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En Pologne sous Donald Tusk, les journalistes d’opposition étaient surveillés de près…

23 mai 2016

Temps de lecture : 5 minutes
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En Pologne sous Donald Tusk, les journalistes d’opposition étaient surveillés de près…

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Le 11 mai, le gouvernement conservateur (PiS) de Beata Szydło présentait un audit des 8 ans de gouvernement « libéral » sous la direction de Donald Tusk, puis d’Ewa Kopacz à partir de 2014 quand Donald Tusk est devenu président du Conseil européen.

Cer­tains des rap­ports présen­tés ont abor­dé la ques­tion de la sur­veil­lance illé­gale de lead­ers poli­tiques et de jour­nal­istes d’opposition par les ser­vices spé­ci­aux dans les années 2007–2015. La chan­cel­lerie du pre­mier min­istre a ain­si pub­lié une liste de 42 jour­nal­istes sur­veil­lés par le con­tre-ren­seigne­ment (ABW) et le bureau de lutte anti-cor­rup­tion (CBA). Une liste que voici :

En Pologne sous Donald Tusk, les journalistes d’opposition étaient surveillés de près…

En Pologne sous Don­ald Tusk, les jour­nal­istes d’opposition étaient sur­veil­lés de près…

Il s’agit notam­ment de jour­nal­istes qui se sont intéressés à la cat­a­stro­phe aéri­enne de Smolen­sk, où le prési­dent Lech Kaczyńs­ki a trou­vé la mort, à l’affaire des enreg­istrements secrets qui ont per­mis de con­naître les con­ver­sa­tions de grands dirigeants poli­tiques et économiques du pays en 2013–2014, et à plusieurs affaires de cor­rup­tion. On trou­ve par exem­ple sur cette liste le nom de Cezary Gmyz, un jour­nal­iste d’investigation qui avait fait couler beau­coup d’encre en novem­bre 2012 quand il avait révélé la présence de traces d’explosifs détec­tée par les enquê­teurs polon­ais deux ans et demie après Smolen­sk. Un exem­ple par­mi d’autres de jour­nal­iste sur­veil­lé après avoir mis à jour des affaires de cor­rup­tion, c’est Paweł Miter (n° 3 de la deux­ième liste ci-dessus), auteur d’une provo­ca­tion qui avait per­mis de mon­tr­er que le prési­dent du tri­bunal de Gdańsk était au ser­vice du pre­mier min­istre Don­ald Tusk dans l’enquête sur l’affaire de la fail­lite d’une insti­tu­tion para­ban­caire, Amber Gold. Les noms lais­sés vides dans la liste ci-dessus cor­re­spon­dent à des jour­nal­istes pour lesquels l’intérêt des ser­vices secrets découlait d’une réelle activ­ité de con­tre-espi­onnage ou de lutte anti-corruption.

Les révéla­tions se suiv­ent depuis le début de l’année sur la sur­veil­lance et les écoutes illé­gales de jour­nal­istes à l’époque du gou­verne­ment de coali­tion PO-PSL. Début mars, l’hebdomadaire con­ser­va­teur Do Rzeczy pub­li­ait une liste com­por­tant encore d’autres noms. Les jour­nal­istes con­cernés s’étaient intéressés de trop près à dif­férentes affaires de cor­rup­tion qui avaient éclaboussé le gou­verne­ment de Don­ald Tusk ou bien ils étaient les rédac­teurs en chef de jour­naux d’opposition, comme Paweł Lisic­ki et son adjoint, Piotr Gabryel, qui dirigeait le pres­tigieux quo­ti­di­en libéral-con­ser­va­teur Rzecz­pospolita avant d’être rem­placés à l’initiative du gou­verne­ment de Don­ald Tusk (ils sont aujourd’hui à la tête de Do Rzeczy).

Les moyens mis en œuvre par les ser­vices polon­ais allaient de la fila­ture et de l’utilisation des don­nées des opéra­teurs de télé­phonie mobile, pour con­naître les numéros appelés et les tra­jets réal­isés par les jour­nal­istes, à la mise sur écoutes dans cer­tains cas.

Le 16 mai, le jour­nal con­ser­va­teur Gaze­ta Pol­s­ka codzi­en­nie pub­li­ait de nou­velles révéla­tions sur les opéra­tions de sur­veil­lance par le con­tre-espi­onnage mil­i­taire (SKW) qui s’étaient inten­si­fiées après la cat­a­stro­phe de Smolen­sk, c’est-à-dire après le 10 avril 2010. Auraient été vic­times de cette sur­veil­lance rap­prochée des jour­nal­istes de Gaze­ta Pol­s­ka, du jour­nal catholique Nasz Dzi­en­nik, de la radio catholique Radio Mary­ja et de la télévi­sion publique où tra­vail­laient encore, jusqu’en 2010, des jour­nal­istes d’opposition qui s’intéressaient de près à la cat­a­stro­phe de Smolen­sk, comme Ani­ta Gar­gas, auteur de plusieurs doc­u­men­taires sur la ques­tion (licen­ciée en octo­bre 2010 après l’émission d’un de ces doc­u­men­taires, très cri­tique pour la manière dont l’enquête sur la cat­a­stro­phe de Smolen­sk était menée). Le par­quet de Varso­vie a été saisi de l’affaire.

Toutes les opéra­tions des ser­vices spé­ci­aux polon­ais à l’époque du pre­mier min­istre Don­ald Tusk n’avaient toute­fois pas été aus­si dis­crètes. Le 18 juin 2014, l’hebdomadaire Wprost, qui le pre­mier avait pub­lié une par­tie des fameux enreg­istrements réal­isés secrète­ment, fai­sait l’objet d’une perqui­si­tion de pro­cureurs assistés par des agents de l’ABW, le ser­vice de con­tre-ren­seigne­ment, en présence de caméras de télévi­sion rameutées par les jour­nal­istes du jour­nal. Les représen­tants de l’ordre ont ain­si été filmés en direct alors qu’ils ten­taient de saisir les enreg­istrements en pos­ses­sion de la rédac­tion de Wprost et alors que Syl­west­er Latkows­ki, le rédac­teur en chef du mag­a­zine (n° 14 sur la pre­mière liste ci-dessus), résis­tait à la ten­ta­tive de lui arracher son ordi­na­teur des mains. Cette vio­la­tion fla­grante du droit de la presse en Pologne n’avait pas à l’époque fait réa­gir la Com­mis­sion Européenne ni les médias européens qui n’ont fait mine de s’inquiéter de la lib­erté de la presse en Pologne qu’après l’arrivée du PiS au pou­voir après les élec­tions du 25 octo­bre 2015. En avril 2016, le nou­veau coor­di­na­teur des ser­vices spé­ci­aux Mar­iusz Kamińs­ki a annon­cé une nou­velle enquête du par­quet au sujet de cette perqui­si­tion dans les locaux de Wprost. La pre­mière avait été annulée en avril 2015.

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