Leurs propositions doivent « libérer l’info » : jeudi 30 novembre, à Paris, une centaine de médias et organisations se réunissaient pour les États généraux de la presse indépendante. À cette occasion, cinquante-neuf propositions ont été formulées…
C’est une réforme globale du secteur, à laquelle aspirent les médias et organisations qui assistaient, le 30 novembre dernier à Paris, à la réunion des États généraux de la presse indépendante. Des États généraux à différencier des autres États généraux de l’information, dont l’OJIM mentionnait la tenue dans de récents articles. Cette réunion publique visait à présenter les propositions élaborées depuis deux mois avec ses différents protagonistes ; réunis dans la capitale, ceux-ci se retrouveront prochainement dans quelques grandes villes France (Lille, Strasbourg, Marseille, Lyon, Nantes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Vire ou Toulouse).
Des États généraux à l’initiative d’un groupe marqué
C’est le Fonds pour une presse libre qui est à la manœuvre de l’organisation des États généraux de la presse indépendante. À s’y pencher de plus près, cet organisme à but non lucratif, qui entend notamment « promouvoir un journalisme d’intérêt public, portant des valeurs humanistes, au service du bien commun et de l’égalité des droits, du rejet des discriminations et du refus des injustices », est composé de figures venues de médias ou de familles politiques… pas très pluralistes. À la présidence, François Bonnet est un ancien de Libération et du Monde ainsi qu’un membre fondateur de Mediapart. Administratrice, Christine Lazerges est un ancien député socialiste. La Trésorière, passée par Rue89 et Les Inrocks rivalise d’impartialité avec la directrice exécutive, qui a « travaillé dans des ONG sur les droits des migrants ».
Une réunion très politique
C’est donc sans surprise que la réunion du 30 novembre abordait des sujets politiques, à l’image du conflit israélo-palestinien mais aussi des sujets internes dont se sont largement emparées certaines arcanes politiques, c’est le cas de la concentration des médias ou les droits des rédactions. L’objet de la réunion, intitulée « Libérons l’information des pouvoirs politiques, des médias de la haine, des milliardaires », ne laissait guère augurer la ligne impartiale de l’évènement. Au menu, la question des « offensives multiples lancées par les puissances politiques et économiques contre un journalisme indépendant, d’intérêt public et au service des citoyennes et des citoyens » laisse prévoir qu’il s’agira davantage de défendre les organes du type de StreetPress que TV Libertés. Il aura également été question de la reconstruction d’une « relation de confiance » avec l’ensemble des publics ainsi que des réformes à envisager du système d’information.
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Concentration des médias et droits des rédactions
Les cinquante-neuf propositions formulées se découpent en quatre parties majeures.
La première, relative à la concentration des médias et au droit des rédactions, envisage notamment l’interdiction par tout groupe industriel dont l’activité principale n’est pas l’information de devenir l’opérateur direct d’un média. Autant parier directement sur la mort immédiate de la profession, à se référer aux actuels détenteurs de médias… L’obligation « d’interdire la transformation d’une chaîne d’information en une chaîne d’opinion » par l’intermédiaire de conventions passées par l’ARCOM pour l’attribution des fréquences TNT publiques et en accès libres laisse également interrogateur tant l’impartialité de toutes les chaînes d’information en continu laisse à désirer. La gouvernance des rédactions par une personnalité juridique indépendante de l’actionnaire est risible, puisque l’actionnaire ne peut sciemment cautionner une ligne éditoriale non conforme à la ligne qu’il entend donner au journal, au risque de se séparer de son titre.
La deuxième partie, qui concerne le renforcement du droit à l’information, comporte une somme de mesures aberrantes, promettant l’immunité de poursuites du journaliste notamment en cas de violation du secret défense. Un autre volet est accordé à la primauté de l’accès à l’information sur les secrets politico-financiers, ce qui risque de créer des turbulences en matière de violation potentielle du secret des affaires. La limitation du champ des exceptions au secret des sources et le renforcement du statut du lanceur d’alerte constituent d’autres de leurs préoccupations.
Un programme liberticide
La troisième partie entend défendre les journalistes face à la précarité avec sanctions à la clef pour les entreprises ne respectant pas le droit du travail, l’augmentation des tarifs minimum des piges ou la systématisation de la participation des dépenses courantes du travail des pigistes. Enfin, la dernière partie entend proposer des mesures de réformes des aides publiques à la presse. Il s’agira là de conditionner les aides notamment au respect de la parité hommes-femmes à tous les postes ou de supprimer les aides à la presse pour un média condamné pour propos sexistes, racistes, « LGBTphobes », etc. Tout un programme…liberticide comme nombre de ces propositions.