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Entretien avec Marc Aboflan, responsable pour l’Afrique au sein de la Journalism Trust Initiative (JTI) 

13 octobre 2024

Temps de lecture : 5 minutes
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Entretien avec Marc Aboflan, responsable pour l’Afrique au sein de la Journalism Trust Initiative (JTI) 

Temps de lecture : 5 minutes

 « La lib­erté des jour­nal­istes africains est encore large­ment entravée dans plusieurs pays du continent »

Marc Aboflan est le Respon­s­able pour l’Afrique au sein de la Jour­nal­ism Trust Ini­tia­tive (JTI), un pro­gramme porté par RSF. Il a une expéri­ence de plus de dix ans dans les domaines du jour­nal­isme, du développe­ment des médias, et de la com­mu­ni­ca­tion. Son tra­vail au sein de JTI con­siste à pro­mou­voir des pra­tiques éthiques dans les médias africains, en aidant ces derniers à adopter les meilleures pra­tiques en ter­mes de trans­parence et de qual­ité de traite­ment de l’information. Dans cet entre­tien avec OJIM Afrique, il évoque la mis­sion de la Jour­nal­ism Trust Ini­tia­tive, en indi­quant la manière dont cette insti­tu­tion encour­age les médias pour qu’ils s’engagent dans des pra­tiques jour­nal­is­tiques éthiques. Toute­fois, Marc Aboflan se plaint de la lib­erté des jour­nal­istes africains qui, dit-il, est entravée dans plusieurs pays.

OJIM : 1– Par­lez-nous un peu de la Jour­nal­ism Trust Ini­tia­tive avec la mise en place d’un mécan­isme inter­na­tion­al récom­pen­sant les pra­tiques jour­nal­is­tiques éthiques ?

Marc Aboflan : La Jour­nal­ism Trust Ini­tia­tive est une norme inter­na­tionale qui vise à encour­ager les médias à s’en­gager dans des pra­tiques jour­nal­is­tiques trans­par­entes et éthiques. À tra­vers un cadre cer­ti­fi­able, la JTI per­met de récom­penser les médias qui respectent un min­i­mum de règles éthiques et pro­fes­sion­nelles. En obtenant cette cer­ti­fi­ca­tion, les médias peu­vent démon­tr­er leur engage­ment à fournir une infor­ma­tion fiable, tout en amélio­rant la trans­parence et la respon­s­abil­ité envers leurs audi­ences. Ce mécan­isme a déjà été adop­té par plusieurs médias dans le monde, dont plus de 500 sont basés en Afrique.

OJIM : 2– Com­ment tra­vaillez-vous avec les médias africains ?
Marc
Aboflan : Nous tra­vail­lons avec les médias africains en leur four­nissant des out­ils et des ressources pour adopter le stan­dard de la JTI. Il s’ag­it de for­ma­tion, de coach­ing mais égale­ment de sou­tien tech­nique et financier pour se con­former à la norme. Notre approche est par­tic­i­pa­tive, impli­quant les médias dans un proces­sus d’au­to-éval­u­a­tion qui leur per­met d’analyser et d’amélior­er leurs pra­tiques internes. Nous col­laborons égale­ment avec des asso­ci­a­tions pro­fes­sion­nelles et des régu­la­teurs pour pro­mou­voir ces normes au niveau insti­tu­tion­nel. Nos efforts se con­cen­trent sur la sen­si­bil­i­sa­tion, la for­ma­tion et l’accompagnement des médias à chaque étape du proces­sus de certification.

