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France TV revisite – et détruit — le roman national avec Notre histoire de France. Troisième partie

1 novembre 2024

Temps de lecture : 4 minutes
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France TV revisite – et détruit — le roman national avec Notre histoire de France. Troisième partie

Temps de lecture : 4 minutes

Suite de notre dossier sur la série documentaire de France Télévisions consacrée à l’Histoire de France (partie 1, partie 2).

Épisode 3 : L’empire de Charlemagne

C’est à par­tir de cet épisode que les visées décon­struc­tri­ces s’essoufflent, sans toute­fois dis­paraître. À part cette men­tion de la mon­naie unique cen­sée faire de Charle­magne le précurseur de l’actuelle Union Européenne – et encore, ce n’est que sug­géré — il n’y a pas grand-chose à se met­tre sous la dent. Nous retombons – pour repren­dre les ter­mes de Libéra­tion et à son grand dam – dans le roman nation­al de fac­ture classique.

Même la cam­pagne atroce con­tre les sax­ons, mal­gré l’outrance des vio­lences com­mis­es, n’est con­damnée qu’en demi-teinte : « Les sax­ons paient le prix de la soif de con­quête de Charle­magne et sont con­ver­tis au chris­tian­isme par la force. 4500 per­son­nes décapitées pour frap­per les esprits » sont les com­men­taires sug­gérés par les événe­ments sanglants.

Il y a certes l’échec de la cam­pagne d’Es­pagne qui donne lieu à une démythi­fi­ca­tion de la bataille de Ron­ce­vaux, bataille à laque­lle nous devons la Chan­son de Roland, la pre­mière à évo­quer la doulce France. Défaite mag­nifiée par cette chan­son de geste qui évoque les « assail­lants Sar­rasins » alors que les respon­s­ables de la débâ­cle sont les Basques. De quoi servir le réc­it de la recon­quête face à l’in­va­sion arabo-musul­mane en Espagne, nous dit-on.

Épisode 4 : Les croisades de saint Louis

Pierre Guil­lain de Bénou­ville, résis­tant, homme poli­tique et écrivain français, a dit très justement :

« Faire mémoire de Saint Louis, c’est retourn­er à la source même où buvait l’Oc­ci­dent quand, croy­ant en lui, il se con­stru­i­sait au lieu de se mépris­er. Nég­liger cette prodigieuse his­toire, c’est volon­taire­ment détru­ire l’héritage et s’en­fon­cer plus avant dans le chemin de l’ou­bli sans retour, qui est celui de la mort sans résur­rec­tion. »

L’épisode est intro­duit, assez sobre­ment cette fois, par Tomer Sis­ley, comme si les inten­tions ini­tiales affichées n’é­taient plus de mise :

« Cette his­toire est celle d’un roi au som­met de sa gloire, à la tête d’un roy­aume prospère, mais dont la vie est guidée par une quête spir­ituelle et cela va avoir de lour­des con­séquences dans ce que l’on appelle désor­mais le roy­aume de France. »

C’est l’his­toire du pre­mier roi de France canon­isé « pieux et ambitieux », qu’on nom­mera désor­mais saint Louis.

Sans vers­er dans l’ha­giogra­phie, pas de décon­struc­tion à pro­pre­ment par­ler ni de dia­boli­sa­tion. La rouelle n’est même pas men­tion­née, alors qu’elle aurait pu fournir des muni­tions à la décon­struc­tion d’un mythe nation­al et chré­tien tout uni­ment. À la place, des éloges :

« De son règne, on retien­dra de très grandes évo­lu­tions de notre société. Comme, par exem­ple, la base d’un sys­tème judi­ci­aire plus acces­si­ble et plus juste. On lui doit de grands ouvrages, comme la Sainte Chapelle ou la cathé­drale Notre-Dame de Paris. À son époque, la France ray­onne. Paris est la plus grande cap­i­tale du monde et le com­merce y est prospère. »

Avant de pour­suiv­re – il fal­lait bien un bémol — :

« Pour­tant Saint Louis va met­tre en péril son roy­aume à cause d’une obses­sion qui pour­rait causer sa perte, celle des croisades en terre sainte. »

Les épisodes qui suiv­ent, à savoir Jeanne d’Arc face aux anglais et les noces rouges d’Hen­ri IV et de la reine Mar­got sont de la même eau. Jeanne d’Arc n’y est pas présen­tée comme une héroïne trans avant l’heure, mal­gré les déc­la­ra­tions de France TV et, à part le fait que les catholiques ont tou­jours le mau­vais rôle face aux protes­tants sous Hen­ri IV, il n’y a rien de bien « déconstructeur»…

Au fond toute cette his­toire, à pro­pos de la décon­struc­tion du roman nation­al, n’est rien d’autre qu’une pièce de Shake­speare. Mais pas n’im­porte laque­lle : Beau­coup de bruit pour rien. Ça m’en­nuie de le dire mais Libé a rai­son pour une fois, on ne peut pas faire de l’his­toire de France sans tomber dans le roman national…

Jean Mon­talte

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