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France Inter refuse la publicité sur le référendum citoyen

22 novembre 2019

Temps de lecture : 4 minutes
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France Inter refuse la publicité sur le référendum citoyen

Temps de lecture : 4 minutes

Prenez un président de la République, au hasard Emmanuel Macron. Prenez une présidente de Radio France, au hasard Sibyle Veil. Toujours au hasard, prenez-les comme camarades de promotion à l’ENA. Que croyez-vous qu’il arriva ? Vous le saurez ci-après. 

Française des Jeux et Aéroports de Paris

Les pou­voirs publics ont décidé de pri­va­tis­er les deux entre­pris­es. La pri­vati­sa­tion de la FDJ ne soulève que peu de ques­tions, sinon son prix. Le jeu n’est pas une entre­prise rel­e­vant du régalien et l’essentiel des revenus pour l’État provient des tax­es qui per­dureront. L’opération sem­ble un suc­cès avec plus de cinq cent mille souscrip­teurs indi­vidu­els. Il n’en est pas de même pour ADP où des opposants récla­ment un RIP, référen­dum d’initiative pop­u­laire. Pour cela il faut au moins 4,5 mil­lions de sig­na­tures, encore faut-il faire un peu de battage pour les rassem­bler et moins d’un mil­lion sont réu­nies mi-novem­bre 2019.

Publicité oui, publicité non

Radio France dif­fuse des spots, sans doute réglés par l’État, pour que le pub­lic achète des actions de la FDJ. Fort bien. Au même moment, les séna­teurs hos­tiles à la pri­vati­sa­tion d’ADP et par­ti­sans du RIP réalisent un spot audio de 30 sec­on­des et met­tent 100.000 euros sur la table pour le dif­fuser sur Radio France.

Réponse de la cama­rade d’école et de karaoké du Prési­dent : spots refusés, car le cahi­er des charges de l’entreprise Radio France stip­ule dans son arti­cle 37 que “les mes­sages pub­lic­i­taires ne doivent con­tenir aucun élé­ment de nature à cho­quer les con­vic­tions poli­tiques des audi­teurs”. Quid alors des con­vic­tions poli­tiques des audi­teurs opposés à la pri­vati­sa­tion de la FDJ ?

Comme le souligne Daniel Schnei­der­mann, « Vient tou­jours un moment, pour les tit­u­laires de man­dats publics, affec­tant la plus irréprochable neu­tral­ité, où il faut sor­tir du bois, et faire allégeance à celui qui vous a nom­mé ». On ne saurait mieux dire.

Jusqu’à présent, on pou­vait, avec beau­coup de bonne volon­té, met­tre l’indifférence médi­a­tique pour la cam­pagne de sou­tien au Référen­dum d’Initiative Partagée sur le compte du dés­in­térêt pour une ques­tion con­sid­érée comme sec­ondaire, ou trop com­plexe, ou tout ce qu’on voudra. Mais voici, pour crev­er le mur du silence, que les par­lemen­taires opposants pro­duisent des spots de trente sec­on­des. Qu’ils les finan­cent eux-mêmes (à la hau­teur, con­sid­érable, de 100 000 euros, à com­par­er aux 12 mil­lions engloutis dans la pro­mo­tion du “grand débat” du pou­voir, au print­emps dernier). Radio France, qui dif­fuse en ce moment d’autres spots appelant les épargnants à inve­stir dans la pri­vati­sa­tion de la Française des Jeux, a fait savoir, sur ses pro­pres antennes, qu’il refuserait les spots ADP. La société de Sibyle Veil, cama­rade de pro­mo­tion (et de karaoké) d’Emmanuel Macron à l’ENA, se fonde sur l’article 37 de son cahi­er des charges : “les mes­sages pub­lic­i­taires ne doivent con­tenir aucun élé­ment de nature à cho­quer les con­vic­tions poli­tiques des audi­teurs”. Mais quid des audi­teurs choqués dans leurs con­vic­tions poli­tiques par la pri­vati­sa­tion de la Française des Jeux ?

Ce niet présente le triste avan­tage de clar­i­fi­er de paysage. Avant-hier, invité par Frédéric Tad­dei, dans son émis­sion de RT France (oui oui, Télé Pou­tine !), à un débat con­tra­dic­toire sur la pri­vati­sa­tion de ADP, au titre de mon livre Pou­voir Dire Stop, je soulig­nais ce para­doxe : cette émis­sion était la pre­mière de son genre, ‑longue durée, con­tra­dic­toire- sur une chaîne dif­fusée en France. Jusqu’à présent, pour jus­ti­fi­er l’étouffement médi­a­tique de cette grande pre­mière démoc­ra­tique, les habiles nous ont expliqué que cette pri­vati­sa­tion, pour­tant au coeur de trois enjeux essen­tiels ‑démoc­ra­tique, économique, écologique- “n’intéressait pas les Français”. La preuve ? Seules 900 000 sig­na­tures, sur les 4,7 mil­lions req­ui­s­es, ont été à ce jour recueil­lies ! Le car­ac­tère dis­suasif du site de recueil des sig­na­tures ? Dû à son âge vénérable, bien enten­du. Aucune inten­tion maligne ! Avec la déci­sion de Sibyle Veil, au lende­main et dans la droite ligne du désor­mais célèbre “Ferme ta gueule” du général Georgelin, on peut appel­er les choses par leur nom : un sab­o­tage d’État.

Source : Arrêt sur Images, Daniel Schnei­der­mann, 15 novem­bre 2019

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