Première diffusion le 11/09/2020
Les médias continuent de parler de « l’affaire Obono », événement politico-médiatique né de la parution du récit intitulé « Obono l’Africaine » dans Valeurs Actuelles n°4370, daté du 27 août au 2 septembre 2020. Une affaire qui a des implications et des ramifications révélatrices de l’état de déliquescence de la vie médiatique en France.
Une déliquescence dont le premier rebondissement politiquement très problématique a été marqué par l’éviction du directeur de la rédaction de Valeurs Actuelles, Geoffroy Lejeune, du plateau de la chaîne de Télévision LCI où, dans le cadre de la liberté et de la diversité de la presse, il devait représenter son hebdomadaire et des idées dites de droite. Mesure unilatérale, prise dans qu’aucune décision de justice n’ait été prononcée, même si le député de La France Insoumise, Danièle Obono, née le 12 juillet 1980 à Libreville au Gabon a porté plainte et si le parquet de Paris a ouvert une enquête.
Après Tintin au Congo, c’est Obono à Paris
D’après sa biographie officielle, Obono, porte-parole de LFI et député depuis 2017, provient de la bonne bourgeoisie gabonaise. Elle est la fille d’Hortense Simbou Mbadinga, secrétaire à Air Gabon, et de Martin Edzodzomo Ela, économiste, cadre supérieur à la banque Paribas-Gabon de 1975 à 1979. Ce dernier a été écarté de ses fonctions pour son opposition au régime d’Omar Bongo, après avoir été candidat à l’élection présidentielle gabonaise de 1998. Il aurait été emprisonné quelques jours. Obono a vécu au Gabon jusqu’à l’âge de onze ans, puis a rejoint la France au moment de son entrée au collège à Montpellier.
Née gabonaise, Danièle Obono a été naturalisée française en 2011. Elle est donc Gabono-française et est devenue député à peine six ans après avoir été naturalisée, un fait assez rare pour être signalé – et pas uniquement à l’échelle française. Depuis la colonisation de l’Afrique par l’Europe, il n’est ainsi pas d’exemple d’Européens occupant aussi rapidement de telles responsabilités politiques, électives, dans leur nouveau pays d’implantation. Du reste, il n’est pas d’exemples de députés français et blancs dans les assemblées nationales des pays africains.
Il n’est ainsi pas interdit de trouver étrange d’entendre la députée de la République Obono, récemment française, en termes de durée depuis l’acquisition de ses papiers, faire partie ou soutenir, cela dépend des moments et des sujets, des mouvances proches ou liées aux indigénistes pour lesquelles la France actuelle ne serait pas seulement « post-coloniale » mais « raciste » et « coloniale ». Explications : la situation faite aux descendants ou supposés tels des colonies, ou aux descendants ou supposés tels de l’esclavage, serait une situation coloniale actuellement, et par voie de conséquence « raciste ». Les colonies auraient été importées sur le territoire français car les « anciens colonisés » subiraient la même situation qu’à l’époque coloniale, cette dernière étant automatiquement présentée comme négative, un étonnant trou de mémoire au regard des politiques d’alphabétisation, d’hygiène, de médecine, d’infrastructures, de culture… qui y furent menées. Obono et ses amis ou relations demandent pourtant de la repentance et des indemnités, en sus de lois mémorielles telles que la loi Gayssot relative à la seconde guerre mondiale. Ces revendications cachent en réalité une haine de la France et une volonté de remplacer la population ayant origine européenne. Ainsi qu’un réel racisme anti-blanc, souvent associé à un suprémacisme noir – les deux complètement niés par les médias officiels.
