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Un exemple d’influence de l’industrie d’armement sur les médias, Politico et Lockheed Martin

10 octobre 2021

Temps de lecture : 4 minutes
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Un exemple d’influence de l’industrie d’armement sur les médias, Politico et Lockheed Martin

Temps de lecture : 4 minutes

Nous reprenons un article du site Les Crises du 30 septembre 2021 sur la politique d’influence qui illustre – à la suite d’une maladresse éditoriale – une partie du comportement des industriels de l’État profond américain. Le journal sur abonnements Politico publié aux États-Unis et en Europe est une émanation atlantiste rachetée récemment par le groupe allemand Springer Verlag dont l’actionnaire de référence est le fonds américain KKR depuis 2019 et qui a déjà investi dans les médias dans les Balkans via le général David Petraeus, ancien chef de la CIA.

Politico supprime discrètement Lockheed Martin de son bulletin d’information

Cette déci­sion apparem­ment prise à la suite d’un tweet viral atti­rant l’attention sur ses rela­tions avec le com­plexe militaro-industriel.

Source : Respon­si­ble State­craft, Ethan Paul. Traduit par les lecteurs du site Les Crises.

Le par­rainage Lock­heed était là le 13 août – et puis ce n’était plus le cas.

Politi­co [média d’informations sur la poli­tique améri­caine basé à Wash­ing­ton, sa ver­sion papi­er est dis­tribuée gra­tu­ite­ment, NdT] sem­ble avoir mis fin, ou ten­té de dis­simuler, un accord de par­rainage entre Lock­heed Mar­tin, le plus grand fab­ri­cant d’armes des États-Unis, et son pop­u­laire bul­letin d’information Nation­al Secu­ri­ty Dai­ly. Les preuves de l’existence de cette rela­tion ont dis­paru du site web de Politi­co.

Depuis fin mars, Lock­heed fig­u­rait sur la liste des spon­sors de la let­tre d’information quo­ti­di­enne – une lec­ture pop­u­laire par­mi l’élite de la poli­tique étrangère de Wash­ing­ton qui s’appelait aupar­a­vant Morn­ing Defense. Avant cela, son spon­sor était Northrop Grum­man, le troisième plus grand fab­ri­cant d’armes des États-Unis.

Le matin du 16 août, Eli Clifton, con­seiller prin­ci­pal du Quin­cy Insti­tute et col­lab­o­ra­teur de Respon­si­ble State­craft, a attiré l’attention sur cette rela­tion dans le con­texte du retrait d’Afghanistan dans un tweet qui est ensuite devenu viral ; le finance­ment a égale­ment fait l’objet de moqueries sur Red­dit. L’édition du lun­di du Nation­al Secu­ri­ty Dai­ly pub­liée dans l’après-midi ne men­tion­nait plus Lock­heed comme spon­sor, pas plus que toutes les édi­tions ultérieures du bul­letin pub­liées depuis cette date.

De plus, le par­rainage de Lock­heed a égale­ment dis­paru de toutes les édi­tions précé­dentes de la let­tre d’information dans les archives de Politi­co. Mais les out­ils d’archivage sur Inter­net mon­trent que le par­rainage était tou­jours men­tion­né avant le 16 août.

L’édition du 10 mai de Morn­ing Defense en est un exem­ple. Avant le 16 août, la men­tion « Pre­sent­ed by Lock­heed Mar­tin » appa­rais­sait sous le titre et la sig­na­ture. Au milieu de la page, on pou­vait égale­ment trou­ver deux pub­lic­ités Lock­heed, l’une van­tant les mérites de son avion de com­bat F‑35 comme « pierre angu­laire de la flotte de chas­se de l’armée de l’air américaine ».

Mais désor­mais, ni le par­rainage ni les pub­lic­ités n’apparaissent sur la page. Le même sché­ma se retrou­ve dans toutes les édi­tions du bul­letin d’information depuis au moins mars, si ce n’est avant, et aucune note édi­to­ri­ale n’est jointe pour recon­naître ou expli­quer ce changement.

Il existe des preuves claires que le 16 août a été la date déci­sive. Le par­rainage de Lock­heed était encore présent sur les édi­tions du 13 août et du 11 août de la let­tre d’information avant cet après-midi-là ; plus tard dans la soirée, il avait dis­paru des deux.

Cer­tains de ces change­ments ont été sig­nalés à l’origine par Heavy.com le 17 août, bien que ce rap­port ne men­tion­nait que trois édi­tions de la let­tre d’information, omet­tant que le par­rainage avait dis­paru de toutes celles qui remon­taient au mois de mars.

Il est pos­si­ble que le par­rainage ait pris fin par coïn­ci­dence. Il est égale­ment pos­si­ble que Politi­co ait com­mis une erreur tech­nique, plutôt que de ten­ter délibéré­ment de faire dis­paraître d’Internet toute preuve de sa rela­tion antérieure avec Lockheed.

Quoi qu’il en soit, quiconque tombe aujourd’hui sur d’anciennes édi­tions de la let­tre d’information n’a aucun moyen de savoir que la rela­tion entre Politi­co et Lock­heed exis­tait au moment de la pub­li­ca­tion, voire qu’elle exis­tait tout court. À un moment d’autocritique pro­fonde sur la poli­tique étrangère améri­caine – et sur la manière dont l’industrie de la défense a longtemps exer­cé une influ­ence démesurée à Wash­ing­ton – Politi­co sem­ble avoir essayé de se débar­rass­er de tout lien compromettant.

Ni Politi­co ni Lock­heed n’ont répon­du aux mul­ti­ples deman­des de com­men­taires pour pré­cis­er si leur rela­tion avait effec­tive­ment pris fin, ou si la sup­pres­sion du par­rainage de Lock­heed dans les édi­tions précé­dentes du Nation­al Secu­ri­ty Dai­ly était délibérée ou une erreur.

Source : Respon­si­ble State­craft, Ethan Paul, 03/09/2021

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