Ils examinent la gestion des comptes de France Télévisions pour la période 2017–2024 : trois magistrats de la Cour des Comptes mènent l’enquête sur le groupe de l’audiovisuel public.
Les comptes n’étaient déjà pas bons, en 2016, lorsque la Cour des Comptes avait produit son rapport sur France Télévisions. Manque d’anticipation sur les « évolutions à venir », résultats non atteints, gestion des ressources humaines inefficace… : les constats dressés par les Sages de la rue Cambon avaient été sans appel. Moins d’une décennie plus tard, trois magistrats réexaminent la bonne gestion du groupe sur la période 2017–2024, alors même que le groupe s’attend à enregistrer une perte nette de 41 millions d’euros pour 2025.
Des comptes dans le rouge
La santé financière de France télévisions n’est pas florissante : présidente de France Télévisions depuis Le 22 août 2015, Delphine Ernotte le sait, elle qui veut mener un plan d’économies à 200 millions d’euros. Pour la première fois en neuf ans, le groupe de l’audiovisuel public présente un budget déficitaire de 86 millions d’euros. L’image de « bon gestionnaire » que s’était donnée la présidente du groupe, dont le mandat doit s’achever le 1er janvier 2025 prochain, s’apprête-t-elle à s’étioler ? Pour pallier ce regrettable découvert, France Télévisions aurait quoiqu’il en soit contracté deux prêts d’un montant de 40 millions d’euros. Financement de France TV Studio (filiale de France TV), soutien financier (appuyé également par la ville de Nice) à la construction du siège d’Ici (ancien France 3 Côte d’Azur)… : cette manne financière doit aider le groupe dans ses nouveaux projets. Un autre prêt serait en cours de négociations auprès de l’Agence France Trésor : ce sont 50 millions d’euros dont le directeur financier du groupe espère qu’il s’adossera à la trésorerie de l’entreprise. Avec une somme négative approchant les 23 millions d’euros, la trésorerie de France Télévisions n’est pas au beau fixe.
Les mauvais comptes : la faute à l’État, selon Ernotte
Si Delphine Ernotte assure que les atermoiements de la part de l’État sur le budget (crédits non respectés…) sont à l’origine du piteux état des comptes, son directeur financier, Christian Vion, ne semble pas avoir le même avis, comme l’a relevé La Lettre. Et de prendre l’exemple des JO, dont les recettes publicitaires auraient rapporté 80 millions d’euros alors même que l’acquisition des « JOP » seuls auraient coûté entre 150 et 170 millions… De même, le règlement de loyers de deux nouveaux sites, qui ne s’est pas accompagné de la vente d’anciens immeubles du groupe, aura coûté cher au groupe. Enfin, le directeur financier aurait assuré que la suppression de 180 équivalents temps plein permettrait de faire des économies…Quelles positions va prendre Delphine Ernotte face à cette situation délicate, elle qui n’a pas précisé si elle était candidate à sa propre réélection l’année prochaine mais qui semble laisser la presse ne pas exclure l’hypothèse d’un troisième mandat ?
La Cour des Comptes face aux syndicats
C’est dans ce contexte que les trois magistrats de la Cour des Comptes (Christine de Mazières, Laurent Roussely, Gwenaëlle Suc) se lancent dans une nouvelle évaluation de la gestion des comptes du groupe audiovisuel pour la période 2017–2024. Après avoir rencontré la direction du groupe, ils se sont entretenus avec les représentants des syndicats (CGT, CFDT et FO), notamment sur la question des ressources humaines. S’interrogeant sur « les rigidités de la gestion de l’entreprise » et « de l’intense turnover au sein du top management », les magistrats ont vu les syndicats déplorer l’instabilité à la tête de la direction de l’information (avec un changement à six reprises à la tête de ce poste depuis l’arrivée d’Ernotte en 2015), les mouvements à la direction régionale du réseau France 3, les rotations successives à la direction des ressources humaines. De là à remettre en question les qualités « managériales » de Delphine Ernotte…
Voir aussi : Delphine Ernotte, portrait