Un enseignement sur les discriminations pour de futurs journalistes, pourquoi faire ?

En général, les enseigne­ments pra­tiques en école de jour­nal­isme ne sont guère à blâmer. À moins de man­quer à la déon­tolo­gie, on ne peut qu’enseigner de bonnes pra­tiques lorsqu’il s’agit de mon­tage vidéo ou audio, et l’on ne saurait soupçon­ner une école de jour­nal­isme d’enseigner des pra­tiques illé­gales. En revanche, les enseigne­ments théoriques peu­vent être sujets à dis­cus­sion. À Lan­nion, on enseigne ain­si les « enjeux des dis­crim­i­na­tions », et l’intitulé inter­roge, surtout posé à côté d’autres sujets beau­coup plus généraux, à savoir ceux « de la sécu­rité numérique, de l’environnement, du sport ». Pourquoi par­ler d’enjeux des dis­crim­i­na­tions plutôt que de soci­olo­gie ou d’économie, thèmes plus larges, et acces­soire­ment moins ori­en­tés dans les termes ?

Journalistique peut-être, féministe certainement

Cet engage­ment con­tre les dis­crim­i­na­tions, ou plutôt con­tre l’homme blanc sup­posé les per­pétr­er, se retrou­ve sur les réseaux soci­aux de l’école, où l’écriture inclu­sive a une bonne place. Sur X (ex-Twit­ter), on apprend que les étu­di­ants par­ticipent à un « Hors-série de Breton·ne·s et fémin­istes » pour le Petit Echo de la Mode et qu’ils vont sur France Cul­ture pour par­ler du #MeToo­Me­dia, qui recense les dénon­ci­a­tions de har­cèle­ment des étu­di­antes (le plus sou­vent) à l’encontre des grandes per­son­nal­ités médi­a­tiques. Si le mou­ve­ment MeToo, pour cer­tains, a libéré une parole trop longtemps tue, on peut aus­si se deman­der s’il n’a pas été l’occasion de livr­er de sup­posés harceleurs à la vin­dicte pop­u­laire à par­tir de faits et gestes grossis et déformés.

Une proximité avec l’extrême-gauche

La presse régionale est la voie la plus sim­ple pour les diplômés d’une école de jour­nal­isme de petite taille comme celle de Lan­nion, c’est enten­du. Pour cet IUT, il en existe pour­tant une autre : la presse d’extrême-gauche. On peut ain­si con­stater que cer­tains étu­di­ants sont embauchés à Médi­a­part ou Street­press, et qu’Edwy Plenel suit l’école sur X (ex-Twit­ter). Dori­an Girard se félicite ain­si que X ‘avoir pu, « avec mes cama­rades de @InfocomLannion » exploiter une base de don­nées con­cer­nant les pes­ti­cides en France et con­clut : « Cela nous a per­mis de pro­duire deux enquêtes pub­liées sur Medi­a­part ». Quant à Dona­tion Huet, il dit sa « Fierté de pub­li­er lun­di sur Medi­a­part les pre­miers travaux de @Splannenquetes – un pro­jet qui est aus­si un peu, comme le rap­pelle Le Monde, un héritage de la péd­a­gogie sin­gulière portée par l’équipe d’@InfocomLannion. » Qui se ressem­ble s’assemble. Soit l’école accueille des étu­di­ants qui se trou­vent être d’extrême-gauche, ce qui est son droit le plus strict, soit ses enseigne­ments sont par­ti­c­ulière­ment com­pat­i­bles avec les titres de cette par­tie du spec­tre poli­tique et les médias savent, en embauchant ses étu­di­ants, qu’ils puisent à une source de qual­ité… du moins pour eux.

L’IUT a égale­ment ses entrées au Sénat grâce à la séna­trice PS Annie Le Houérou. Cette faveur, au demeu­rant impor­tante pour les étu­di­ants, est-elle accordée à l’école pour sa posi­tion géo­graphique ou sa posi­tion idéologique ? Sans doute au moins un peu la pre­mière, et peut-être un peu pour la seconde.

L’extrême-gauche, un marchepied pour les journalistes ?

L’IUT Info-Comm de Lan­nion sem­ble accorder une impor­tante au moins offi­cieuse à la presse d’extrême-gauche. Après tout, le cal­cul est bon. Même si les titres d’extrême-droite sont de plus en plus nom­breux, ils restent moins lus et plus attaqués, ce qui peut rebuter les plus courageux. Medi­a­part serait-il une bonne voie d’entrée dans le jour­nal­isme pour un jeune diplômé ayant quelques bases pra­tiques, et surtout de pro­fondes racines idéologiques ?

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