C’est une bataille de géants qui se profile aux États-Unis entre les compagnies téléphoniques qui transmettent les données et ceux qui fournissent des données (Netflix), lesquelles permettent d’accéder à de nouvelles données (Google), ou de les diffuser (Facebook, Twitter), une bataille au nom de la liberté mais en réalité menée pour la captation de la valeur ajoutée sur la toile mondiale.
Modulation des prix
La Commission Fédérale pour les communications (FCC) dirigée par le républicain Ajit Pai veut supprimer la neutralité du net, une neutralité déjà mise à mal par les atteintes à la liberté d’expression venant des GAFA. Jusqu’ici le propriétaire du tuyau (en France via votre abonnement téléphonique, Orange, SFR ou autres) ne pouvait moduler ses prix en fonction de votre utilisation plus ou moins intense d’internet ou en fonction du site visité. Un internaute téléchargeant des films consommera plus de bande passante que celui qui se contente d’envoyer des courriels sans images ni vidéos. La volonté des ATT et autres Verizon est de pouvoir moduler leurs prix en fonction de l’utilisation d’internet. Prix modulés vis-à-vis des fournisseurs de contenus comme vis-à-vis des clients abonnés. Si Netflix consomme plus de bande passante il pourra se voir demander une contribution (via un mécanisme non précisé). Si Mister Smith de Rochester ou Monsieur Dupont de Romorantin voit trois films par jour son abonnement pourra être modulé à la hausse.
Un risque de censure technologique
Mais il y a plus dans le projet de Pai. L’accès à certains sites pourra être ralenti, ou au contraire facilité. On voit le risque de glissement d’une modulation économique à une modulation idéologique. En d’autres termes aux États-Unis un site comme celui de l’Observatoire du journalisme pourrait se voir ostracisé (comme non politiquement correct) en ralentissant son accès et un site politiquement correct favorisé.
Les Google, Facebook et autres Netflix s’opposent à cette dérégulation au nom de la « neutralité du net ». Une belle politique de Tartuffe alors que Facebook veut filtrer politiquement l’information et que YouTube (propriété Google) vient de supprimer le compte du blogueur nationaliste breton Boris Le Lay, réfugié au Japon, et au moment où Twitter veut pratiquer une forme de censure. Les Européens ayant tendance à suivre l’exemple américain avec un temps de retard, l’évolution du dossier outre-Atlantique mérite d’être suivie de près.
Crédit photo : © OJIM via Envato Elements