Ancien commissaire au Plan, Pierre-Yves Cossé invite, dans une tribune datée du mercredi 25 mai, l’inénarrable Jean-Pierre Elkabbach à songer à la retraite.
Reprenant le célèbre mot de Georges Marchais, « Taisez-vous Elkabbach ! », ce dernier estime qu’« on entend trop Elkabbach et pas assez ses invités », au point d’éprouver parfois une grande « frustration ». S’appuyant sur son expérience de téléspectateur assidu de « Bibliothèque Médicis », il juge que le journaliste n’est souvent pas à la hauteur des personnalités interrogées.
En effet, Elkabbach, « surinformé, sur ce qui fait du bruit dans l’actualité, sur les “foutaises élevées à la catégorie d’évènements” multiplie les questions de bas niveau et abaisse le débat ». Ainsi Jean-Louis Debré, interrogé sur son « Journal 2007/2016 », a‑t-il été sans arrêt poussé à parler d’un sujet polémique secondaire : un éventuel engagement dans la campagne des présidentielle pour barrer la route à Sarkozy.
Vendredi dernier, l’un des thèmes de l’émission était : « Le piège Daech ». Encore une fois, les invités, Pierre-Jean Luizard, Bidar Abdenou, Céline Pinard, ont été habilement manœuvrés par Elkabbach afin qu’ils disent ce que le présentateur voulait entendre sur le sujet. Ainsi, « Abdenou et Céline furent pratiquement dispensés de présenter leurs ouvrages. Il leur suffisait de répondre aux questions de JP Elkabbach, qui avait des idées précises », estime Cossé.
Pour Elkabback, Daech va être écrasé militairement et le problème sera aussitôt réglé. Sauf que pour Pierre-Jean Luizard, universitaire, le problème principal est avant tout le devenir des sunnites, qui refuseraient le retour d’un État chiite et ont d’ailleurs accueilli les jihadistes en libérateurs à Mossoul. Pour cette analyse divergente, et jugée trop complexe pour le téléspectateur, M. Luizard sera coupé et même traité de « complaisant ».
Concernant la question du retour des jihadistes français sur le territoire national, et sur les « centre de déradicalisation » mis en place pour l’occasion, l’universitaire prendra également le contre-pied de ce que voulait entendre Elkabbach. Pour lui, cette solution est bonne pour des alcooliques et drogués, pas pour des jihadistes endoctrinés.
« C’était de trop, la parole lui fut retirée et on ne saura pas s’il avait une solution de substitution à proposer », rapporte Pierre-Yves Cossé. Quant aux autres invités, on ne les entendit presque pas. « Sur des sujets aussi complexes, les points de vue sont différents et la confrontation est nécessaire. Le métier du journaliste est d’organiser cette confrontation de façon équilibrée. En revanche, il n’a pas à opposer son avis personnel », explique l’ancien commissaire au Plan.
En effet, « on n’a que faire de l’opinion de Jean-Pierre Elkabbach sur Daech. Il peut changer de métier, mais il se fait tard ». Ainsi, « à 77 ans et après quarante cinq ans d’interventions régulières à la télévision, le moment n’est-il pas venu, Jean-Pierre Elkabach, d’écrire vos souvenirs, qui seront d’une richesse exceptionnelle, puis de venir les présenter à Bibliothèque Médicis ? », interroge Cossé. Pas sûr que l’indéboulonnable ami des puissants apprécie l’attention.