OJIM : 3– Com­ment analy­sez-vous la qual­ité de l’information en Afrique de l’Ouest ?
Marc Aboflan 
: La qual­ité de l’information en Afrique de l’Ouest varie énor­mé­ment d’un pays à l’autre et même au sein de chaque pays. Il existe des médias qui font un tra­vail remar­quable, mal­gré des con­textes dif­fi­ciles, tan­dis que d’autres sont con­fron­tés à des défis liés à la pres­sion poli­tique, au manque de moyens financiers et à l’absence de for­ma­tion. On observe égale­ment une forte pro­liféra­tion des fauss­es infor­ma­tions, accen­tuée par les réseaux soci­aux. Il est donc essen­tiel de ren­forcer les capac­ités des médias, notam­ment en matière de véri­fi­ca­tion des faits et de respect de l’éthique journalistique.

OJIM : 4– Avez-vous des solu­tions pour ren­forcer cette qual­ité de l’information ?
Marc
Aboflan : Oui, la pre­mière solu­tion passe par la for­ma­tion con­tin­ue des jour­nal­istes et des acteurs des médias. Il est essen­tiel de leur offrir des out­ils et des com­pé­tences pour mieux nav­iguer dans les défis mod­ernes de l’in­for­ma­tion, tels que la dés­in­for­ma­tion. Ensuite, la mise en place de mécan­ismes comme la JTI per­met d’encourager les médias à adopter des pra­tiques plus trans­par­entes. Enfin, il faut aus­si tra­vailler sur la via­bil­ité économique des médias, car des médias finan­cière­ment sta­bles sont plus à même de pro­duire un con­tenu de qual­ité, indépen­dant et rigoureux.

OJIM : 5– Quelles sont les con­di­tions pour cer­ti­fi­er un média ?

Marc Aboflan : La cer­ti­fi­ca­tion JTI repose sur un ensem­ble de critères qui éval­u­ent les pra­tiques internes du média. Cela inclut la trans­parence de la gou­ver­nance, la diver­sité édi­to­ri­ale, l’indépen­dance finan­cière et la capac­ité à cor­riger les erreurs. Les médias doivent pass­er par un proces­sus d’auto-évaluation, suivi d’un audit externe pour véri­fi­er la con­for­mité aux stan­dards. Une fois cer­ti­fiés, ils peu­vent affich­er ce statut auprès de leurs lecteurs, ce qui con­stitue une mar­que de con­fi­ance et de qualité.

OJIM : 6– Selon vous, le jour­nal­iste africain a‑t-il une totale liberté ?

Marc Aboflan : La lib­erté des jour­nal­istes africains est encore large­ment entravée dans plusieurs pays du con­ti­nent. Ils doivent sou­vent com­pos­er avec des pres­sions poli­tiques, économiques, voire par­fois sécu­ri­taires. Cepen­dant, cette sit­u­a­tion varie selon les pays et les con­textes. Dans cer­taines régions, les jour­nal­istes jouis­sent d’une plus grande lib­erté, tan­dis que dans d’autres, les restric­tions sont encore nom­breuses. Il est essen­tiel de con­tin­uer à lut­ter pour cette lib­erté comme nous le faisons avec mes col­lègues  car un jour­nal­isme libre est un pili­er essen­tiel pour la démoc­ra­tie et la transparence.

OJIM : 7– Que pré­conisez-vous de faire dans l’avenir pour sen­si­bilis­er davan­tage les médias africains ?

Marc Aboflan : Il est cru­cial de ren­forcer les réseaux de col­lab­o­ra­tion entre les médias africains et les organ­i­sa­tions inter­na­tionales. La sen­si­bil­i­sa­tion doit aus­si pass­er par des cam­pagnes d’information qui val­orisent l’importance d’un jour­nal­isme éthique et trans­par­ent. En par­al­lèle, il faut dévelop­per des pro­grammes de for­ma­tion à grande échelle, notam­ment sur les enjeux numériques, comme la lutte con­tre la dés­in­for­ma­tion et l’adop­tion de l’in­tel­li­gence arti­fi­cielle dans les rédac­tions. L’adoption de normes comme la JTI doit égale­ment être soutenue par les instances régu­la­tri­ces pour que les médias aient une moti­va­tion à se con­former aux stan­dards internationaux.

Pro­pos recueil­lis par Mapote Gaye

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