Rediffusion. Première diffusion le 15 mai 2018
Nous avons consacré plusieurs articles aux réactions des médias après l’action de Génération Identitaire de défense des frontières européennes dans les Alpes françaises en avril 2018. Le vocabulaire employé que ce soit dans les médias nationaux ou régionaux, à la télévision ou à la radio, était celui de la disqualification morale. L’interdiction de deux pages Facebook par le réseau social californien a été analysée en référence à un article de la Fondation Polemia. Le politologue Dominique Reynié, Président de la Fondapol (souvent présentée comme proche de LR) a publié une intéressante tribune sur le sujet dans Le Figaro du 11 mai 2018).
Comment Facebook justifie la censure
Le politologue enseignant à Sciences Po et spécialiste du populisme, cite le communiqué de Facebook. L’entreprise justifie sa décision en ces termes : « Nous n’autorisons pas les discours incitant à la haine sur Facebook, parce que ces discours créent une atmosphère d’intimidation et d’exclusion, et peuvent aboutir à des violences dans le monde réel. » Exhibant ensuite le « code de conduite » signé avec la Commission européenne en 2016, Facebook assure avoir l’obligation de réagir en moins de vingt-quatre heures quand un « discours de haine » lui est signalé par des utilisateurs ». Fin de citation.
Dominique Reynié poursuit : « Pourtant, chacun peut consulter, exemple entre mille, des comptes de black blocks, agrémentés de vidéos ou de photos montrant des policiers en flamme, des CRS à terre et blessés, le tout accompagné de commentaires jubilatoires qui expriment souvent de la haine. C’est depuis l’un de ces comptes, toujours actif et dont je n’approuverais pas la suppression, qu’à l’occasion du 1er Mai fut lancé un événement promettant, je cite, « un mai sauvage », auquel se sont inscrits plus de 1100 participants, donnant lieu à des manifestations de haine dont on a pu constater ce jour-là les effets, bel et bien réels, dans les rues de Paris, sans émouvoir Facebook ».
Censure privée et censure publique, enfouissement des opinions
L’auteur souligne, ce qui avait déjà surpris l’Ojim, la conjonction d’une censure publique (l’intervention du préfet qui préside la DILCRAH) et d’une censure privée (celle de l’entreprise Facebook) : « Qui peut dire comment et par qui a été prise la décision de fermer le compte de Génération identitaire ? Pourquoi ce compte en particulier, parmi tous ceux qui, souvent, devraient être frappés de la même sanction ? Enfin, pourquoi un préfet de la République, le délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah), s’est-il publiquement réjoui de la décision de Facebook, dans un tweet dont le texte et la forme semblent vouloir suggérer qu’il avait lui-même pris part à cette décision ou qu’il en avait été informé ? S’agit-il d’un pacte de censure entre la puissance publique et l’entreprise privée ? ».
Il ajoute que le procédé, « l’emploi d’une procédure privée, aussi parfaitement invisible que terriblement efficace, offrant le pouvoir de déclasser — en fait d’enfouir — des opinions», aboutit à une censure silencieuse, en-dehors de toute intervention judiciaire. Il conclut « la question posée par la fermeture du compte de Génération identitaire est, à proprement parler, cruciale : il s’agit de savoir si nous sommes engagés dans un processus de privatisation de nos libertés publiques et en dehors de tout contrôle de type juridictionnel ou parlementaire. ». La question est posée.