Michel Onfray démonte l’argumentaire de la députée gabono-française
Invité sur le plateau de LCI, samedi 5 septembre 2020, Michel Onfray aurait suscité « la polémique », selon l’immense majorité des médias. Ce n’est pas tout à fait exact : il a surtout réclamé la même liberté de la presse et d’expression pour tous les organes de presse, y compris Valeurs Actuelles, cela même que refuse cette même majorité des médias qui voudrait voir disparaître toute pensée autre que social-libérale dans le paysage journalistique. Pour le philosophe, de plus en plus clairvoyant quant à la réalité d’un système dont il fit autrefois partie, de par sa présence régulière un peu partout, le récit est simplement « une fiction ». Plus précisément : « Tout devient extrêmement compliqué. Les gens ne savent plus ce qu’est l’ironie, ce qu’est l’esprit voltairien, ce qu’est l’humour, ce qui distingue toutes ces choses-là. C’était une fiction ». Il est exact qu’il n’est pas plus raciste, pour évoquer un autre philosophe des Lumières, de parler de l’esclavage à travers d’une fiction mettant en scène Obono que de critiquer l’absolutisme royal à travers les Lettres persanes ainsi que Montesquieu le fit. Un soutien pour le moins courageux de la part d’un Michel Onfray, maintenant systématiquement présenté comme un « polémiste », puisque Danièle Obono a porté plainte contre Valeurs Actuelles, estimant qu’il s’agissait d’un « combat universel contre le racisme ». Une action menée « pas seulement pour (elle), mais pour toutes celles et ceux qui ont été renvoyés, par ce texte raciste et xénophobe dans son essence, à un « chez eux » imaginaire loin de la France. » Dans un même temps, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour « injure à caractère raciste ». Notons que dans le cas précis d’Obono le « chez elle » ne tient guère de l’imaginaire, puisque cela s’appelle le Gabon, et que la notion de xénophobie, le mot signifiant haine ou rejet de l’étranger, parait malvenue si elle se considère comme française. Il y a un choix clair à faire de sa part : française et donc n’étant pas victime de xénophobie ; étrangère et donc ne pouvant être député de la république française.
Invité sur LCI la veille – la chaîne qui se débarrasse de Geoffroy Lejeune –, par Elisabeth Martichoux, journaliste de gauche sociale-libérale en place depuis fort longtemps, dents accrochées à de nombreux râteliers, Michel Onfray avait tenu les mêmes propos, avec d’intéressants développements. Martichoux défend la liberté de la presse de Charlie Hebdo mais Onfray embraye : « Moi je défends la liberté de la presse mais pas seulement de la presse de gauche ». Il défend aussi celle de Valeurs Actuelles. La journaliste tente alors de sauter sur l’occasion : « Il n’y a pas de relent de racisme ? ». Évidemment non, sauf si un tribunal en décide en vertu de la loi. Onfray essaie de lui expliquer qu’il ne porte pas plainte, n’est pas défendu par le gouvernement ou le président de la république quand Charlie Hebdo le qualifie de « Doriot », autrement dit de « fasciste » ou de « nazi » – ancien leader du parti communiste français, député de Saint-Denis, Jacques Doriot fut collaborateur durant la seconde guerre mondiale et combattit sous l’uniforme allemand sur le front de l’Est. Réponse ? « Liberté de critique ». Martichoux ne semble pas comprendre que critiquer les positions de Danièle Obono sous forme de fiction ressort aussi de cette même « liberté de critique ». Cette liberté semble donc être étonnement ancrée à gauche.
