Le policier qui aurait provoqué la mort du repris de justice George Floyd a été déclaré coupable, c’était écrit. Un peu avant le NYT avait licencié un de ses principaux rédacteurs dans une affaire qui aurait enchanté Alfred Jarry, l’auteur d’Ubu roi.
Saint George Floyd
Nous ne referons pas le panégyrique, par les médias de grand chemin, de Saint George Floyd, martyr et bientôt canonisé. Comme l’a dit Joe Robinette Biden, entre deux siestes, il avait prié pour que le jury « prenne la décision qu’il faut ». Une représentante du Congrès avait déjà prévenu : si le verdict n’allait pas dans le sens de la culpabilité, il faudrait descendre dans la rue. In God we trust (nous mettons notre confiance en dieu) est-il écrit sur les billets verts des dollars américains. La providence a bien fait les choses : le désigné coupable sera condamné. D’ailleurs, une des rédactrices en chef (citée par l’ancien ambassadeur d’Israël en France, Ran Halévi dans le Figaro) du Washington Post a bien tiré la leçon de l’affaire en soulignant : à Minneapolis, siège du procès, c’est l’Amérique des blancs qui était accusée. En raison d’un « crime originel » dont on peut deviner qu’il deviendra une antienne, une espèce de Shoah bis.
Le NYT et la chasse au mot fantôme
C’est une histoire presque incroyable, qui arrive maintenant outre-Atlantique mais qui pourrait arriver demain en Europe. Un héros malheureux, Mr McNeil, un voyage au Pérou avec des lycéens, une question délicate, un mot honni prononcé, et une démission contrainte
Le héros malheureux tout d’abord, Donald McNeil ; avec un nom pareil il doit être d’origine irlandaise ou écossaise, autant dire blanc. Ne disons rien sur le prénom qui rappelle un récent président américain. Il a 67 ans, on peut le considérer comme « blanc de plus de 50 ans », il tient une chronique prestigieuse, science et médecine.
Un voyage en Amérique latine, le Pérou. C’est joli le Pérou, Lima, Cuzco, les incas, le quechua, les lamas, Zorino dans le Temple du soleil d’Hergé, on s’y croirait.
Un voyage pédagogique avec des lycéens, bonjour les enfants, ça va bien ? Une petite péruvienne à l’âme de future délatrice (un mal universel), sourire angélique, pose une question innocente : une fille de son école – 12 ans – a posté une vidéo où elle a employé le mot Nigger (nègre) ; doit-on la renvoyer Monsieur le journaliste ?
Donald se veut pédagogue, il demande si la fillette n’a fait que citer le mot ou si elle l’a utilisé comme insulte ? Et, vous allez frémir d’horreur, il prononce le mot qui commence par un N. Enfers et tremblements.
Un aimable participant, un confrère peut-être, relate l’épisode à la direction du NYT qui illico envoie ses inspecteurs pour avoir le fin mot de cette grave affaire. L’enquête prouve qu’il a prononcé le N (je n’ose écrire le mot en entier), mais que son intention était pure. Il reçoit un blâme, venez Donald que je vous tire l’oreille et ne recommencez plus mon gaillard, la police de la pensée et des mots veille.
Affaire classée ? Vous n’y pensez pas mon bon, une pétition est signée plus tard par 150 collaborateurs du journal demandant l’exclusion du blanc de plus de 50 ans pour avoir employé un langage (le terrible mot N) qui ne peut être admis dans une salle de rédaction. McNeil est contraint à la démission. Certains diront que l’Amérique est en train de se suicider ? Ce ne serait pas forcément une mauvaise chose…