Onfray insiste, comme sur BFM, en redisant que « c’est une fiction ». Concernant la question suivante, « On a le droit de représenter une élue de la république en forme d’esclave ?», Michel Onfray donne un argument qui porte : Obono, Diallo, Traoré etc, patronymes en vigueur dans l’Afrique francophone (grâce à la colonisation ?), répètent à satiété qu’ils ne seraient que des descendants d’esclaves, qu’ils ne seraient de ce fait que des victimes (oubliant au passage de signaler qu’ils sont peut-être des descendants d’esclavagistes). Selon Onfray, ils devraient donc être satisfaits qu’un organe de presse conservateur accède à leur principale revendication en les reconnaissant pour ce qu’ils prétendent être, des esclaves réincarnés en France en plein 21e siècle. Valeurs Actuelles ne fait que dire ce qu’ils affirment : « C’est quand même étrange que des gens disent nous sommes des descendants d’esclaves, cela nous donne des droits, mais quand c’est dit dans un journal de droite, et sous forme de fiction, c’est interdit ». Notons qu’Elizabeth Martichoux regarde étrangement Michel Onfray, ne saisissant pas la logique pourtant évidente de son propos. Argument de Martichoux : « Le parquet a ouvert une enquête, on verra ». Réponse de Michel Onfray : « Moi, quand on me dit que je suis Doriot, est-ce que le parquet ouvre une enquête ? ». Argument imparable d’Onfray : « Il faut accepter la critique. En politique, on donne et on prend des coups ».
Europe 1, la queue de la comète ?
L’intolérance de la « gauche » libérale libertaire peut tuer professionnellement. Ainsi, complètement en dehors de cette « affaire », le journaliste et ancien rédacteur en chef adjoint de Valeurs Actuelles Louis de Raguenel avait été nommé responsable du service politique d’Europe 1 début septembre 2020. Immédiatement, « les représentants du personnel » de la radio se sont opposés à cette nomination, organisant même une assemblée dite générale le 7 septembre afin de voter le rejet de cette nomination. Un rejet qui a obtenu le résultat suivant : 114 pour, 3 contre. Un vote soviétique pour s’assurer qu’un journaliste de droite ne puisse plus exercer sa profession. C’est sans doute cela que les journalistes français, massivement libéraux libertaires, appellent la tolérance, la liberté d’opinion ou la liberté d’expression. Le crime de ce journaliste ? Avoir… travaillé à Valeurs Actuelles. Ce même reproche lui a été fait par le Syndicat National des Journalistes… censé tout au contraire et justement défendre les journalistes. Peut-être ce syndicat sent-il la nécessité de défendre toute la profession contre l’ancien journaliste de Valeurs Actuelles ? Un homme dangereux ? Les médias de grand-chemin aiment la liberté de pensée, à cette seule condition : penser tous dans le même sens.
Deux poids deux mesures
Sur CNews, dans l’émission L’heure de pros, Charlotte d’Ornellas, journaliste de Valeurs Actuelles, éditorialiste invitée de l’émission, donnait son sentiment sur cette affaire :
« Mon sentiment est que cela dépasse l’entendement (…) on peut critiquer le texte, mais des journalistes dont le métier est d’expliquer une situation ont voulu faire croire que Valeurs Actuelles avait de la sympathie ou trouvait que l’esclavage était marrant (…) On peut discuter de l’idée de cette fiction mais personne ne l’a fait. Ce procès n’a aucun sens. Dans la France de Charlie, il y en a qui ont le droit, il y en a qui n’ont pas le droit (…) Au mois de juin, il y a eu un mouvement mettant l’occident au ban des accusés, or Obono fait partie de cette frange idéologique qui prétend que la France est coupable de tout ». Elle critique la mauvaise foi du monde médiatique. Pour elle, 99 % des commentateurs n’ont pas lu la fiction et le dessin est sorti de son contexte. Dans cette fiction, « il n’y a pas de doute que l’esclavage est abominable. Soit on a le droit dans le pays de Charlie et tout le monde a le droit, soit on a pas le droit ».
Charlotte d’Ornellas aurait pu ajouter que le dessin critiqué est tout simplement une reprise d’un dessin présent dans nombre de manuels scolaires de 4e, lesquels dénoncent évidemment l’esclavage. Une dénonciation très fortement présente en France dans le cadre scolaire, ce que nient justement Obono et ses amis, négationnistes de la réalité historique. Par esprit de collaboration, le système médiatique et politique en place, minoritaire dans le pays mais tenant les lieux de pouvoirs, fait leur jeu.